▪ Que le combat de boxe commence !… A ma droite, nous avons la déflation. Admirez ses poings vigoureux de liquidation de la dette et de contraction du crédit… A ma gauche, nous avons la planche à billets de Ben Bernanke, avec son menaçant uppercut inflationniste. Au final, ce sera l’inflation qui remportera la victoire, mais le match pourrait bien aller au bout des 12 rounds.
La déflation n’est pas une mauviette. Elle a un sacré punch. Des emprunteurs de tous types — des simples ménages détenteurs d’hypothèques aux gouvernements nationaux — se trouvent en défaut de rembourser leurs dettes… ou à le faire rapidement. Lorsque le plus faible de ces emprunteurs fait faillite, le prix des actifs chute et la confiance diminue ; ces deux éléments produisent des cessations de paiement supplémentaires. Une fois que ce cercle vicieux gagne en violence, tous sauf les emprunteurs les plus forts — ou les moins engagés — subissent.
Si, par exemple, la Grèce fait faillite, l’Irlande pourrait suivre… ainsi que le Portugal, l’Espagne, etc. Si la Grèce fait faillite, une contagion deviendrait assez probable, car ceux qui déversent leurs redevances en dollar à la Banque centrale européenne et au FMI commenceront à se rendre compte que leurs tentatives de sauvetages sont vaines. Finalement, les contribuables des pays relativement solvables ne voudront plus verser leurs capitaux dans les trous sans fond grec, irlandais ou portugais. Finalement, le renflouage cessera et les faillites — poliment appelées « restructurations » — pourront commencer.
Conscientes de ces sombres perspectives, et par peur des forces déflationnistes en général, les banques centrales d’Amérique et d’Europe ont riposté par divers moyens combinés : impression de monnaie, prêts subventionnés et renflouements financés par la dette. En d’autres termes, toutes les réponses inflationnistes classiques, plus quelques innovations comme l’assouplissement quantitatif.
Jusqu’ici, le match entre déflation et inflation ressemble à un match nul. D’un côté l’économie mondiale ne glisse pas dans un gouffre déflationniste, mais de l’autre, les effets inflationnistes apparaissent à divers endroits.
▪ Selon des données américaines officielles, l’indice des prix à la consommation (IPC) a augmenté de 3,2% au cours des 12 derniers mois, alors que l’indice des prix à la production (IPP) est en hausse de 6,8%. Ces deux chiffres ont certes augmenté mais aucun des deux ne semble particulièrement terrifiant… à première vue.
En effet, si l’on creuse un peu, on constate que ces taux d’inflation augmentent rapidement. Au cours des quatre premiers mois de cette année, l’IPC a bondi de 9,7% sur un an, tandis que l’IPP a grimpé au rythme annuel de 12,8%.
Les prix à l’importation montent également en flèche — de 2,2% en avril, après un bond de 2,6% les mois précédents. D’une année sur l’autre, les prix à l’importation sont en hausse de 11,1%. Mais une fois encore, la tendance s’accélère. Pendant les quatre premiers mois de cette année, les prix à l’importation ont bondi d’un taux annuel de 26,7% !
Remettons donc dans le contexte du monde réel ces faits et ces chiffres. Basé sur les plus basses de ces diverses données sur l’inflation, l’IPC, le salarié moyen américain n’a accompli aucun progrès au cours des quatre dernières années…
Le revenu hebdomadaire moyen américain a augmenté d’environ 12% depuis début 2006. Mais puisque l’IPC a augmenté d’autant, cela signifie que l’inflation a anéanti toute la croissance des revenus hebdomadaires.
Si, comme nous le soupçonnons, les forces inflationnistes continuent à l’emporter dans ce combat, les investissements en actifs physiques devraient bien performer, du moins par rapport à la plupart des autres options. Mais cette analyse n’apprend rien de nouveau aux fidèles lecteurs de notre chronique. Elle n’apprend sans doute rien de neuf non plus à nos lecteurs infidèles (ils se reconnaîtront !).
Nous avons chanté les louanges des actifs matériels comme l’or et l’argent-métal pendant plusieurs années. En fait, nous vantons les actifs physiques depuis si longtemps que notre analyse serait devenue lassante aujourd’hui… n’était-ce le fait qu’elle a été rentable.
Malgré cela, votre chroniqueur ne souhaite devenir lassant pour personne — que ce soit pour ses enfants, sa petite amie et surtout ses lecteurs. Il apportera donc une nuance à son mantra monotone « achetez des actifs physiques ».
Cette nuance, la voici : si l’inflation s’installe comme nous nous y attendons, les affectations de votre portefeuille qui ne sont pas des investissements en actifs physiques devraient néanmoins posséder des caractéristiques d’actifs physiques. Par exemple, lorsque vous allouez vos fonds à des actions spécifiques, insistez pour que ces actions possèdent deux attributs clés :
1) Une exposition importante à des revenus dans une devise autre que le dollar ;
2) Un important pouvoir de fixation des prix, même dans un cycle inflationniste.
Un solide bilan et de bons cash-flows devraient également aider.