Les risques se rapprochent – des périphéries vers le centre – à mesure que la dette gonfle et fragilise l’ensemble du système.
Continuons l’exploration de la dette entamée hier – avec un extrait du rapport de la Banque des règlements internationaux « Statistiques bancaires internationales de la BRI à la fin du mois de juin 2019 » :
« Les prêts aux [institutions financières non bancaires] (IFNB) continuent de pousser la croissance des créances transfrontalières :
Les statistiques bancaires de la BRI montrent que les créances bancaires transfrontalières ont augmenté de 365 Mds$ au deuxième trimestre 2019, pour atteindre 31 000 Mds$ à la fin juin.
Leur taux de croissance annuel, qui avoisinait 0% en moyenne depuis la grande crise financière, a atteint un sommet de 6% après la crise […]. La croissance des prêts à tous les principaux secteurs a augmenté. Les créances sur les institutions financières non bancaires ont continué à progresser le plus rapidement (13% sur un an).
Les créances bancaires transfrontalières mondiales, c’est-à-dire les prêts, ont bondi de 1 735 Mds$ au premier semestre, soit la plus forte croissance sur six mois depuis le quatrième trimestre de l’année 2007, avant la crise.
Cela se compare à une croissance de 324 Mds$ au premier semestre 2018 et de 341 Mds$ en 2017.
En deux ans, les créances bancaires transfrontalières ont augmenté de 2 520 Mds$, soit de 9%, pour atteindre 3 098 Mds$. La croissance de 13% des prêts accordés aux institutions financières non-bancaires au deuxième trimestre est la plus forte des cinq dernières années. »
Les banques centrales à la manœuvre
Il est clair que les îles Caïman, le Royaume-Uni et le Luxembourg sont des sources majeures de financement bon marché pour la communauté mondiale de spéculateurs à effet de levier.
Mais la communauté spéculative se finance également ailleurs ! Je me demande combien de financements spéculatifs ont été accordés au cours de ce cycle par des centres financiers tels que Hong Kong et Singapour – financements qui ont ensuite été dirigés vers les instruments de crédit chinois à rendement élevé.
En 2007, c’était le logement et l’hypothécaire américain qui étaient subprime, douteux. En 2019, c’est plus de la moitié du crédit aux entreprises mondiales et tout le crédit chinois qui sont douteux !
La pyramide tient parce que les banques centrales sont à la manœuvre, elles écopent, elles bouchent les trous aussi bien aux Etats-Unis qu’en Chine, on le voit clairement.
Une chose cependant n’est pas encore perçue : le fait que le crédit accordé par les banques centrales est un crédit comme un autre.
C’est une illusion de croire qu’une banque, parce qu’elle est centrale, ou qu’un gouvernement sont hors du jeu : ce sont des agents économiques et financiers comme les autres – exactement comme les autres.
Si on ne le voit pas, c’est parce, dans l’esprit du public, ces institutions ont hérité de quelque chose de l’ancien temps, du temps du sacré.
La Chine est le maillon faible de la grande bulle mondiale du crédit. Et si la Chine est le maillon faible, toute l’Asie l’est également car elle prête en levier à la Chine… et si toute l’Asie est un maillon faible, toutes les places offshore le sont aussi !
Et si… et si… les banques centrales aussi sont le maillon faible car tous les risques remontent en ce moment à elles !
Le mouvement que j’ai décrit par une anticipation visionnaire dès 2009 – le mouvement de remontée des risques des périphéries vers le centre – ce mouvement s’est engagé fin 2018 quand Jerome Powell a paniqué.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]