En début d’année, je parlais à mes lecteurs des banques américaines qui faisaient, ou allaient faire, faillite. J’avais avancé le chiffre — qui semblait alors faramineux — de 150 faillites d’ici la fin de la crise. J’avais alors reçu de nombreux courriers de lecteurs relevant ma position, jugée trop pessimiste quant au sort de la finance mondiale.
En fait, en 2007, nous n’avons eu que trois petites faillites. En 2008, il y a eu très exactement 25 faillites aux Etats-Unis, chiffre qui reste supportable dans le contexte que l’on a connu — surtout si l’on a la chance de ne pas en être actionnaire.
Non, les banques ne sont pas sans risque !
Mais les choses se sont accélérées cette année. Et avec les trois nouvelles faillites annoncées ces derniers jours, nous en sommes à 98 faillites pour 2009.
Faisons donc le calcul — je demande à ma fille de faire l’addition pour vérifier ses facultés d’adaptation à la crise et à l’arithmétique, qui lui pose quelques problèmes. Mais oui, elle y arrive de mieux en mieux : l’espoir d’une future carrière politique s’éloigne au fur et à mesure de ses progrès en calcul. 126 faillites en moins de deux ans ! L’autorité de garantie des dépôts bancaires, la FDIC (qui assure les dépôts à raison de 250 000 dollars par compte), fait également ses additions. Elle arrive à la somme de 293 millions pour les trois dernières faillites.
La présidente de la FDIC, Sheila Bair, craint que le nombre de faillites demeure élevé dans les mois à venir étant donné que les banques n’ont pas encore enregistré toutes leurs pertes. Je me dis que les 150 faillites initialement prévues seront alors une estimation trop faible de ma part. Surtout qu’après la première crise des subprime et des prêts immobiliers classiques, ce sont les prêts au détail et commerciaux qui risquent d’être affectés par la crise.
Attention au nouveau Lehman Brothers
Ne pensez pas que ces faillites n’ont lieu qu’aux Etats-Unis. De ce côté-ci de l’Atlantique nous affrontons également de graves problèmes bancaires. On a vu les faillites retentissantes en Irlande, en Islande ; les pays de l’Est sont durement touchés par la crise des subprime.
Hypo Real Estate, l’une des principales banques allemandes, a failli entraîner dans sa chute l’ensemble du système financier allemand ; elle vient d’être finalement totalement nationalisée. La banque, après avoir déjà profité de trois milliards d’euros de recapitalisation, en a encore besoin de sept pour faire face à toutes ses pertes passées et à venir. L’Etat rachète les actions des derniers actionnaires, arc-boutés sur leur papier qui a perdu 97% de sa valeur. Le prix attribué aux dernières actions sera de 1,30 euro. A l’époque maintenant lointaine de sa splendeur, la banque allemande valait jusqu’à 58 euros par action. On voit bien là tous les dangers et les risques d’intégrer des banques dans la composition de son portefeuille.
La banque américaine JP Morgan estime que les établissements financiers européens vont devoir lever 53 milliards d’euros dans les six prochains mois afin de relever leur ratio de solvabilité et se mettre en conformité avec les recommandations de Bâle II — et accessoirement rembourser les prêts des Etats. BNP l’a mis en pratique en augmentant son capital de 4,3 milliards d’euros. Cela a ensuite été au tour de la Société Générale, qui a augmenté son capital de 4,8 milliards d’euros.
En août déjà, le groupe financier américain CIT — qui est le principal financier des PME et du commerce de détail aux Etats-Unis — évoquait le dépôt de bilan s’il n’arrivait pas à convertir sa dette, alors que le mois précédent trois milliards de dollars lui avaient déjà été consentis.
Aujourd’hui, le groupe se prend les pieds dans le tapis et son dépôt de bilan semble imminent. Attention au nouveau raz-de-marée en formation : un second Lehman pourrait bien se profiler. CIT représente 60 milliards de dollars d’actifs bancaires et 10 milliards de dettes. Ce serait la sixième plus grosse faillite aux Etats-Unis depuis 1980. Après huit millions de pertes d’emplois, une nouvelle faillite retentissante sonnerait le glas de la reprise.
Impressionnant le rebond des banques ? Oui, mais après quelle chute !
A la lecture de cette succession de points négatifs pour le secteur bancaire international, vous comprenez que je ne suis toujours pas enclin à augmenter mon risque en mettant une banque dans notre portefeuille. Depuis le début 2008, je recommande vivement de vous tenir à l’écart de la finance car ce secteur présente plus de risque que de potentiel.
Certes, vous me rétorquerez que le secteur bancaire est l’un de ceux qui a rebondi. +165% depuis le plus bas de début mars. C’est vrai. Mais après une chute de 82%… il faut une hausse de 555% pour regagner les niveaux d’avant ! Croyez-vous que nous allons vraiment faire cette hausse ?
Secteur Bancaire
BNP avait perdu 78%. Elle regagne 170% depuis son plus bas de mars, et 77% depuis le début de l’année. Sauf qu’elle reste encore à 42% de ses plus hauts. SG est pire avec une remontée de 44% mais elle laisse sur le carreau 56% par rapport à ses plus hauts d’avant la crise. Et Natixis tient le pompon avec une envolée, que certes je n’aurais pas imaginé, de 217% avec un cours frisant les 4 euros. Mais il perd toujours 70% par rapport à son plus haut à 13,95 euros.
Oui. Ce sont de belles remontées auxquelles nous n’avons pas touché. Je vous rappelle que les banques ont profité des aides de l’Etat non pas pour relancer et aider l’économie réelle… mais pour refaire de l’argent, plus d’argent… en spéculant de la même manière qu’avant ! A quand une prochaine catastrophe ?