Comme une grande rivière paresseuse, les déficits continuent de couler. Les paiements d’intérêts américains augmentent. Tôt ou tard, les détenteurs d’actifs s’enlisent dans la boue.
« Les choses ont tendance à revenir à la ‘normale’. Si ce n’était pas le cas, il n’y aurait pas de ‘normal.' »
Alléluia ! L’économie s’affaiblit !
Dans le monde pervers de la finance, en 2024, une mauvaise nouvelle est en fait une bonne nouvelle. La hausse est égale à la baisse. Et les mensonges sont aussi appréciés que la vérité.
Les investisseurs n’ont pas besoin de nous pour relier les points entre eux. Lorsque l’économie faiblit, ils s’attendent à ce que la Fed réagisse en abaissant les taux d’intérêt. Un taux d’intérêt plus bas signifie plus d’emprunts, plus de spéculation et plus d’argent pour Wall Street.
Voici ce qui a été rapporté la semaine dernière :
« Le Nasdaq et le S&P atteignent des niveaux record… De nouvelles données montrent la faiblesse du marché de l’emploi et suscitent des espoirs de réduction des taux d’intérêt. »
Et puis, quelques jours plus tard…
« L’indice Dow Jones a clôturé vendredi au-dessus de la barre des 40 000 points pour la première fois depuis sa création il y a 139 ans.
Wall Street a été dopée ces derniers jours par l’espoir renouvelé d’une baisse des taux d’intérêt de la part de la Réserve fédérale, qui permettrait d’assouplir les conditions monétaires pour les consommateurs et les entreprises. »
Les consommateurs ne consomment pas davantage lorsque le marché du travail s’affaiblit. Les entreprises ne vendent pas beaucoup aux personnes sans emploi. Les ventes diminuent, elles n’augmentent pas. Les bénéfices des entreprises diminuent également. Les entreprises perdent de la valeur, au lieu d’en gagner.
Et alors ? Les cours des actions n’ont souvent que peu de rapport avec la valeur réelle des entreprises sous-jacentes. Au cours des dix dernières années, les cours des actions ont augmenté à un rythme trois fois supérieur aux ventes des entreprises. C’est ce que l’on appelle l' »expansion multiple ». Il s’agit généralement d’un prélude à la « contraction ».
Aujourd’hui, le ratio S&P 500/ventes est deux fois supérieur au niveau normal… et proche d’un niveau record. Tout comme en mars 2000, les actions semblent être à l’aube d’un coup dur.
Mais les investisseurs sont persuadés qu’une baisse des taux d’intérêt est imminente. Et ils savent ce que cela signifie : une hausse des cours boursiers.
Pour l’instant, les mauvaises nouvelles sont perçues comme des bonnes nouvelles, car elles augmentent la probabilité d’une baisse des taux. Alors, imaginez la joie intense que leur procurerait une guerre thermonucléaire…. ou une victoire de Kamala Harris en novembre – chacune de ces nouvelles pourrait envoyer les cours des actions sur la stratosphère Nous avons donc de nombreuses raisons de nous réjouir.
Notre analyste Dan Denning explique :
« Les services et l’industrie manufacturière – soit les deux piliers de l’économie – sont en contraction. Les trois dernières fois que cela s’est produit, nous étions soit au milieu, soit au tout début d’une récession. Il ne fait aucun doute que nous sommes déjà entrés en récession. »
Marketwatch développe cette idée :
« Les entreprises affichent la plus forte contraction depuis la pandémie, selon l’ISM. L’indice ISM des services est tombé à 48,8 % en juin, soit le niveau le plus bas depuis 2020. »
David Rosenberg ajoute :
« Le marché du travail se fissure, le ralentissement de l’activité dans les services pèse sur la croissance et les signaux financiers prospectifs continuent d’indiquer un ralentissement à venir. »
Dans tout ce brouhaha de « bonnes et de mauvaises nouvelles », presque personne ne parle de la mauvaise nouvelle, qui ne peut être perçue autrement : les Etats-Unis sont en train de se ruiner. Comme une grande rivière paresseuse, les déficits ne cessent de couler… ajoutant toujours plus aux 35 000 Mds$ de dette américaine. Les paiements d’intérêts américains augmentent. Et tôt ou tard, les détenteurs d’actifs se retrouveront coincés dans la boue.
Nous avons une idée maîtresse, qui guide la construction de notre stratégie. La plus grosse bulle de tous les temps, celle des obligations d’Etat, est en train d’éclater. Un défaut de paiement des gouvernements est imminent.
Oui… oui… « Le gouvernement américain ne peut jamais faire faillite parce qu’il peut toujours imprimer plus d’argent. » C’est ce que tout le monde dit. Mais ce n’est pas vrai. Afin d’éviter un défaut de paiement pur et simple, les autorités fédérales ont opté pour un défaut de paiement détourné. Ils « impriment » davantage de dollars. Les Etats-Unis feront toujours faillite, mais d’une autre manière. Les prix nominaux augmentent, certes, mais les prix réels (après inflation) sont en train de s’effondrer. Bloomberg rapporte :
« La Banque des règlements internationaux met en lumière la vulnérabilité des gouvernements, qui pourrait mener à une perte de confiance précipitée.
Dans son rapport de jeudi, S&P a laissé entendre que la probabilité que les Etats-Unis, l’Italie et la France parviennent à maintenir leur dette aux niveaux actuels – déjà élevés – est faible. »
Aux Publications Agora, nous partons du principe que les prix finissent par refléter les valeurs réelles et que les gens finissent par avoir ce qu’ils méritent. Tôt ou tard, les choses reviennent à la « normale ».
Nous ne savons pas plus que quiconque quand et comment cela se produira. Mais la probabilité qu’on l’en empêche, comme le suggère le rapport de S&P, est « faible ».