▪ Quiconque a dit "les contraires s’attirent" ne savait pas de quoi il parlait… ou peut-être que si, mais il n’a pas donné de détails.
Le monde qui nous entoure nous donne de nombreuses preuves que les contraires s’attirent bel et bien… mais pas toujours pour un résultat positif. Parfois les contraires s’attirent comme la gravité attire un avion de ligne en mauvais état vers le sol… ou comme un mulot attire un serpent à sonnettes… ou comme des pieds nus attirent un clou rouillé… ou comme un bar attire un alcoolique… ou comme des tricheries comptables attirent un investisseur crédule.
Lorsqu’on triche avec la comptabilité, on transforme de tristes vérités en histoires et statistiques heureuses. Et personne n’aime autant les belles histoires qu’un investisseur crédule. Si ce n’était pas le cas, cher lecteur, Wall Street serait encore une petite rue inconnue dans le sud de Manhattan. Au lieu de quoi Wall Street s’est enrichi en transformant les tristes vérités en belles histoires le plus souvent possible.
En général, Wall Street ne ment pas ; elle ne dit pas la vérité, c’est tout. Les tromperies qui en résultent font souffrir les clients de crises d’hallucinations à des moments inappropriés. Parfois les clients prennent l’apogée d’un marché haussier pour une "opportunité pleine de potentiel" ; parfois ils prennent un communiqué de résultats frauduleux pour une "magnifique valeur de croissance".
Ces erreurs d’investissement classiques ne sont pas entièrement de la faute de Wall Street. Mais derrière chaque grosse erreur d’investissement, vous trouverez généralement au moins un joli rapport de recherches bien arrangé. La machine de Wall Street sait comment raconter le genre d’histoires heureuses qui va attirer les ordres d’achat des investisseurs crédules. Et ils continuent à raconter ces histoires parce que les investisseurs crédules continuent à y croire.
▪ Vous vous souvenez d’Enron ? Ça a été une belle histoire pendant des années… tout comme Worldcom… et AIG… et Fannie Mae… et Lehman Bros. Mais ces entreprises avaient toutes des tristes vérités dans leurs déclarations financières, bien avant que la catastrophe ne frappe le cours de leurs actions. Une poignée de vendeurs à découvert perspicaces a gagné un peu d’argent quand ces actions se sont effondrées, mais les investisseurs crédules ont tout perdu… ou presque.
Les tromperies comptables prennent des formes différentes, mais elles produisent toujours le même résultat : la tromperie.
▪ N’oubliez pas que nous ne parlons pas de mensonges ; nous parlons du fait de ne pas dire la vérité. Mentir est généralement illégal ; mais ne pas dire la vérité n’est pas illégal. Jetons un oeil à une tromperie qui se produit juste sous notre nez en ce moment même : beaucoup de banques américaines annoncent une baisse des prêts non-productifs. C’est en général un signe annonçant une amélioration des conditions de crédit.
Mais en ce moment, la chute des prêts non-productifs a plus à voir avec les jeux comptables qu’avec la qualité du crédit. Certaines banques utilisent tous les mécanismes comptables de leurs boîtes à outils pour déplacer les mauvais prêts dans une catégorie — n’importe quelle catégorie — qui ne soit pas les prêts non-productifs.
Les esprits affûtés de M3 Funds, une entreprise de gestion des investissements spécialisée dans les valeurs bancaires, nous fournit une observation inquiétante :
"Le plus gros de l’enthousiasme dans le secteur bancaire est basé sur la perception de signes d’un renversement dans le cycle du crédit. Cependant, dans la plupart des cas, l’amélioration de la qualité du crédit est le résultat de modifications de prêt, une tactique financière habile qui n’améliore la qualité du crédit que de façon superficielle, et seulement à court terme".
"Un prêt modifié apparaît quand une banque prend un prêt existant sur son bilan (souvent un qui ne rapporte plus) et en modifie les termes pour que l’emprunteur ne soit pas en défaut de paiement. Les modifications prennent généralement la forme d’une extension, d’un taux d’intérêt temporairement sous le niveau du marché, ou d’une période de grâce sur le remboursement des intérêts. Cela aide les banques à retarder la saisie, mais ça ne fait que repousser le problème à plus tard. Au cours des cycles précédents, le taux de nouveau défaut de paiement des prêts modifiés était de plus de 50%. Malgré un taux aussi élevé d’échec, les banques utilisent les modifications en partie parce qu’elles améliorent immédiatement le crédit, puisque la plupart des institutions ne considèrent pas un prêt modifié comme non productif".
"Cette pratique n’a jamais été plus évidente que dans les banques régionales… SunTrust Banks (STI) a annoncé une baisse de 2,5% des prêts non-productifs (PNP) pour le quatrième trimestre, et de nombreux analystes n’ont pas tardé à considérer ce deuxième trimestre consécutif d’amélioration comme un signe de changement dans le cycle du crédit. Mais n’oubliez pas que, pendant les deux derniers trimestres, les PNP ont baissé de 101 millions de dollars, mais les prêts modifiés ont augmenté de 716 millions ! Pourtant, les actions de STI ont augmenté de 20% en janvier, malgré une perte de 245 millions de dollars pour le trimestre. TCF Financial (TCB) et Zions Bancorp (ZION) ont montré des tendances identiques : des augmentations modestes dans les PNP ainsi qu’une augmentation importante des modifications de prêts".
"Avec le développement de tendances négatives dans la qualité des prêts commerciaux, et des modifications de prêt utilisées pour un soutien temporaire, nous pensons que le secteur bancaire va devoir faire face à des pertes de crédit importantes dans les années à venir"…
N’attendez pas la cohue ; vendez les valeurs bancaires maintenant.