Une fin de mois de janvier pleine de surprises pour la Bourse américaine, qui voit de nouveaux records historiques se cumuler et une rotation sectorielle s’opérer… mais pas là où les marchés s’y attendaient !
Nous désespérions de voir s’enclencher une « rotation sectorielle » depuis le 30 octobre 2023, et surtout depuis le 1er janvier 2024.
C’est enfin arrivé, et ce n’est pas vraiment ce à quoi les marchés s’attendaient !
Ne cherchez pas le secteur qui a pris le relai des « technos » et des « GAFAM », puisque ces dernières sont devenues encore plus hégémoniques les 31 janvier, puis 1er et 2 février 2024.
Non, la rotation est venue de l’appétit pour le risque qui vient de passer de « très élevé » à « dévorant »… ce qui signifie un désengagement massif des actifs « risk-off » tels que les Treasuries, d’où une flambée sans précédent des rendements obligataires depuis la mi-octobre 2023, avec des écarts de +15 à +20 points dans les heures qui ont suivi la publication du NFP américain.
Les créations d’emplois sont ressorties deux fois plus nombreuses que prévu (+353 000) en janvier, les coûts salariaux ont bondi de +0,6% (deux fois plus vite qu’attendu). Conclusion : aucun « atterrissage en douceur » à l’horizon. La croissance américaine est peut-être sur le point de doubler celle de la Chine qui ne s’attend plus qu’une expansion limitée à +4,2% en 2024 (ce qui est probablement très surestimé).
La mauvaise volonté affichée de la Fed en matière de baisse de taux serait en réalité un signe très positif, confirmé par les résultats « canons » de Microsoft, Amazon et Meta… donc « full risk on » !
Face à de tels niveaux de profitabilité, le report d’un assouplissement monétaire ne serait que la conséquence d’une bonne santé inespérée de l’économie américaine qui affiche un PIB supérieur à +3%, tandis que l’inflation « officielle » aurait reflué vers 2,8% (pour le pouvoir d’achat réel, c’est une toute autre affaire).
Si l’économie US reste en croissance, alors, il est logique de continuer de miser sur les « valeurs de croissance », et c’est exactement ce que les stratèges ont fait à l’issue de la 5e semaine de l’année.
Vendredi, les indices boursiers US se sont offert un carton plein de records annuels ou historiques (c’était le 7e de l’année).
Le Dow Jones et le S&P 500 se hissent vers de nouveaux sommets, haut la main, avec en prime une nette progression en hebdo : le S&P 500 gagne +1,4% sur la semaine et franchit la barre des +4,1% depuis le 1er janvier (voilà l’indice parti sur une pente de +50% annuel).
Après le zénith inscrit à 4 975 vendredi, il ne manque même pas 0,6% pour atteindre les 5 000 ce lundi : c’est à peine la moitié de la hausse des dernières heures.
Et tout juste le tiers des gains du Nasdaq ce vendredi (+1,75%) dans le sillage de Meta (+20,3%), qui bat à la fois son record algébrique (son cours atteint 475 $ pour un P/E de 40), mais aussi un autre record absolu bien plus rare et encore plus vertigineux : celui du plus colossal gain en capitalisation en une séance pour une seule valeur depuis 140 ans.
Meta ajoute en effet 205,3 Mds$ à 1 220 Mds$ (c’est plus de la moitié de la « capi » de LVMH). Apple – avec ses +191 Mds$ du 10/11/2022 –, Amazon – avec +190,8 Mds$ du 4/2/2022 –, ainsi que Nvidia – avec ses +184 Mds$ du 25/5/2023 – sont détrônés et éjectés du podium.
Amazon (+7,8% avec +128 Mds$ vendredi soir) est rentré dans le « top 15 » des plus gros gains en capital de l’Histoire. Cela fait +333 Mds$ en 24H avec seulement deux titres.
Avec +34% depuis le 1er janvier, Meta a ajouté plus de 300 Mds$ à la « capi » du S&P 500. Et avec Nvidia (+5% vendredi, +33,3% et +330 Mds$ depuis le 1er janvier), la barre des +630 Mds$ est explosée et celle des 1 000 Mds$ vole en éclats avec les +270 Mds$ d’Amazon (+13% depuis le 1er janvier), puis les +250 Mds$ de Microsoft (+9%).
Ces quatre titres « pèsent » tout simplement plus de 85% de la totalité des gains du S&P 500 (496 autres titres se partagent 17%) : il s’agit là aussi d’une grande première historique.
A noter qu’avec AMD (+4,2% et +20% depuis le 1er janvier), on obtient avec seulement cinq titres (surnommés les « FAB-5 ») pas moins de 90% des +4,85% du Nasda-100 depuis le 1er janvier.
Les « FAB-5 » (je vous propose le nouvel acronyme « MAMAN » : Microsoft, Amazon, Meta, AMD et Nvidia) engloutissent toutes les liquidités disponibles, certes avec des arguments convaincants… mais ce sont les mêmes qui reviennent en boucle depuis plus d’un an désormais, et quotidiennement depuis trois mois : ces entreprises sont ultra-profitables et ont du « pricing power« .
Mais le « top-5 » des entreprises favorites parmi les géants n’avait jamais affiché un PER moyen de plus de 25 au sommet des précédents « top » de marché historiques. Cette fois-ci, la barre des 50 est dépassée et le ratio « price to book » (capitalisation/chiffre d’affaires) est littéralement pulvérisé avec Nvidia qui se paye de 20 à 25 fois son CA anticipé pour 2024, Microsoft 12 fois et Meta 7,5 fois.
Au sein des « MAMAN », les « MNM » sont réellement sur une autre planète !