L’inflation aura-t-elle bien lieu, et pour combien de temps ? Au-delà de cette question, il y a aussi la question des devises officielles et de leur statut de réserve de valeur, de plus en plus fragile.
Jeffrey Snider, directeur des recherches du fonds Alhambra, est l‘un des rares observateurs qui a compris comment fonctionne le système monétaire mondial et expliqué pourquoi les politiques non conventionnelles étaient inefficaces pour produire de l’inflation.
Snider tient bon sur son diagnostic, qui reste inchangé : les forces de déflation sont toujours là et le comportement des marchés de taux longs le préfigure. Les marchés de taux ne se sont pas trompés, ni en 2007 ni en 2001 ou encore en 2017.
Il est vrai que l’exemple japonais lui donne raison : échec sur toute la ligne depuis des décennies.
Incertitudes sur l’inflation
Je reste partagé sur la mise en place de l’inflation.
Mon schéma reste le suivant : bouffée d’inflation par l’offre, la rupture des chaînes, les pénuries locales, le pouvoir restauré de fixer les prix, etc. mais incertitude sur la mise en place de l’échelle de perroquet des prix et des salaires, qui est la vraie inflation.
Vous savez que, fondamentalement, je partage le point de vue et les analyses de Snider – à une différence près : je crois que la situation est évolutive en ce sens que nous avons changé de régime ; nous sommes dans un nouveau régime de domination monétaire, financière et fiscale et ceci change la donne.
Par ailleurs, il y a des pénuries. Il y a ébauche de mécanismes de transmission, la pompe étant amorcée par la rupture des chaînes d’approvisionnement et l’inflation par les coûts.
Il n’est pas impossible que les événements s’enchaînent, que l’engrenage s’emballe et que, au lieu de voir l’inflation normale enfler, on constate que ce sont les anticipations de dépréciation de la monnaie qui prennent le dessus.
Inflation et monnaie, des différences cruciales
Les deux phénomènes « inflation des prix des biens et services » et « anticipation de dépréciation de la monnaie » ne sont absolument pas équivalents.
La psychologie est très différente.
Les cryptomonnaies, pour leur part, jouent désormais le rôle ancien de l’or en sapant la confiance en la monnaie.
Elles habituent le public à considérer le fait que les monnaies sont condamnées, qu’elles ne seront plus des réserves de valeur. C’est là une donnée que les zozos des banques centrales ne semblent pas avoir comprise.
Les cryptomonnaies sèment le doute, elles ensemencent le champ des futures anticipations de fuite devant la monnaie.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]