Powell arrive juste à temps pour faire éclore un printemps boursier.
L’hypothèse d’un « pivot » des marchés mi-mars (à compter du 14/15) est quelque peu remise en cause par le « verbe magique » de la Fed, ce mercredi 20 mars à 19H00.
C’est un véritable printemps boursier qui s’est amorcé à partir de 19H30 (une demi-heure après publication du communiqué de la Fed), après une bonne dizaine de jours d’assoupissement des indices US sous les sommets, malgré une succession de chiffres présentés comme « cruciaux » (emploi, inflation, consommation…), mais qui ont eu autant d’impact sur Wall Street que les résultats des derniers matchs de Ligue-1 de cricket en Tasmanie.
La séance des « Quatre sorcières » du 15 mars avait été partagée entre hausses et records sur le Vieux Continent, et consolidation sans intensité à Wall Street : le sol n’avait pas tremblé sous le château de cartes boursier.
La séance de lundi était sans enjeu, mais c’était pour mieux se préparer à de l’exceptionnel et de l’inédit mardi matin. La première hausse de taux de la BoJ (Bank of Japan) depuis 17 ans, le loyer de l’argent étant ramené en territoire positif (fourchette 0,00/0,1%, au-delà de zéro, pour la première fois depuis 8 ans).
Et ce fut là aussi un authentique « non-événement » : les bons du Trésor nippons auront fini la séance de mardi inchangés à 0,7250%.
Le second grand rendez-vous monétaire de la semaine s’annonçait lui sans enjeux majeurs, mais Jerome Powell a réveillé Wall Street en fanfare et la séance « printanière » du 20 mars s’est conclue par l’éclosion d’une kyrielle de records absolus de clôture sur les trois principaux indices US.
A commencer par le Dow Jones à 39 512 points, le S&P 500 à 5 225 points (première incursion de l’histoire au-delà des 5 200 points), puis le Nasdaq Composite à 16 370 points.
Mais ces records ne sont pas la seule surprise du jour : Jerome Powell semble avoir restauré une « confiance » des investisseurs proche de la complaisance, avec un VIX qui s’est détendu de -5,7% au contact des 13,00.
Alors pour le coup, Wall Street apparaît vraiment comme un monde à part, car les marchés des taux semblent faire une lecture des propos de Jerome Powell bien différente de celle des marchés action. Le T-Bond à « 10 ans » ne s’est détendu que d’un point supplémentaire après sa conférence de presse, le « 30 ans » se dégradant symétriquement d’un point à 4,4540%.
Mais les « commentateurs » sur CNBC ou Bloomberg-TV, le visage illuminé de bonheur après la salve de nouveaux records des indices US, n’ont à aucun moment relevé ce hiatus entre les marchés obligataires et les marchés actions.
Leur conviction, c’est que Jerome Powell aurait rassuré les marchés en validant le pronostic de trois baisses des taux d’intérêt cette année, malgré une inflation qui tarde à se rapprocher des 2%. Ce même Jerome Powell qui était censé annoncer hier soir la première des sept ou huit baisses de taux anticipée fin 2023, et consent à valider un scénario à trois réductions du loyer de l’argent d’ici la fin de l’année.
Oui, trois baisses au lieu de sept ou huit… mais c’est une excellente nouvelle, cela signifie que la croissance va demeurer robuste et que l’inflation qui remonte n’est que « transitoire », et recommencera à baisser avant la mi-juin (date supposée du 1er assouplissement monétaire de la Fed).
En réalité, le sentiment que Jerome Powell rime toujours avec Père Noël réside dans cette petite phrase : « La Fed va réduire le rythme de liquidation de son portefeuille d’obligations. » Ce qui équivaut à une sorte d’assouplissement quantitatif, puisque le biais monétaire devient moins restrictif.
Mais que pèseront ces quelques dizaines de milliards de dollars en moins chaque mois face aux centaines de milliards d’émissions obligataires en plus (+200 Mds$/mois) liées au creusement abyssal des déficits US ?
Wall Street répond invariablement : « T’inquiète, ça va bien se passer ! »