Il n’y a plus beaucoup d’affiches de propagande appelant à la mobilisation de tout un chacun sur les murs des villes comme aux siècles passés. L’effort de guerre prend en effet d’autres formes… mais les appels aux boycotts et autres sacrifices collectifs sont tout aussi nombreux.
CBS News nous renseigne sur l’inflation :
« L’inflation aux États-Unis a atteint son plus haut niveau depuis quarante ans en février. Les prix à la consommation ont bondi de 7,9% en rythme annuel. Il s’agit de la plus forte hausse depuis la présidence de Ronald Reagan.
La hausse des prix de l’énergie, du logement et des produits alimentaires est à l’origine de cette inflation, a déclaré le département du Travail jeudi dernier. Le prix de l’énergie a bondi de 26% en rythme annuel, alimentant une forte hausse du prix de l’essence, du mazout et du gaz naturel destiné au chauffage résidentiel. Le prix des produits alimentaires a augmenté de 8,6% en rythme annuel et celui des vêtements de 6,6%. »
Les Américains tolèrent beaucoup de choses. Les politiciens corrompus. Les guerres stupides. L’incompétence. La planche à billets. Les manipulations des marchés financiers. Facebook. Sont-ils prêts à accepter un gallon (3,78l) d’essence à 10 $ ?
Peut-être. Mais uniquement s’ils peuvent en imputer la responsabilité à quelqu’un d’autre.
A la Chronique, c’est l’argent qui nous intéresse, pas la politique. Mais la politique s’incruste partout. Et la forme d’expression la plus pure de la politique est la guerre.
Hier, nous avons parlé des nouvelles méthodes de guerre des Etats-Unis. Aujourd’hui, nous creusons le sujet.
Une mentalité de platiste
Après l’effondrement de l’Union soviétique en 1989, l’ordre libéral mondial a étendu sa toile sur le monde. Ses marchés mondialisés ont offert des marchandises et des services à bas coût. Ses économies financiarisées ont enrichi les élites (qui détiennent les obligations et les actions). Ses technocrates, sortis tout droit des écoles de commerce internationales et des meilleures universités, ont pris les commandes.
Francis Fukayama avait décrit le triomphe du modèle démocratique occidental comme la fin de l’histoire dans son essai La Fin de l’histoire et le Dernier Homme, paru en 1992. L’éditorialiste du New York Times Tom Friedman évoquait quant à lui ce Valhalla économique dans son livre La Terre est plate, paru en 2005.
Mais, soudainement, le monde est plein de falaises dangereuses et de canyons périlleux.
Que cela vous plaise ou non, le monde est peuplé d’humains, et l’homo sapiens sapiens n’est pas du genre à courber l’échine pendant longtemps. Il est fait d’éruptions volcaniques, d’hallucinations tectoniques et de vanités aussi grandes que l’Everest.
Nous voulons tous nous sentir supérieurs, être les héros de nos propres récits. Individuellement, il est difficile de sentir supérieur aux autres. Que l’on soit costaud ou mince, rapide ou lent, nous devons composer avec ce que l’on a. Avec un peu de chance, nous avons un proche prêt à nous rappeler que nous avons une tache de moutarde sur notre chemise.
Mais au niveau collectif, nos bavoirs sont immaculés. Nous nous regroupons entre nous pour flatter nos égos. Si les l’équipe des Ravens de Baltimore gagne le SuperBowl, tous les idiots du village (ou de Baltimore, en l’occurrence) ont l’impression d’avoir inscrit le point de la victoire. Si nos enfants combattent dans un pays à l’autre bout du monde, nous sommes prêts à faire le plein de munitions pour la prochaine mission.
Sanctions et boycotts privés
Or il existe désormais une nouvelle façon de faire la guerre. Tom Friedman explique :
« Vladimir Poutine a constaté et a déclaré ouvertement que les sanctions imposées par les États-Unis et l’Union européenne ‘confinent à la déclaration de guerre’. (Et ce n’est que le début, Vladimir.)
Le monde est désormais tellement connecté que des individus jouissant d’un pouvoir démesuré, des entreprises et des groupes d’activistes peuvent accumuler les sanctions et les boycotts sans attendre l’aval des gouvernements. La Russie se retrouve donc plus isolée et asphyxiée économiquement que si les sanctions avaient été imposées par des Etats nations. Collectivement, ces nouveaux acteurs concourent à rayer Vladimir Poutine et la Russie de la carte.
C’est la première fois ou presque qu’un pays aussi grand et puissant est aussi rapidement endommagé sur les plans politique et économique. »
Tom Friedman est un fanatique. Il appréhende le monde de manière manichéenne, comme un enfant. Pour lui, l’ordre libéral mondial représente le camp du bien.
« Le monde libre s’est réveillé. Les Etats-Unis et les sociétés libérales en général agissent souvent de manière inepte et divisée – jusqu’à ce qu’elles ne le fassent plus. Demandez à Adolf Hitler. »
Ou à Saddam Hussein. Peu importe si nous sommes l’agresseur ou la victime (notons que Tom Friedman a soutenu l’invasion de l’Iraq en 2003). Le fait est que, pour Friedman et les élites, l’ordre libéral mondial est le camp du bien. Et les sanctions, ainsi que leurs répercussions médiatiques, s’apparentent à un nouveau projet Manhattan. Moscou est le nouvel Hiroshima.
Des avions cloués au sol
Oui, les retombées radioactives tuent la Russie. C’est du moins ce que croit Friedman.
« Oh, et soit dit en passant, dans ce monde connecté, devinez qui possède une part importante de la flotte commerciale aérienne russe.
Ce n’est pas la Russie.
Près de deux tiers des avions commerciaux russes ont été fabriqués par Boeing (334 avions) et Airbus (304 avions), selon Reuters. Bon nombre de ces avions appartiennent à des entreprises irlandaises d’affrètement d’avions. AerCap, la première entreprise d’affrètement d’avions au monde, dont le siège social est à Dublin, possède 152 avions en Russie et en Ukraine, pour une valeur estimée à près de $2,4 milliards,’ déclare The Irish Times.
[Le 5 mars], la compagnie aérienne publique russe, Aeroflot, a déclaré qu’elle suspendrait tous les vols internationaux en raison de ‘circonstances qui empêchent les avions de voler’. Il y a fort à parier que les vols intérieurs seront également suspendus ».
Hourra ! Nous avons gagné.
Il a raison, bien sûr. Une nouvelle forme de guerre est en cours. Une nouvelle arme puissante est apparue : le dollar et le système monétaire international dominé par le dollar servent à mettre la Russie à genoux. La presse, les réseaux sociaux, Hollywood et le mouvement ESG (environnemental, social et gouvernance) de Wall Street ont tous répondu à l’appel du devoir.
Demain, nous nous demanderons pourquoi cette nouvelle forme de guerre ne cesse de proliférer.
2 commentaires
Tous les responsables des nations les plus puissantes sont prêtes à tout faire afin de garder, voire d’augmenter, leur hégémonie sur le plus grand nombre d’autres nations.
Cela provoque les plus grandes guerres mondiales ou locales avec toutes les conséquences directes ou indirectes !
Malheureusement, ce sont les nations les plus faibles qui finissent par devoir les supporter, et, par conséquence, leurs citoyens.
Il y a des principes généraux tels que :
1.- » La liberté des uns s’arrête ou commence la liberté des autres »
2.- Tout personne (privée ou morale) qui cause un préjudice doit réparation
3.- Tous les belges sont égaux devant la loi
Etc…etc……
Vous trouverez des centaines, voir des milliers, de situations qui bafouent ces principes (moraux, légaux ou autres) à cause de discrimination ou toutes autres raisons…..tout autant incroyable et inacceptable !
Bref, autant de raison qui augmente le manque compréhensif de confiance des citoyens dans leurs représentants politiques !!!!!!
Je ne peux pas admettre qu’un président d’un grand parti déclare haut et fort durant la période pré-electorale » AVEC LA NVA JAMAIS »
et, lors de la formation gouvernementale, la parti de ce président a été le seul à s’allier avec la NVA ???? Il a trompé combien d’électeur qui lui ont accordé leur vote suite à sa déclaration !!!!!! C’est au moins un manque de respect vis-à^-vis de ces électeurs.
Ces 152 avions sont perdus pour pour Aercap, pas pour les Russes qui les ont entre les mains.
Aercap a t-elle payé cash Boeing et Airbus ? Ou quelqu’un quelque part croise les doigts pour que cette boite Irlandaise trouve de l’argent ailleurs ?
Sommes nous dans du « quoi qu’il en coute » ??… parce que ça risque de couter.