Les inégalités atteignent des sommets, et sont en train de déchirer nos sociétés. Monument de cynisme, les autorités responsables de ces mêmes inégalités s’érigent désormais en protecteurs des pauvres et des opprimés.
La politique monétaire des banques centrales est productrice d‘inégalités de patrimoine par milliers de milliards – et je pèse mes mots.
Ceux qui ont déjà la richesse voient leur fortune progresser de façon exponentielle, ceux qui n’ont pas de patrimoine s’appauvrissent, sont mis au chômage et survivent soit de Restos du Cœur-soupe populaire, soit de répartition de subsides gouvernementaux.
Aux uns l’insolente l’opulence, aux autres la misère honteuse et la précarité destructrice. Le cynisme est à son comble : la très forte dégradation du marché du travail la semaine dernière aux Etats-Unis a provoqué une envolée boursière sans précédent.
L’emploi salarial non agricole de novembre aux Etats-Unis n’a augmenté que de 245 000, soit la moitié seulement des prévisions moyennes. C’est une baisse par rapport aux 610 000 d’octobre, et la plus faible croissance de l’emploi depuis la débâcle d’avril.
Des millions d’Américains savent qu’il n’y a pas de travail pour eux. Découragés, ils cessent de chercher du travail : la participation à la main d’œuvre est en baisse.
Affligeant
Les actions américaines se sont envolées suite à cette nouvelle affligeante. Quelques gros titres de Bloomberg ont capturé le phénomène :
« Les actions gagnent à mesure que les emplois manqués stimulent les paris sur une relance. »
« Les arguments de la Fed pour une nouvelle action de relance monétaire se renforcent grâce aux chiffres faibles de l’emploi aux Etats-Unis. »
Ou encore :
« Les données sur l’emploi ont été un ‘échec parfait’ pour la Fed. »
La communauté spéculative mondiale adore les échecs de la Fed : plus les banques centrales échouent à relancer l’activité économique et à rétablir les revenus du travail… plus elles distribuent l’argent gratuitement et sans risque aux ultra-riches !
Novembre 2020 est à retenir pour la postérité.
Les futurs historiens seront sûrement confondus. C’est le mois de novembre le plus fort, le plus explosif, le plus enrichissant de tous les temps pour les détenteurs d’actions.
En hausse de 12% pour le mois, le Dow Jones a affiché sa plus grande avance d’un mois depuis janvier 1987. Le S&P 500 a rapporté 10,9%, une énorme aubaine. L’indice arithmétique de la valeur de l’« action moyenne » affichait une progression de 18,3% en novembre. Le Russell 2000 des petites capitalisations a bondi de 18,3% et le S&P 400 Midcaps de 14,1%.
La dynamique de mise en fusion boursière est un phénomène mondial : marchés « développés » comme marchés émergents. Les principaux indices boursiers ont augmenté de :
25,2% en Espagne ;
23,0% en Italie ;
20,1% en France ;
15,0% en Allemagne ;
15,0% au Japon ;
10,3% au Canada ;
10% en Australie ;
19,5% en Pologne ;
15,5% en Russie ;
15,4% en Turquie ;
14,3% en Corée du Sud ;
11,5% en Inde ;
15,9% au Brésil ;
13,0% au Mexique ;
20,5% en Argentine.
Cynisme et mauvaise foi
Maintenant, si vous êtes en mesure d’apprécier l’ironie sans claquer votre ordinateur par terre…
… L’ancienne présidente de la Fed, Janet Yellen, archi-responsable de ces politiques monétaires scandaleuses qui fracassent nos sociétés, cette Yellen ose déclarer à Reuters :
« Il est vraiment temps de reconnaitre que nous avons maintenant une société où le capitalisme commence à se déchaîner ; il doit être réajusté afin de garantir que ce que nous faisons est durable et que les avantages de la croissance sont plus largement partagés qu’ils ne l’ont été. »
Candeur ? Non : cynisme absolu des banques centrales et des élites du système. Ces gens sont des pompiers pyromanes.
Comment ne pas devenir terroriste face autant de cynisme, autant de mauvaise foi ?
La politique de la Fed et de ses consœurs est à elle seule la plus grande force dans la propagation des inégalités, avec ces neuf derniers mois qui nous offrent le plus grand épisode de répartition inéquitable de la richesse que l’on puisse imaginer.
La mauvaise gestion monétaire et les excès financiers sont une des principales causes de la folie du capitalisme.
Comment peut-on s’attendre à ce que des mesures de relance monétaire destinées à produire de l’inflation des prix puissent promouvoir une répartition plus équitable et plus morale de la richesse dans nos sociétés ?
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]