Le concept-même de monnaie physique semble de plus en plus menacé… et notre liberté de disposer d’une réserve de valeur fongible disparaîtrait en même temps.
L’avenir de la monnaie physique est menacé.
Chez nous, le premier coup de semonce fut sans doute l’abaissement du plafond des paiements en espèce pour les particuliers, brutalement passé de 3 000 € à 1 000 € en septembre 2015.
Il fut suivi l’année suivante par l’annonce de l’arrêt de la fabrication du billet de 500 €. Présenté comme inutile (alors qu’il représentait 27% de la valeur des espèces en circulation pour seulement 3% du nombre de billets), ce billet a fait l’objet d’une intense campagne de dénigrement en associant sa détention au crime organisé.
Désormais, c’est le billet de 200 € qui prend une réputation sulfureuse dans l’imaginaire collectif.
Petit à petit, c’est le concept-même de monnaie physique qui est remis en question. L’objectif des autorités est de rendre tous nos échanges d’argent dématérialisés et traçables. Après avoir favorisé les paiements par carte bancaire et les virements rapides entre particuliers, nos gouvernements voient dans les monnaies numériques l’arme ultime pour faire disparaître une fois pour toutes les espèces.
La tendance est d’ailleurs mondiale : dans une récente étude, la Banque des règlements internationaux (BRI) indiquait que neuf banques centrales sur dix travaillent sur les monnaies numériques.
Les monnaies numériques sous la coupe des Etats
Les récents soubresauts des stablecoins, ces jetons numériques qui proposent d’offrir les avantages des cryptomonnaies tout en garantissant leur valeur par rapport aux monnaies officielles, seront bien vite oubliés. Si le LUNA, qui se voulait être un dollar numérique, a vu sa valeur s’effondrer sans que ses gestionnaires ne puissent redresser la barre et restaurer la confiance, ce n’est pas parce que le concept de monnaie numérique est voué à l’échec. C’est au contraire la confirmation qu’elles ne sauraient voir le jour sans l’aval des Etats qui assureraient à la fois leur stabilité (en fixant les cours) et leur potentiel (en leur offrant leur utilité au quotidien).
Ces derniers temps, les preuves d’intérêt des gouvernements pour les monnaies numériques se multiplient. Même l’Europe, après avoir été à la traine face aux ambitions affichées de la Chine et des Etats-Unis, a dévoilé une première feuille de route vers la généralisation de l’argent dématérialisé.
Dans un contexte d’inflation forte, des euros numériques auraient pour avantage de permettre à nos dirigeants de piloter bien plus finement la masse monétaire et la vélocité de la monnaie. Fini le tabou des taux négatifs appliqués aux particuliers, qui se heurtait à la possibilité alternative de stocker chez soi des billets de banque pour protéger la valeur de son épargne. Finie la désagréable habitude des acteurs économiques qui ont l’audace d’épargner pour se protéger des inévitables hausses de la fiscalité. Finis les arbitrages individuels des acteurs économiques qui peuvent choisir entre dépenser pour le logement, la nourriture ou les loisirs. Terminées également les difficultés techniques lorsqu’il s’agit de confisquer les avoirs des individus jugés persona non grata.
La monnaie numérique est l’arme ultime de la centralisation. Et son arrivée et imminente.
Fabio Panetta, membre du directoire de la BCE, a récemment indiqué que la BCE pourrait donner le coup d’envoi de la version numérique de l’euro dès l’année prochaine. Durant son discours du 16 mai 2022 au National College of Ireland, il a déclaré que l’Europe « pourrait décider de lancer une phase de réalisation pour développer et tester les solutions techniques appropriées et les arrangements commerciaux nécessaires pour fournir un euro numérique ».
La phase préparatoire pourrait durer jusqu’à trois ans, à l’issue desquels la monnaie unique en version numérique pourrait être utilisée à grande échelle.
La Chine nous montre le futur de l’Euro numérique
A quoi ressemblerait un quotidien sous le signe d’une monnaie européenne numérique ? Cliquez ici pour lire la suite…
A quoi ressemblerait un quotidien sous le signe d’une monnaie européenne numérique ? Pour le savoir, pas besoin de sortir la boule de cristal : la Chine, qui s’est déjà engagé dans cette voie dès 2017 avec son e-yuan, nous permet d’anticiper la manière dont nos gouvernements utiliseront ce nouvel outil monétaire.
Le yuan numérique est en effet déjà prêt sur le plan technique, et a fait l’objet d’expérimentations grandeur nature dans une dizaine de villes. Proposé à plus d’une centaine de millions d’habitants, il a été utilisé pour distribuer des subventions publiques, régler des achats du quotidien auprès des commerces de proximité et même payer impôts et taxes depuis le début du mois de mai.
Dans un pays où le paiement par smartphone a rapidement remplacé les espèces, inciter les citoyens à opter pour le e-yuan plutôt que des portefeuilles numériques rattachés à des comptes en banque a été un jeu d’enfant. Il a suffi de proposer aux consommateurs des bons d’achats et des réductions sur leurs dépenses du quotidien pour les inciter à choisir ce nouveau mode de paiement.
Ce laboratoire à grande échelle des monnaies digitales préfigure de ce que pourrait être le futur euro numérique. Bien loin de devenir un « super-Bitcoin », qui aurait l’avantage d’être accepté partout tout en possédant une valeur stable, il sera vraisemblablement utilisé comme vecteur de pilotage de l’économie par les technocrates.
La blockchain est morte, vivent les monnaies virtuelles !
La monnaie numérique possède en effet deux avantages irremplaçables pour le pilotage étatique : elle est confiscable et potentiellement non-fongible. Du fait de son aspect numérique, il sera en effet possible pour les pouvoirs publics de rayer d’un trait de crayon les actifs possédés par les citoyens ou entreprises en disgrâce. Confisquer des billets de banque détenus à domicile ou dans un coffre de banque est un casse-tête juridique et pratique : annuler des cyber-euros sera un jeu d’enfant.
Par ailleurs, la monnaie numérique pourra être utilisée pour flécher les dépenses. Pour favoriser tel ou tel secteur d’activité, les pouvoirs publics pourront distribuer des euros destinés à être utilisés pour payer les achats de nourriture, les loisirs, le loyer, ou les investissements dans la transition énergétique. La monnaie cessera ainsi d’être un bien fongible où chaque euro est équivalent, pour devenir une juxtaposition de « bons d’achat » dont la répartition dépend du pouvoir politique en place.
Les monnaies numériques d’Etat sont, bien loin des projets libertaires qui ont présidé à la naissance du Bitcoin, un outil permettant une centralisation encore jamais vue de la monnaie et d’orientation du pouvoir d’achat.
Le salut viendra-t-il des monnaies numériques privées alternatives ? Pas si sûr, si l’on en croit les déboires des pionniers du secteur. Les doutes autour du Tether et le faux-départ de la Libra de Facebook montrent que les acteurs privés qui souhaitent créer et diffuser des monnaies numériques indépendantes sont livrés à eux-mêmes. Ils ne reçoivent aucune aide des instances étatiques et les politiques se félicitent même de leurs déboires.
Fabio Panetta indiquait ainsi, dans son discours, qu’il était à son avis « illusoire de croire que des instruments privés peuvent faire office de monnaie lorsqu’ils ne peuvent pas être convertis en monnaie publique à tout moment » – l’occasion de rappeler que notre système monétaire fondé sur le centralisme ne souhaite pas s’ouvrir à la concurrence de la société civile.
Le salut aurait pu venir des GAFAM, qui travaillent pour leurs intérêts propres et non pour les pouvoirs en place, et qui possèdent une force de frappe suffisante pour apporter leur crédit à une crypto-monnaie alternative. C’est justement ce qu’avait tenté de faire Facebook avec sa monnaie Libra, dont le cours aurait été stabilisé par rapport aux grandes devises mondiales. Abandonnée du fait des menaces des régulateurs, elle revient sous forme de projet d’un nouveau jeton numérique… cette fois-ci totalement centralisé, sans utiliser la Blockchain.
La cryptomonnaie, si belle dans son principe, n’aura pas survécu à la volonté des pouvoirs publics de préserver leur privilège de battre monnaie et leur tentation de piloter l’économie. Sans même avoir eu l’occasion de faire partie de notre quotidien, elle aura simplement ouvert la voie aux monnaies numériques centralisées. Une chose est sure : l’avenir de l’argent-papier est de plus en plus compromis.
Entre les citoyens qui préfèrent l’aspect pratique des paiements numériques, les consommateurs qui répondent toujours présent pour de l’argent gratuit, et des autorités qui voient dans ces futurs canaux de paiement une manière inédite d’asseoir leur pouvoir, les défenseurs des devises sonnantes et trébuchantes sont plus rares que jamais.
Savourons, tant qu’elle existe encore, notre liberté de disposer d’une réserve de valeur fongible, anonyme et intraçable sous forme de pièces et billets de banque. Elle ne survivra pas à l’arrivée des espèces numériques.
12 commentaires
Les Allemands, qui sont très attachés aux espèces, n’accepteront jamais d’y renoncer. Ce ne sont pas les seuls.
Or, il faudrait l »unanimité au sein de l’UE.
Donc, tant que l’Euro sera la monnaie unique au sein de l’UE, ce projet semble impossible à réaliser et à faire accepter par les opinions publiques.
Bonjour Etienne Henri,
j’ai bien lu votre rubrique sur la « fin des espèces sonnantes et trébuchantes » mais autant je suis en accord avec vos écrits, lorsque vous abordez l’aspect liberticide de la monnaie numérique d’état, autant je ne pense pas et avec conviction que cela détruise la cryptomonnaie, bien au contraire.
A chaque médaille, il y a un revers et les gouvernements qui tenteront d’asseoir sur leurs pays, une certaine forme de dictature par la suppression progressive de parts de liberté, ça et là, trouveront toujours en face d’eux des dissidents. Ces individus progresseront en nombre, au fur et à mesure que l’oppression croitra. La dernière mascarade du virus covid 19, nous a prouvé qu’une réaction, certes lente et tardive, c’est faite sentir et qu’un changement d’état d’esprit et de méfiance à l’égard des autorités est en train de s’étendre de plus en plus, en raison des diverses études scientifiques réalisées par une catégorie encore honnête de spécialistes mettant en exergue les manquements, les mensonges et la cupidité des laboratoires, du corps médical et des gouvernements dont celui de Macron, chef de file de ce génocide en cours et à venir. Cette méfiance s’étendra, sans nul doute sur tous les sujets et toutes les problématique qui surgiront désormais, la monnaie étant le fer de lance de l’économie mondiale. Les espèces disparaitront mais rassurez vous, elles seront remplacées et qui plus est, par la cryptomonnaie dont la substance de base représente la liberté, l’égalité et la chance à tous. Quand bien même, les autorités parviendront à mettre la majorité des moutons à leurs bottes, n’oubliez tout de même pas que les révolutions sont toujours orchestrées et réalisées par des minorités. Un homme à conviction vaut au moins dix moutons. Je suis un convaincu que les états commettent une grave erreur en cherchant à nous zombifier et ce sera leur seule et plus grande erreur.
Excellente journée.
Encore faut-il que nous parvenions à le leur faire comprendre si toutefois la majorité reprend le contrôle de son cerveau, nous ignorons si c’est le cas ou pas ou si « c’est aujourd’hui peut-être ou alors demain » à moins que ce soit « après moi le déluge ».
Seules les générations les plus anciennes ayant connu les espèces pourraient se rendre compte de la supercherie : or, qu’ont-elles fait dans l’affaire du Covid ?
Elles se sont faites piquousés en masse, bien enfumées par le système politico-médiatique, avec les résultats que l’on sait..
Et on revoté pour les mêmes qui les entubent.
Il n’y aura donc pas de réveil.
Les jeunes générations, biberonnées au paiement virtuel n’y verront, elles aussi, que du feu.
Seuls ceux situés entre les deux, c’est à dire les enfants de boomers ‘et encore…), et qui vivront encore pas mal de temps ont, pour certains, conscience de la tragédie qui est en train de se jouer.
Reste ceux qui viennent d’ailleurs : je pense aussi qu’ils accepteront le deal, car venant de pays où il n’y a rien, où il est difficile de vivre.
Entre plus rien et un petit peu, leur choix sera vite fait.
À JEAN-PHILIPPE BOURGEON 25 mai 2022 – 12 h 47 min
Les allemands sont comme tous les autres en Europe : un peuple vieillissant remplacé par une multitude d’autres.
Ils subiront le même sort.
Une seule action s’impose: payer en espèces tout ce que vous pouvez; n’utilisez la carte que pour payer à distance, mais PAS dans les magasins. Si tout le monde fait cela, je ne vois pas comment ils pourraient supprimer le cash.
Le cash sera supprimé « Parce que c’est leur projet … »
De pouvoir taxer à volonté
De pouvoir tracer chaque centime
Et si vous n’obéissez pas, votre Pass monétaire sera supprimé.
Il va falloir entrer) en résistance et trouver des alternatives
En effet, les cryptomonnaies semblent une bonne affaire pour les tyrans assoiffés de pouvoir.
Mais elles dépendent beaucoup de l’énergie électrique nécessaire pour faire fonctionner les serveurs et autres équipements informatiques constituant leur infrastructure matérielle.
Que se passerait-il si d’aventure un cataclysme naturel (ex.: tremblement de terre, tsunami ou éruption solaire) ou un acte de sabotage (ex.: cyberattaque, acte terroriste) détruisait cette infrastructure?
Comment pourrait-on se procurer les biens essentiels dans un pareil environnement désormais dépourvu de billets de banque et de pièces de monnaie?
La privation d’énergie est une solution possible que j’envisage pour contrer cette horreur technologique.
Et encore, pas sûr que nos chers gouvernants du monde dit « libre » (ha ! ha ! ha !) n’aient pas des accords croisés pour se fournir de l’énergie les uns aux autres.
Poutine ne jouerait-il pas un rôle dans tout ceci ?
J’avoue que je ne comprends pas en quoi une « monnaie numérique » sera différente de ce que nous utilisons déjà : des lignes de compte en banque, des virements, des cartes de paiement, etc. Tout ça est déjà numérique ! Quelle difference ? Je vais même plus loin …. quelle difference avec des papiers ou des jetons en laiton qui n’ont aucune valeur intrinsèque ? Je ne vois aucune révolution la dedans. Depuis l’abandon de l’or, la monnaie est aux mains des pouvoirs publics. Cela fait donc bien longtemps … plus d’un siècle, et ça avait commencé en 1789.
Seule alternative : la monnaie libre. C’est hallucinant ce qui se fait déjà dans cette monnaie. C’est un monde parallèle hors système et incontrôlable par les pouvoirs, basé sur les rapports humains. Ah c’est sûr il ne faut pas rêver d’être milliardaire… mais juste d’être libre. Et certains y arrivent déjà parfaitement. Cf la june
Bonjour à toutes et à tous,
Vous n’êtes pas aller assez loin dans votre démonstration, me semble t-il ?
Qui crée et gère les monnaies des états, hors les 15% environ réalisées par les banques centrales ?
Les banques commerciales !
Posez-vous la question : « A qui profite le Crime ? »
Vous aurez la Solution Citoyenne, pour que l’argent serve réellement les Peuples et les Nations.
La Question de fond et de fonds est de savoir, quel système financier et monétaire, voulons-nous ?
Un système d’esclavage systémique ou un système de Libertés retrouvées ?
le changement est inéluctable, même si on est contre, le Grand Maître Numérique a pris le contrôle de nos vie avec l’apparition du tout connecté il y a maintenant une bonne vingtaine d’années, tous les supports existants sont numérisés ce qui très inquiètant en terme de gestion de l’énergie, par exemple mais le » c’était mieux avant » est inconcevable ry même dans l’absolue comment revenir sur ce mode vie actuel ? une fois nos anciens disparus qui s’apercevra de quelque chose ?