** Il ne se passe pas grand’chose sur les marchés… et c’est donc ce dont nous allons parler : pas grand’chose. De toute façon, nous n’avons guère le temps, parce que nous sommes en route pour la sierra.
Alors que tout le monde investissait dans le maïs, le blé ou le riz — qui ont tous grimpé — nous avons mis notre argent dans le bétail. Ces derniers temps, on avait du mal à se débarrasser du bétail, même en le donnant gratuitement.
"Les gens en avaient assez du bétail", nous expliquait notre vieil ami Doug Casey. "Ils voulaient tous éliminer le bétail pour pouvoir planter du soja. Ce qui a tué le marché du bétail, bien entendu. Mais pas de souci. Il reviendra".
* D’accord. Nous ne nous faisions pas vraiment de souci, de toute façon. Mais tout de même, nous voilà dans les Andes, pour voir comment se portent nos troupeaux.
** Pendant ce temps, bon nombre de gens pensent que les autorités économiques ont réussi. En réduisant agressivement les taux et en injectant de l’argent dans les banques… en aidant à secourir Bear Stearns… elles ont retourné la situation. C’est comme si elles avaient détourné une gigantesque météorite ; le monde est sauvé.
* Alléluia.
* Mais qu’est-ce que tout cela signifie, en fin de compte ? Disons que le plan a effectivement fonctionné. Qu’est-ce que cela implique ? Ont-ils effacé, d’une manière ou d’une autre, les dettes des Américains ? Les propriétaires enlisés sont-ils désormais sur la terre ferme ? Et qu’en est-il de toute cette dette subprime… de tous ces prêts faisant jouer l’effet de levier pour des fusions, des acquisitions et des rachats qui n’ont pas tout à fait fonctionné… de tous ces fonds de couverture embourbés dans les investissements les plus dangereux au moment le plus inopportun ? Ces erreurs ont-elles toutes été effacées ?
* Oh, cher lecteur… nous sentons venir une illumination d’ordre religieux. D’une manière ou d’une autre, tous nos péchés nous ont été pardonnés… l’ardoise est effacée… nos erreurs ont été absoutes par une autorité plus puissante que Dieu Lui-même — les politiciens.
* Est-ce possible ?
* Si ça ne l’est pas… qu’est-ce que cela signifie quand on entend les autorités ont "réussi" à éviter une vraie crise ? Qu’est-ce qu’elles ont évité, exactement ? Si elles n’ont pas effacé les erreurs, qu’en ont-elles fait ? Si elles n’ont pas empêché les gens d’obtenir ce qu’ils méritent… sur qui est-ce que ça va retomber ?
* Ah, c’est bien là le problème… si on ne peut pas effacer les erreurs par magie… quelqu’un va devoir les payer. C’est peut-être là la clé du "succès", justement : déplacer les erreurs… les faire passer des gens qui méritent de payer aux gens qui ne le méritent pas… c’est-à-dire le grand public et les contribuables.
* En ce qui nous concerne, nous apprécions les erreurs. Ce sont nos erreurs qui ont fait de nous ce que nous sommes. Certes, nous en effacerions volontiers quelques-unes, si nous le pouvions. Mais dans la mesure où elles ont toutes contribué à nous former, se débarrasser de certaines d’entre elles pourrait avoir des conséquences radicales… poussant l’univers tout entier à glisser dans une sorte de réalité parallèle. Nous pourrions disparaître… pourquoi prendre le risque ?
* Les autorités doivent aimer les erreurs, elles aussi. Pour autant que nous puissions en juger, le "succès" — pour elles — doit être de pousser le public à en commettre plus. Voilà pourquoi les taux d’emprunt sont réduits — pour qu’un pays surendetté puisse emprunter plus. Et voilà pourquoi le gouvernement a accordé des baisses d’impôts : pour que des gens dépensant trop puissent dépenser plus.
* Et s’ils dépensent et empruntent plus, qu’est-ce que cela signifie pour l’avenir ? La prochaine génération devra dépenser et emprunter moins. C’est ça, non ? C’est bien ça que signifie le "succès"…
* … dépouiller les générations futures. Dépenser leur argent dès aujourd’hui pour qu’elles dépensent moins demain.