▪ Le Financial Times continue sa série d’articles sur « le capitalisme en crise ». Nous commençons à nous en lasser. Nous espérions qu’au moins l’un des journalistes nous dirait ce qu’est la crise. Au lieu de ça, nous avons eu droit à des opinions diverses, aucune n’éclairant franchement la nature de la crise, et plusieurs exposant en fait les moyens d’empirer la situation.
Dans l’épisode de la semaine dernière, par exemple, nous avons découvert qu’en 2008, « les dirigeants des pays riches et en développement ont mis de côté leurs différences pour éviter un ralentissement mondial ».
Vraiment ? Si l’auteur avait une véritable appréciation du capitalisme, il saurait que les politiciens n’en ont rien fait. Ils ont mis de côté leurs différences pour empêcher le capitalisme de faire son travail. En 2008, après la chute de la maison Lehman, le capitalisme pointait ses canons en direction de la Maison Bank of America, la Maison Deutschebank, la Maison Goldman… et de nombreuses autres. Mais les autorités sont intervenues et ont stoppé les boulets à mi-course. Le processus d’ajustement des prix s’arrêta net.
Au lieu de permettre au capitalisme de régler le problème, les autorités l’ont aggravé. Elles ont donné plus d’argent aux institutions et aux gestionnaires qui avaient prouvé qu’on ne pouvait pas leur faire confiance.
Nous ne voulons pas réexpliquer toute la séquence d’événements qui nous a menés là où nous sommes, mais il est important de comprendre ce qui s’est passé.
Les rédacteurs du Financial Times — avec quasiment tous les journalistes financiers, économistes et bavards invétérés — se trompent du tout au tout. Ils semblent penser que Lehman Brothers était un échec du capitalisme. Symptomatique, selon eux, d’un échec plus vaste — dont quasiment tous pensent qu’il provient d’un manque de réglementation efficace.
« Trop de capitalisme… », c’est un ainsi qu’un sage exprimait la chose.
« La grande leçon de tout cela, c’est l’ampleur par laquelle le capitalisme mondialisé a dépassé la capacité des gouvernements à le gérer », déclare le Financial Times.
Le gérer ? Ils rêvent. Si les personnes qui dirigeaient Lehman Brothers ne pouvaient gérer leurs propres affaires, comment un groupe de bureaucrates allait-il s’y prendre ? De toute évidence, les autorités avaient encore moins d’idées de ce qui se passait que les « capitalistes » eux-mêmes.
▪ Le vrai problème de la finance
Le véritable problème n’était pas un excès de capitalisme, mais bien un manque — surtout lorsqu’on en avait besoin en 2008. Le secteur financier avait été corrompu par le gouvernement. Les subventions fédérales américaines versées au secteur de la construction… ainsi que des taux d’intérêt artificiellement bas de la part de la Fed… avaient créé une bulle dans l’économie et une véritable frénésie en Bourse. Les dirigeants bancaires avaient appris qu’ils pouvaient gagner des frais en faisant des prêts ; qui se souciait de récupérer lesdits prêts ?
La plupart des firmes de Wall Street avaient également cessé d’être véritablement capitalistes. Les bénéfices et les commandes n’étaient plus aux mains des vrais capitalistes, mais entre celles des gestionnaires. Ces 10 dernières années, par exemple, les propriétaires d’actions du secteur financier n’ont rien gagné. Zéro. Pas un sou. Mais les gestionnaires — des employés — sont devenus riches. Goldman Sachs, à elle seule, a fait passer125 milliards de dollars des actionnaires vers sa main-d’oeuvre, sur une période où les actionnaires eux-mêmes n’ont rien gagné.
Cela a donné aux employés de belles résidences secondaires sur la côte, mais les actionnaires n’ont reçu que peu de valeur réelle. Aujourd’hui, bon nombre de grandes banques ont une valeur inférieure à 2% de leurs actifs. Ce qui signifie que si leurs détentions de dette gouvernementale — par exemple — baissent de 2%, elles sont sur la paille. Cela les rend vulnérable à la prochaine crise… tout comme elles l’étaient à la précédente. Lorsque la crise est arrivée en 2008, il n’y avait pas assez de valeur pour empêcher la banqueroute.
Ce n’était pas une crise du vrai capitalisme. C’était un problème de capitalisme gériatrique… un problème simple que le vrai capitalisme savait réparer. Si on l’avait laissé faire son travail, ces banques auraient fait faillite… comme elles l’auraient dû.
L’effondrement des banques aurait impliqué l’effondrement de beaucoup d’autres choses. La dette grecque, par exemple. Les positions détenues par les banques auraient subi une baisse radicale… mettant la Grèce et d’autres gros débiteurs en faillite également.
C’est bien entendu ce que les autorités voulaient éviter à tout prix. Aujourd’hui, plus de trois ans plus tard, elles essaient encore de l’éviter. C’est le drame que nous suivons en Europe quasiment tous les jours.
Loin d’illustrer « le capitalisme en crise », tout ça montre la crise causée par les politiciens eux-mêmes. Maintenant, ils ont des banques qui seraient en faillite… si on laissait M. le Marché s’exprimer pleinement lui-même. Les banques en faillite sont maintenues en activité par des gouvernements qui devraient eux aussi être en faillite.
Et puisque M. le Marché est court-circuité… il ne peut résoudre le véritable problème. Les institutions en faillite restent en activité, faisant passer de plus en plus de ressources réelles vers des institutions zombie dirigées par des gestionnaires incompétents, mais grassement payés.
Ce qui donne à ces gestionnaires — ainsi qu’à leurs amis empêcheurs de tourner en rond — l’illusion d’être en train de réparer les choses.
Le Financial Times donne une solution creuse :
« … étendre et renouveler l’ordre multilatéral afin de construire une intégration économique avec une grande gouvernance globale ».
Nous ne sommes pas certain de ce que ça signifie. Mais nous savons que c’est une erreur.
2 commentaires
Clap clap clap
encore une article remarquable qui nous change de la pensée unique !
Merci Bill BONNER pour cette leçon de vérité économique qui vous fera toujours honneur,tant méritent l’honneur les regardants lucides de la vérité.