Récapitulons : les campagnes de communication ministérielles vous ont permis de devenir le partenaire idéal et, grâce aux conseils avisés de Marlène Schiappa, votre couple se porte à merveille depuis que vous avez instauré des quotas de tâches ménagères au sein de votre foyer.
L’avenir s’annonce radieux et vous décidez de fonder une famille, que vous allez devoir élever conjointement avec l’Etat.
Les enfants n’appartiennent ni à l’Etat… ni aux parents !
Le 5 avril 2013, alors qu’elle n’était encore que vice-présidente du Conseil régional de Picardie, Laurence Rossignol avait déclaré dans l’émission Ce soir ou jamais que « les enfants n’appartiennent pas à leurs parents », propos qui avaient fait l’objet d’une vive polémique.
Alors que La Manif pour Tous s’opposait à la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, les propos de Laurence Rossignol avaient été déformés pour aboutir à cette assertion – que celle qui allait devenir secrétaire d’Etat chargée de la Famille, des Personnes âgées, de l’Autonomie et de l’Enfance, puis Ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes, n’a pourtant jamais prononcée : « Les enfants n’appartiennent pas à leurs parents, ils appartiennent à l’Etat. »
Vos yeux se sont-ils écarquillés à la lecture des propos de Laurence Rossignol (les vrais) ? Quand on prend le temps d’y réfléchir, il n’y a vraiment pas de raison à cela.
La patria potestas (pouvoir paternel) s’étant éteinte en droit français au XIXème siècle, les enfants ne sont plus juridiquement la propriété de leur père, et Laurence Rossignol n’a finalement rien dit que de très banal.
Cela ne signifie pas pour autant que l’Etat ne cherche pas à s’immiscer dans les moindres aspects de l’éducation que les familles de France donnent à leurs bambins. Et lorsqu’il s’agit de resserrer le carcan étatique autour des enfants, on retrouve bien sûr Emmanuel Macron au premier rang.
L’Etat-nounou pour les moins de trois ans
Ainsi le président a-t-il cru bon d’annoncer le 19 septembre la création d’un nouveau bidule pour parents inquiets. Ces derniers, à en croire Emmanuel Macron, auraient besoin d’être rassurés par un nouveau service de l’Etat-nounou.
A lecture de cette déclaration, au moins deux questions se posent.
La première, c’est la pertinence de cette commission d’experts alors qu’existe depuis 2016 un Conseil national de la protection de l’enfance (CNPE) placé auprès du Premier ministre…
La seconde, c’est évidemment la légitimité du bulldozer étatique qui continue d’aplanir toutes les disparités susceptibles d’émerger de nos choix individuels. Pas un cheveu ne doit dépasser dans notre société solidaire et égalitaire.
Or, on a bien sûr le droit de penser que les services de l’Etat sont les endroits les plus indiqués pour l’instruction des enfants ; mais on a également le droit de penser le contraire.
Pourtant, comme l’écrit le blogueur H16 :
« Pour [Emmanuel Macron], c’est clair : il faut absolument agir le plus tôt possible, avant même la naissance et dès la conception s’il le faut, pour enfin donner à tous les mêmes chances, c’est-à-dire les mêmes probabilités d’être consciencieusement broyés dans l’un ou l’autre rouage idiot d’une administration aveugle et impitoyable. »
L’Etat-nounou pour les plus de 3 ans
Vous trouvez que les propos d’H16 sont exagérés ? Certaines déclarations d’Emmanuel Macron en matière d’instruction sont pourtant caractéristiques de son étatisme forcené.
Vous ne voyez pas le problème ? Le voilà : le président a une fâcheuse tendance à oublier que l’école de Jules Ferry n’est pas la seule sur le marché, et que jusqu’à preuve du contraire, les parents ont encore le choix d’instruire ou de faire instruire leur progéniture à domicile, une liberté qui se justifie pour de multiples raisons (la première d’entre elles étant la souffrance scolaire).
Merci à Daniel Tourre de l’avoir rappelé.
Non content d’entretenir le quasi-monopole de l’Education nationale sur son territoire, l’Etat français souhaite par ailleurs influencer l’éducation que vous donnez à vos enfants à la maison…
Quand l’Etat lutte contre les « biais de genre »
A ce sujet, la dernière brillante idée en date consiste à lutter contre les stéréotypes masculins et féminins dans le domaine des jouets. C’est fois-ci, pas de commission mais une charte qui va concerner la filière en question, et ce du fabriquant au vendeur.
Adrien Taquet, secrétaire d’Etat chargé de la protection de l’enfance, a expliqué ce qui motive la démarche du gouvernement :
« On se rend compte que dans les métiers scientifiques, les métiers de l’industrie, les femmes sont sous-représentées : à peine 30%. De la même façon, très peu de jeunes filles s’orientent vers les études scientifiques. On est absolument convaincus qu’il y a une espèce de biais de genre dès la plus tendre enfance. »
On a cependant le droit de douter de l’intime conviction d’Adrien Taquet – car une fois de plus, le gouvernement est dans l’annonce marketing et non dans l’action politique, puisqu’une énième charte purement incitative, sans caractère obligatoire, va bientôt être mise en place.
On comprend sans mal que le gouvernement ne veuille pas aller plus loin. Voyez-vous, le problème, c’est que le constat selon lequel les garçons se dirigent généralement plus souvent vers les sciences que ce n’est le cas des filles tend à se vérifier indépendamment des sociétés et des périodes de l’histoire.
Le gouvernement Philippe n’est d’ailleurs pas le premier à vouloir lutter contre les « biais de genre » ; d’autres s’y sont attelés avant lui. Or le résultat qui a suivi ces expériences sociales est le même : plus une société est neutre sur le plan du genre, plus les femmes délaissent les carrières scientifiques. Caramba, encore un projet constructiviste de raté !
« Un paradoxe en matière d’égalité des sexes » : les pays où l’égalité entre les sexes est plus élevée comptent moins de femmes diplômées en STEM [NDLR : science, technologie, ingénierie et mathématiques]
En 2018, des chercheurs de l’université Leeds Beckett et de l’université du Missouri ont ainsi découvert que « des pays comme l’Albanie et l’Algérie comptent un plus grand nombre de femmes parmi leurs diplômés en STEM que des pays vantés pour leur niveau élevé d’égalité entre les sexes, comme la Finlande, la Norvège et la Suède », résume TheJournal.ie.
Peut-être bien que tout compte fait, les garçons et les filles ont globalement des aspirations différentes, et que leurs parents restent les mieux placés pour choisir comment équiper leur coffre à jouet…
Samedi prochain, vous verrons que les immixtions de nos politiciens dépassent parfois le cadre du simple jouet. Certains de nos hommes politiques ne cachent pas en effet avoir pour objectif de « construire un peuple », rien que ça !