▪ Sur quoi s’appuie une devise, de nos jours ? Qui est l’Atlas du marché obligataire ?
Les banques centrales.
Comment en arrive-t-on là ?
Les crises. Les débats. Puis… la politique.
"C’est ce qui arrive quand on maintient les taux d’intérêt trop bas pendant trop longtemps", déclare Michael Shaoul, PDG de Marketfield Asset Management sur Bloomberg. "Ce qu’on obtient, c’est une tendance à surinvestir dans certains secteurs de l’économie. Pour moi, le pétrole est le fer de lance d’un boom de surinvestissement".
"Le consensus au sein de la Fed commence à s’effriter. Ils organisent désormais leurs politiques pour le marché obligataire, plutôt que pour l’économie".
"La Fed veut l’inflation", a déclaré notre collègue Jim Rickards, rédacteur en chef d’Intelligence Stratégique. "Il ne s’agit pas d’une révélation foudroyante — la Fed l’a déjà clairement affirmé".
"Combien de fois avez-vous entendu la Fed dire", continue Jim, "’l’objectif pour l’inflation est de 2%’ ? Eh bien, s’ils veulent l’inflation mais que c’est la déflation qui se produit, que faut-il en conclure pour leurs politiques ? Difficile de voir comment augmenter les taux d’intérêt. En quoi augmenter les taux va-t-il leur obtenir de l’inflation ? C’est le contraire qui se produit.
Ils parlent de faire grimper les taux d’intérêt. Il y a un article dans le Wall Street Journal signé Jon Hilsenrath. Dedans, la Fed essayait clairement de signaler qu’ils vont augmenter les taux en 2015. Leur manière de faire est idiote. Ils jouent sur les mots, d’une manière qui, en substance, ne signifie rien du tout. Pour l’instant, ils disent qu’ils ne vont pas augmenter les taux avant ‘une période considérable’, ce qui est interprété comme six mois, voire plus longtemps. Ils envisagent d’abandonner cette formule pour lui préférer la phrase ‘nous promettons d’être patients’. Vous allez donc beaucoup entendre parler du mot ‘patient’ dans les prochains jours.
C’est censé vouloir dire ‘moins qu’une période considérable’… Enfin, on dirait des hiéroglyphes, c’est le genre de choses insensées qu’on doit faire quand la Fed manipule tous les marchés du monde.
J’ai parlé à beaucoup de gouverneurs et présidents de la Fed, et je vous promets qu’ils ne savent pas ce qu’ils font. Il ne s’agit pas d’être désinvolte ou insultant. On m’a dit, en coulisses, qu’ils ne savent pas ce qui font".
L’avantage d’avoir un collègue qui connaît des gouverneurs de la Fed et autres ronds-de-cuir gouvernementaux… c’est que nous pouvons prévoir quand les problèmes arrivent. Surtout lorsque le but est de "gérer" la devise de réserve mondiale — la devise que des pays comme la Chine, le Venezuela et l’Iran utilisent encore comme réserve de valeur.
Mais revenons-en à ce qui nous occupe :
"Vous allez voir un grand changement dans la composition du FOMC de la Réserve fédérale, qui fixe les taux d’intérêt en janvier. Pour l’instant, on a deux ‘super-faucons’ — Richard Fisher, le président de la Fed de Dallas, et Charles Plosser, président de la Fed de Philadelphie. Ce sont des membres électeurs du FOMC.
Toutes les réunions de la Fed ne se ressemblent pas. La Fed ne se réunit que huit fois par an, mais seules quatre de ces huit réunions sont suivies de conférences de presse durant lesquelles Janet Yellen lit une déclaration et répond aux questions.
Généralement, quand ils font un changement de politique, ils le font lors des réunions avec conférence de presse parce qu’ils peuvent s’expliquer un peu. La réunion de la semaine prochaine a une conférence de presse. Une autre réunion est prévue en janvier — sans rien. Il n’y a pas de réunion en février — la suivante est en mars, avec une conférence de presse. Si l’on réfléchit en termes de calendrier, s’ils veulent changer de politique, ce doit être soit la semaine prochaine… soit mars prochain".
Mars, c’est dans longtemps… du moins en ce qui concerne les marchés.
"Cela ressemble à la Kremlinologie", continue Jim. "Durant la Guerre froide, nous regardions les photos des dirigeants soviétiques sur la tombe de Lénine. On comptait le nombre de places entre une personne et le Chef suprême pour savoir si la personne en question était en grâce ou non. Tout ce qu’on avait, c’était une photo en noir et blanc ; on ne savait pas vraiment ce qui se disait.
Malheureusement, les compétences en Kremlinologie sont utiles pour essayer de comprendre la Fed. L’essentiel étant que je pense que c’est la dernière charge des faucons.
J’ai récemment parlé à Fisher en privé. Il m’a dit : ‘ils vont augmenter augmenter augmenter et ils ne feront jamais de QE4 tant que je suis là’. A quoi j’ai répondu : ‘mais président Fisher, vous ne serez pas là. Vous partez en décembre’. Il m’a regardé en riant et a dit : ‘oui, vous avez raison’."
Qu’est-ce que tout cela signifie pour vous, moi et nos investissements ?
Nous essaierons de répondre avec une anecdote. Lorsque nous parlions à Paul Volcker durant le tournage de notre documentaire, I.O.U.S.A, il nous a fait visiter son bureau. Sur le mur dans un couloir se trouvaient des caricatures de M. Volcker fermant le robinet monétaire.
Volcker a été nommé à la Fed par Carter, à l’origine, puis a été soutenu par Reagan. Lorsque nous lui avons posé des questions sur l’inflation galopante à laquelle il avait été confronté au début des années 80, il a déclaré que le marché l’avait contraint à augmenter les taux. Il devait offrir des intérêts plus élevés sur les bons du Trésor afin de financer les opérations du gouvernement.
"Lorsque l’inflation s’installe", nous a dit Paul Volcker, "elle est très difficile à arrêter".
Pour l’instant, les taux sont bas parce que le gouvernement américain inspire encore la confiance. C’est la déflation qui inquiète la Fed. Que se passera-t-il quand cette confiance s’affaiblira, comme cela a déjà été le cas ?
Les bons du Trésor US seront laminés… il en ira de même pour les obligations d’entreprises US… et pour le dollar. Tout actif que vous aurez en portefeuille et qui est valorisé en billets verts, eh bien… faites le calcul.
Meilleures salutations,
Addison Wiggin
Pour la Chronique Agora