Comme nous l’avons vu vendredi, un arrimage du taux de change signifie que la monnaie arrimée monte et baisse avec la devise maîtresse. Lorsque le dollar a grimpé, il a entraîné avec lui le yuan, rendant les exportations chinoises plus chères. Etant donné la stagnation de l’économie chinoise liée à la bulle de la dette, la dernière chose que les autorités chinoises voulaient voir était une baisse de leurs exportations.
Avec la hausse du dollar, la pression pour dévaluer le yuan a également augmenté. Si vous pensez que votre monnaie est sur le point de perdre 20% de sa valeur à cause d’une dévaluation, que pouvez-vous faire pour protéger votre richesse ? Désengager votre argent de son lien à la monnaie qui est en train d’être dévaluée pour le lier à une monnaie qui se renforce.
La fuite des capitaux n’est pas le signe d’une économie florissante |
Rien que la possibilité d’une dévaluation du yuan a déclenché une fuite sans précédent de capitaux hors de Chine vers les dollars américains et vers des actifs comme des maisons en Colombie-Britannique et des châteaux en France. La fuite des capitaux n’est pas le signe d’une économie florissante ni une preuve que les classes riches font confiance à la monnaie ou à l’économie.
Dernièrement, la Chine est allée à petits pas pour dévaluer le yuan : pas assez pour déclencher une panique mondiale mais plus qu’assez pour déclencher une fuite des capitaux et un malaise profond.
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Résultat : la Chine a désespérément besoin d’un dollar plus faible, car un dollar plus faible affaiblira le yuan et soulagera la pression sur les exportations chinoises et les exigences de dévaluation.
Beaucoup d’observateurs sagaces ont conclu que la récente réunion du G20 à Shanghai a abouti à un accord informel pour affaiblir le dollar afin de consolider les fondations chancelantes de l’économie mondiale — plus précisément pour soulager la pression qui pèse sur le yuan chinois et menace de déstabiliser l’économie mondiale chancelante.
Faiblesse et conséquences
A présent le monde doit faire face aux conséquences d’un dollar américain affaibli : une crise déclenchée par un yen plus fort. Le dollar américain joue depuis un an au yo-yo au sein d’un intervalle de taux de change, car la Réserve fédérale oscille entre des déclarations bellicistes de hausse des taux (ce qui rend le dollar américain plus attractif et donc plus fort) et des rétropédalages consensuels (jamais nous ne hausserons les taux), ce qui fait alors baisser le dollar.
Pas étonnant que la Fed hésite : elle ne peut plaire à la fois au Japon et à la Chine. Si le dollar s’effondre, la Chine est ravie mais le Japon entre en crise. Si le dollar continue son ascension, le Japon est « sauvé » mais la Chine sera obligée de dévaluer le yuan ou de voir ses exportations décliner.
Aucune nation ni aucun empire n’a jamais dominé ni même prospéré via la dévaluation |
Comme je le fais souvent remarquer, aucune nation ni aucun empire n’a jamais dominé ni même prospéré via la dévaluation. En fait, la dévaluation d’une monnaie est le baiser de la mort. Tout le monde sait très vite que votre monnaie est une balle qui peut rapidement se dégonfler voire se ratatiner.
Ce que j’en pense ? Le Japon n’a pas le choix. En revanche, la Chine peut dévaluer le yuan à mesure que le dollar se renforce. En effet, il serait justifié que la Chine dévalue le yuan comme ajustement pratique aux nouvelles réalités mondiales.
La Fed est face à un choix difficile et le gong final est déjà annoncé. Elle peut soit casser l’accord de Shanghaiinformel pour renforcer le dollar afin de sauver le Japon de la lente catastrophe d’un yen en hausse ; soit elle peut laisser le dollar s’affaiblir encore plus pour apaiser la Chine et les économies dépendantes des matières premières.
Ce qu’elle ne peut pas faire, c’est plaire à tout le monde. C’est là la conséquence inévitable lorsqu’on manipule les marchés : on finit par ne plus plaire à personne parce qu’une constante manipulation a créé des carry trades insoutenables et des paris spéculatifs.
Le marché des changes est sur le point d’exploser à la face de la Fed et elle ne pourra rien faire contre cela. Ce dont les banques centrales ont le plus peur, ce sont des marchés qui ne sont pas étroitement contrôlés par les banques centrales. Les banques centrales du monde entier sont sur le point de devoir faire face aux conséquences de sept longues années de manipulations incessantes.