Tandis que les fintechs concurrencent les banques, les moyens de paiement sont également bouleversés.
Les néobanques abandonnent les unes après les autres le statut d’établissement de paiement pour devenir de « vraies » banques. Elles étoffent leurs offres pour dépasser les services des banques traditionnelles et de leurs versions « en ligne ». Mais l’évolution de la technologie bouleverse également le secteur des moyens de paiement.
La carte bancaire résistera-t-elle ?
Si vous n’êtes pas encore passé au paiement par carte bancaire sans contact, peut-être les termes « carte bancaire biométrique » vous effraient-ils. Si c’est le cas, rassurez-vous, vous allez encore pouvoir utiliser une carte bancaire traditionnelle pendant quelques années. Sachez néanmoins qu’une nouvelle technologie est dans les tuyaux.
La carte sans contact biométrique, équipée d’un lecteur d’empreinte digitale, entrera en phase de test sur des clients « avertis » en 2018. Fabriquée par le Français Idemia (anciennement Oberthur Technologies-Morpho), elle permettra d’apporter plus de sécurité lors de la validation des paiements d’un montant élevé. L’utilisateur devra alors apposer un doigt sur le lecteur d’empreintes digitales de la carte ou directement sur son smartphone, si la carte y a été dématérialisée.
La carte bancaire à code crypto-dynamique me semble apporter une évolution tout aussi intéressante en matière de sécurité. Cette CB, lancée début 2017 par la Société Générale auprès de 200 000 clients, voit le traditionnel cryptogramme à trois chiffres remplacé par un écran affichant automatiquement chaque heure un nouveau code à trois chiffres. Dotée d’une durée de vie de trois ans, cette carte est une autre innovation signée Idemia.
Ces initiatives sont-elles révolutionnaires ? Rien n’est moins sûr puisqu’avec la dématérialisation, la carte bancaire pourrait bien voir ses jours comptés. La CB, prochaine victime de la révolution digitale ? Cela dépendra du comportement du public. Les Français, bien que détenant le record européen du nombre de transactions réalisées par chèques, se sont finalement convertis au paiement sans contact. Selon La Tribune, « le nombre de transactions est en croissance à trois chiffres et a doublé depuis un an. »
Transferts d’argent plus vite et plus facile… sauf chez les banques françaises !
J’ai déjà évoqué un progrès majeur qui devrait bientôt arriver dans la Zone euro, à savoir le paiement en temps réel (en 10 secondes, pour être exact) grâce à la mise en place du service TIPS (target instant payment settlement). Pour ce service, qui se limite aux règlements d’un montant inférieur à 15 000 €, la BCE facturera aux banques commerciales 0,002 € maximum par paiement.
Reste à savoir quelles enseignes proposeront ce service gratuitement… Les banques françaises ne semblent pas pressées d’intégrer cette innovation à leur offre, puisque seule la BPCE envisage de la proposer à ses clients en 2018. Pour les autres, ce sera 2019. C’est bien regrettable car les choses bougent beaucoup plus vite dans d’autres pays, notamment en Allemagne.
Ca l’est d’ailleurs d’autant plus que depuis début novembre, Facebook permet à ses utilisateurs français d’effectuer des paiements entre « amis » via Messenger.
Capital explique que grâce à cette fonctionnalité disponible depuis deux ans aux Etats-Unis, « il sera ainsi possible de rembourser facilement un ami, d’organiser une cagnotte pour un anniversaire ou de partager une addition. Pour utiliser le transfert d’argent, l’utilisateur n’aura qu’à rentrer une fois son numéro de carte bancaire. Ensuite, il validera les paiements grâce à un code, son empreinte digitale ou la reconnaissance faciale. »
Les transactions sont néanmoins plafonnées à 500 € et les utilisateurs ne pourront envoyer ou recevoir plus de 1 500 € par mois. Paper Geek précise que « le gros avantage du service comparativement aux concurrents comme PayPal est que les transactions sont gratuites, c’est-à-dire sans frais sous-jacents. » A terme, il s’agit de 1,3 milliard d’individus qui pourront facilement échanger de l’argent entre particuliers.
Visa et MasterCard ne sont pas fans des crypto-devises. Le PDG de MasterCard, fort de son impartialité, avait déclaré début octobre que les cryptos non-gouvernementales sont « des ordures ». En revanche, les deux géants de la carte bancaire ne crachent pas sur la blockchain. MasterCard et Visa ont annoncé respectivement en octobre et en novembre qu’ils travaillent à la création d’un système de paiement basé sur la blockchain.
Face à de telles évolutions, le « mandat cash« , le service de transfert d’espèces de La Banque Postale, apparaît bien poussiéreux. Il sera supprimé de l’offre de la banque en fin d’année, celle-ci souhaitant « privilégier le virement bancaire », selon Capital. Western Union, l’alternative la plus connue, est beaucoup plus onéreuse. Je n’ai pas encore étudié leurs offres, mais sachez qu’il existe d’autres solutions, comme Paysera ou Worldremit. Mais de toute façon – et vous le savez – le cash n’est plus vraiment au goût du jour en hauts lieux.
La fin du cash, c’est pour quand ?
En Suède, l’argent liquide ne compte plus que pour 1,4% des transactions. La Banque de Suède réfléchit très sérieusement au remplacement des espèces par une e-couronne. Elle se laisse jusqu’à fin 2019 pour se prononcer. C’est donc dans le premier pays à les avoir imprimées en Europe que les espèces pourraient disparaître. Le chèque, que la Riksbank avait inventé, est quant à lui quasiment abandonné depuis une vingtaine d’années par les Suédois.
La Chronique a abondamment parlé fin 2016 de la démonétisation des billets de 500 et 1 000 roupies par le gouvernement Modi en Inde, mais êtes-vous au courant de ce qui se passe en Corée du Sud et au Japon ?
Sur La Tribune, Delphine Cuny explique que « depuis avril, la banque centrale BOK a lancé une expérimentation afin d’atteindre l’objectif d’une ‘société sans pièces’ d’ici à 2020 : les magasins rendent désormais la monnaie aux clients en créditant une carte prépayée ».
Au Japon, où le cash représente 70% des paiements en valeur, « un consortium de banques travaille au lancement d’une monnaie nationale digitale convertible en yen, le J-Coin, avec le soutien de la Banque centrale, d’ici à 2020 […] ».
Mais vous vous enquérez sans doute plutôt de l’avenir des espèces en France. Voici ce que titrait La Tribune le 27 octobre 2017 :
Dans le détail, les propos d’Erick Lacourrège, directeur général chargé des services à l’économie et du réseau, et de la fabrication des billets, étaient les suivants :
« A la Banque de France, nous n’anticipons pas de disparition des espèces à horizon visible, c’est-à-dire à 10 ou 20 ans. Ceci dit, toute chose est mortelle et le cash finira par disparaître. La question est : quand ? […] En Zone euro, nous observons un paradoxe : les paiements électroniques sont à la mode et en plein essor, et dans le même temps, la demande de billets en euro a crû systématiquement de 7% par an en moyenne, même de 10% certaines années. C’est contre-intuitif ! Ce n’est pas un phénomène isolé : dans l’immense majorité des pays développés, la demande de billets est en croissance ou stable, mis à part dans quelques pays scandinaves, c’est-à-dire 30 à 40 millions d’habitants sur sept milliards dans le monde.«
En somme, si le cash doit disparaître à court terme en France, ce ne sera pas du fait des citoyens !