Si les taxes douanières engendraient paix et prospérité, tout le monde le ferait. Hélas, ce n’est pas aussi simple… et les Américains l’apprendront à leurs dépens.
Nous avons parié que Trump ne se lancerait jamais dans une guerre commerciale totale avec la Chine.
Nous sommes-nous trompé ?
Peut-être.
Un pari perdant ?
Ces derniers jours, notre pari semblait en tout cas de plus en plus perdant. L’équipe Trump n’est pas passée à la guerre totale… mais, en augmentant les taxes douanières sur 200 Mds$ d’importations chinoises, s’en approchait dangereusement.
Notre prédiction était basée sur la supposition que Trump se soucie plus du cours des actions que de la politique commerciale. Une véritable guerre commerciale ferait chuter les marchés… pensions-nous… et le président n’était pas assez idiot pour risquer cela.
Il s’organise pour que la Fed soit désignée coupable de la prochaine baisse ; il ne veut pas que des doigts accusateurs se pointent vers lui.
Selon de récents tweets, cependant, il semble que les taxes douanières n’aient jamais été une tactique de négociation mais bel et bien une fin en elles-mêmes :
« Les taxes douanières rapporteront BIEN PLUS de richesse à notre Pays qu’un accord du genre traditionnel, même phénoménal. C’est aussi bien plus facile & rapide à faire. Nos Fermiers s’en sortiront mieux, plus vite, et des pays en famine peuvent maintenant être aidés.
Les taxes douanières rendront notre Pays BEAUCOUP PLUS FORT, pas plus faible. Regardez bien ! »
Bien entendu, si c’était vrai – que l’on peut s’enrichir et se fortifier en appliquant des taxes douanières –, il y aurait bien plus de taxes douanières dans le monde. Pas uniquement pour les pays ; les régions, voire les départements, fermeraient leurs frontières commerciales.
Le Dakota du Nord pourrait vouloir construire ses propres raffineries pétrolières. Le Kentucky pourrait développer sa propre version de la Silicon Valley. Imaginez New York interdisant les films californiens pour protéger son industrie cinématographique !
Qui ne voudrait pas bloquer la concurrence extérieure, si cela rend plus riche ? Si la prospérité était aussi simple que ça, tout le monde le ferait.
Le gouvernement doit-il contrôler le commerce ?
Peut-être que le commerce devrait effectivement être contrôlé par le gouvernement. Apparemment, même nos lecteurs américains pensent que c’est le cas. Voici ce que nous lisons dans le courrier :
« Il faudrait interdire toutes les importations chinoises. On peut fabriquer ces 500 Mds$ de pacotille importée ici même. Ce serait tout à fait bien. Les Américains sortiraient gagnants.
Enfin, si l’on veut mettre fin aux discussions commerciales, on devrait exiger que tous les bien chinois soient valorisés au prix de la main d’œuvre américaine, pour contribuer au travail impliqué dans leur production. Pas de raison de faire concurrence à la main d’œuvre chinoise. On a bien assez de concurrence ici. Il faudrait appliquer les taxes douanières nécessaires pour atteindre la parité du prix de la main d’œuvre ».
Oui, il y a de la concurrence au sein des frontières américaines parce qu’en interne, les Etats-Unis sont une zone de libre-échange. Un habitant de l’Alabama, par exemple, n’a pas besoin de demander la permission d’acheter un avocat en Californie.
Les gens de San Francisco peuvent quant à eux acheter des automobiles fabriquées à Birmingham… même si les salaires et le coût de la vie sont bien plus bas dans le sud-ouest américain que dans le nord de la Californie.
Jusqu’à la création de l’Union européenne, les Etats-Unis disposaient de la plus grande zone de libre-échange au monde. Nous sommes convaincu qu’il s’agissait d’une cause majeure de la prospérité US.
Nous pensons également que cette prospérité a mené les gens, d’une manière générale, à préférer les marchés ouverts et les échanges plutôt libres, sans que les autorités s’en mêlent – parce que cela rapportait.
Que s’est-il passé lorsque cela n’a plus rapporté ? C’est ce que nous sommes en train de découvrir.
Le travailleur américain moyen n’a pas eu de vraie augmentation de salaire depuis 45 ans ; pour lui, le libre-échange ne semble pas fonctionner. Ce n’est plus un jeu à somme positive. C’est un jeu à somme nulle… et c’est lui qui perd.
Il ne réalise pas que les autorités ont truqué le jeu en sa défaveur, avec leur fausse monnaie et leurs taux d’intérêts factices.
Il pense plutôt que quelque chose ne va pas dans l’accord gagnant-gagnant d’origine. Le capitalisme, c’est nul, se dit-il. Le libre-échange est une arnaque, pense-t-il. Il veut que les autorités fassent quelque chose. Il veut que les bidouilleurs bidouillent le système.
Nous y reviendrons… à mesure que les événements progressent ; ce pourrait être important.
En attendant…
L’enfer sur terre
Pouvons-nous trouver un pays qui a interdit les importations étrangères et prospéré ? Nombreux sont ceux qui ont tenté de le faire. Au moins un essaie encore : la Corée du Nord. Qu’est-ce que ça donne chez eux ?
Les habitants de Pyongyang vont-ils au supermarché du coin pour acheter un lave-vaisselle fabriqué sur place… et meilleur que ceux fabriqués par les Chinois ?
Prennent-ils de l’eau pétillante… mise en bouteille dans le pays et moins chère que la San Pellegrino importée d’Italie ?
Se rendent-ils chez leur concessionnaire et dédaignent les Mercedes, les Acura et les Ford pour pouvoir acheter les véhicules fabriqués chez eux ?
Non. Ils n’achètent pas grand-chose parce qu’ils n’ont pas d’argent. Les importations sont quasiment inexistantes. Les rayons sont presque vides ; le Nord-Coréen moyen survit à peine… parce que les autorités nord-coréennes contrôlent le commerce et tout le reste.
Interdire le commerce n’a pas fonctionné pour la Corée du Nord. Au contraire, cela a engendré un enfer sur Terre. Qu’en est-il des Etats-Unis ? Cela en ferait-il un paradis ?
Revenons-en aux principes de base. La richesse réelle est créée par des accords gagnant-gagnant passés entre des personnes volontaires. Les deux partis sortent gagnants.
Les autorités, elles, ne créent pas de richesse ; elles se contentent de la faire circuler par le biais d’accords gagnant-perdant. Le commerce ne fait pas exception. Lorsque les autorités contrôlent le commerce, certains gagnent. D’autres perdent.
Donald Trump a vendu la mèche la semaine dernière :
« Des exceptions seront accordées sur certains produits, ou ils iront à de nouvelles sources ! »
Les lignes téléphoniques ont dû chauffer tandis que les entreprises appelaient leurs lobbyistes vendredi.
Les consommateurs veulent simplement les meilleurs produits au meilleur prix. Les politiciens/compères/initiés/membres du Deep State/etc., eux, jouent un jeu différent.
Ils cherchent à obtenir des exceptions, crédits d’impôts, traitements spéciaux, subventions, allocations – et même des sanctions contre leurs concurrents étrangers.
On passera des accords. On signera des contrats. On se verra à déjeuner. On tiendra des auditions devant le Congrès. On écrira des articles. On appliquera des pressions. De l’argent changera de main.
Le public paiera des prix plus élevés. Quelques personnes obtiendront plus de profits. La prospérité américaine déclinera plus rapidement encore. Et les gens voudront plus de solutions faciles.
5 commentaires
Mais est-ce vraiment judicieux d’appliquer le libre-échange avec des pays comme la Chine?
Le libre échange est intéressant à condition d’avoir quelque chose à échanger que les autres veulent. Les US échangent du papier monnaie contre des biens industriels, du vent contre du réel ou ils obligent leurs obligés à acheter leur gaz de schiste liquéfié. Ils sont en déficit avec pratiquement tous les pays développés. Bien sûr, le vent fait tourner des moulins, il faut des dollars pour que la Chine achète du pétrole à l’Arabie et que l’Arabie achète des armes aux US, mais le compte n’y est pas. Des dollars sont stockés un peu partout hors des US, en grande quantité. Ils reviennent au pays pour s’investir dans l’immense dette US qui ne sera jamais remboursée. Tout le monde le sait mais tout le monde est persuadé que cela durera encore assez longtemps pour en profiter. Sauf qu’il y a des intérêts supérieurs bien plus important que les sous. Les US ne veulent pas partager le pouvoir sur le monde. Tic Tac… Les US ont ouvert la boîte de Pendore en transférant ses savoir faire en Chine. … Tic Tac … La Chine s’enrichit … Tic … Se réarme … Tac … Se déploie en Asie … Tic … En Afrique … Tic … En Eurasie … Ouaip ! L’Eurasie, c’est trop ! Trump pose son gros … ego US sur le couvercle. Suspens ! La boîte va t-elle tenir ou exploser en libérant la Tempête ?
Bonjour Daniel,
» Sauf qu’il y a des intérêts supérieurs bien plus important que les sous. Les US ne veulent pas partager le pouvoir sur le monde. »
Je pense que c’est lié: Sous et pouvoir.
Le $ avec son « privilège exorbitant » leur permet tout. Et ils se sont tout permis. En particulier des déficits « sans pleur » comme disait De Gaulle.
Sauf que pour continuer avec ce privilège, il faut que personne ne le conteste. Que le petrole continue d’être vendu en $ (Irak/Iran). Que le commerce mondial ne soit pas fait dans une autre devise (Chine).
Donc il ne peuvent pas partager au risque de perdre le privilège.
Prendre la Corée du Nord en exemple pour démolir le fait de barrières douanière est assez fallacieux, non ! Au fait, la Suisse (qui n’est pas la Corée du Nord, pas encore !) impose des barrières douanières selon des modalités propres à ses besoins, et ce en plein milieu de l’UE…? Comment se porte l’économie Suisse, mal? Est-ce une exception?
Bref, votre démonstration est tout à la fois caricaturale et manichéen !
Ce n’est pas une guerre économique et il ne faut pas la jauger sur cette base; c’est une guerre géo-économique pour le leadership, donc le but est de faire plus de mal à l’autre qu’à soi-même, de retarder le développement chinois même au prix d’un sacrifice économique. D’ailleurs l’objectif a enfin été affiché avec les sanctions contre Huawei. Dans un tel contexte les accords gagnant-gagnant sont même une défaite