La musique politique n’est qu’une distraction pour faire oublier la crise qui couve. Chaque hausse de 1% des taux d’intérêt dans le monde coûte 3% de croissance…
Les trains prennent de la vitesse. Le bon vieux Marigot Express en provenance de Washington… et la Manhattan Money Machine, qui accélère depuis New York… sont en train de se foncer dessus.
Notre supposition : lorsqu’ils se rencontreront, les dégâts seront énormes.
Depuis quelques jours, les passagers du train politique ont une nouvelle source de distraction – un trio de chanteurs appelé « Les Balances ».
Oui, cher lecteur, trois des conseillers les plus anciens – et les plus proches – du président se sont désormais mis à table.
Le ténor, c’est Michael Cohen, avocat personnel et ancien « punching-bag » du Donald. Il a été rejoint par l’ancien pote de Trump, David Pecker, à la basse.
Pecker, éditeur du chef d’oeuvre littéraire qu’est le National Enquirer, aurait tout un coffre plein de chansons enflammées – dont Je veux tout, d’Ariane Moffatt et Parachute doré, d’Alain Souchon.
Le troisième membre du trio est le directeur financier de l’Organisation Trump, Allen Weisselberg, déjà connu dans certains cercles musicaux pour son hit de l’ère Nixon : Suivez l’argent.
Le trio donnera tout un concert. La plupart des chansons suivent la formule habituelle : un garçon rencontre une fille… Un garçon couche avec une fille… Un garçon paye une fille pour qu’elle reste discrète… Un garçon et ses fixeurs trouvent des moyens de dissimuler ces paiements… mais ils bâclent le travail et, apparemment, enfreignent les lois fédérales sur le financement des campagnes électorales.
Parmi les morceaux qui ne sont pas encore au hit-parade se trouvent quelques-uns qui sont tout de même déjà bien connus dans les bars et boîtes de nuit de New York : Un type louche, par exemple, est une chanson sur des deals louches entre des hommes d’affaires louches des deux côtés de l’East River.
Arnaquer les créanciers… se mettre en faillite pour éviter de payer ses factures… évasion fiscale… fausses factures – tous les trucs habituels.
Le New York Times et le Washington Post espéreront insérer une chanson ou deux sur le thème de l’ingérence russe dans la campagne… mais nous sommes d’avis que le trio n’a rien sur le sujet.
Si des informations réellement préjudiciables étaient disponibles, elles auraient déjà fait surface. Il est plus probable qu’il n’y en ait pas.
Des distractions pour oublier l’essentiel
Toute cette histoire n’est sans doute qu’une perte de temps. De tous les gens minables qui ont essayé d’influencer les élections de 2016, les Russes étaient probablement les moindres.
Ainsi, distraits par des refrains idiots et des vociférations potinières, alors que l’aiguilleur dort à son poste… personne ou presque dans le train ne se donne la peine de regarder par la fenêtre.
S’ils le faisaient, les passagers voudraient peut-être ralentir. Des ennuis arrivent – et les conducteurs de train sont responsables de la plupart d’entre eux.
Il y a par exemple la Fed. Bloomberg :
« Le président de la Réserve fédérale Jerome Powell a affirmé que les fondamentaux de l’expansion économique américaine semblaient vigoureux et allaient dans le sens d’une augmentation continue et graduelle des taux d’intérêts.
‘Il y a de bonnes raisons de penser que cette performance solide va se poursuivre’, a déclaré Powell ce vendredi dans ses remarques lors du rassemblement annuel de la Fed de Kansas City à Jackson Hole, Wyoming. ‘Je pense que ce processus graduel de normalisation reste approprié’. »
Le président de la Fed doit titiller les dieux. Ils ont sans doute repéré un idiot… et sont en train de se précipiter pour lui tendre un piège.
La normalisation de la politique des taux d’intérêt (Erreur n°2) signifie une hausse des taux d’intérêt réels (il n’est pas normal de prêter de l’argent sous le taux d’inflation).
Sauf que l’économie mondiale toute entière – et notamment le gouvernement US – dépend désormais de taux anormalement bas (dus à l’Erreur n°1).
Les autorités américaines accumulent désormais des déficits d’environ 100 milliards de dollars par mois. A mesure que la Fed poursuit son resserrement quantitatif, elle augmentera les coûts d’emprunt du gouvernement US et fera grimper les taux d’intérêt.
Attention au krach !
La terrible équation du surendettement
Rappelez-vous que le crédit est offert par l’industrie financière. Mais la dette est payée par les entreprises du monde réel. De petites augmentations de taux peuvent donc avoir de lourdes conséquences dans le monde réel.
Il y a environ 250 000 milliards de dollars de dette en cours dans le monde. Une augmentation d’1% à peine ajoute 2 500 milliards de dollars aux coûts de financement planétaires. Cet argent doit provenir soit de crédits supplémentaires, soit de production supplémentaire.
Or les banques centrales réduisent leurs émissions de crédit… et la production mondiale ne se monte qu’à 80 000 milliards de dollars environ au total.
Telle est la terrible équation d’un excès de dette. Chaque hausse d’1% sur les taux représente plus de 3% du PIB.
Aux Etats-Unis, la dette totale – par rapport au PIB – est encore plus élevée. Chaque augmentation d’1% sur les taux signifie 4% de plus à sortir pour l’économie réelle. C’est pour cette raison qu’un tout petit mouvement du cycle du crédit suffit à abattre toute l’économie.
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Récession droit devant !
Et puis il y a la guerre commerciale. Elle aussi est sur les rails, déclenchant des sonnettes d’alarmes à chaque passage à niveau.
Aujourd’hui, il y a peu de chances d’une véritable « victoire » dans la guerre commerciale (les taxes douanières sont déjà basses… d’autres barrières sont plus complexes et difficiles à surmonter).
Il y a en revanche de belles probabilités d’obtenir une défaite catastrophique.
En effet, les 250 000 milliards de dollars de dette mondiale susmentionnés dépendent des 80 000 milliards de dollars de PIB eux aussi susmentionnés, lesquels dépendent à leur tour du commerce mondial à ses niveaux actuels.
Tout ce qui réduit le commerce réduit aussi le PIB et rend la dette encore plus difficile à supporter.
Il y a assurément des problèmes à venir. Impossible de les éviter. Lorsqu’ils arriveront, comment les politiciens vont-ils les aggraver ?
7 commentaires
» Chaque hausse de 1% des taux d’intérêt dans le monde coûte 3% de croissance… (…) Chaque hausse d’1% sur les taux représente plus de 3% du PIB.
Aux Etats-Unis, la dette totale – par rapport au PIB – est encore plus élevée. Chaque augmentation d’1% sur les taux signifie 4% de plus à sortir pour l’économie réelle. »
Une hausse d’1 point des taux coute peut être 4% du PIB aux créanciers, mais cela ne veut pas dire que la croissance est réduite d’autant et qu’il y a une fuite de capitaux de l’économie réelle, puisqu’en face des créanciers il y a des préteurs (épargnants, banques privés, entreprises, banques centrales…) qui bénéficient de cette hausse des taux.
@Sébastien Maurice
Pourquoi dites vous qu’une hausse d’un point des taux coûterait 4% seulement aux créanciers ?
En effet, comme expliqué dans l’article, pour compenser chaque hausse de 1% des taux d’intérêt,
l’économie réelle devrait augmenter sa production de biens et services de 4%, ce qui est énorme.
Cette charge pèse sur tout le monde, créanciers comme débiteurs.
Certes, les créanciers verraient donc leurs revenus progresser de 1%, mais le PIB, lui, chuterait de 4%.
En d’autres termes chaque hausse des taux de 1% coûterait 4 % de PIB à l’économie réelle, d’où une réduction inévitable de la croissance.
Donc 1% de gain uniquement pour les créanciers, et 4% de pertes pour l’économie réelle.
On voit bien qu’un tel bilan négatif ne peut que conduire à une récession majeure dans une économie surendettée globalement insolvable, les « perdants » étant infiniment plus nombreux que les « gagnants » suite à la hausse des taux.
En outre, le système monétaire actuel ne peut pas supporter une réduction des crédits bancaires et du bilan de la FED.
Ce n’est pas possible.
En effet, n’oublions pas que le banquier, au moment où il prête, exige toujours des intérêts, même faibles.
Globalement, il exige donc plus d’argent qu’il n’en existe au moment du « prêt », ce qui signifie qu’à un moment où un autre, le système bancaire est condamné à augmenter sans arrêt les crédits ( sa planche à billets).
Si la masse monétaire ne grossit pas sans arrêt, le système bancaire se retrouve en faillite, les débiteurs devenant matériellement incapables de rembourser leurs dettes ( insolvables comme en 2008) et toutes les bulles financières formant la « bulle de tout » se mettent à exploser les unes après les autres.
Dans un système d’argent-dette, toute réduction de la masse monétaire entraîne nécessairement une récession, ou, pire encore, en présence d’une ou plusieurs bulles, un krach violent.
Le « bulle de tout » qui résulte de 10 ans de fonctionnement de la planche à billet est beaucoup trop grosse pour de dégonfler doucement.
Que vaut une dette si le débiteur est dans l’impossibilité de la rembourser ?
Dans mon commentaire précédent, il faut ne pas tenir compte des mots ‘ » à un moment ou un autre ».
Le système monétaire est constamment condamné à augmenter la dette.
Hannibal Pantalacci : l’auteur estime qu’1 point de hausse des taux coute 4 points de PIB car le ratio de dette total/PIB aux USA est de 400% du PIB. Donc si les taux montent de 1 point, cela représente un surcout annuel de 4 points de PIB pour les débiteurs, mais un gain annuel de 4 points de PIB pour les créanciers, pas 1 point (1 point de taux ce n’est justement pas 1 point de PIB).
Une hausse de 1% coutera forcement aux emprunteurs. De cela, on est certain. Qu’ils paient ou pas.
Pour les créanciers, ils gagneront peut être plus d’intérêt… si le sur-endetté paie.
Sébastien Maurice
Oui, je comprends votre point de vue, mais justement, ces 4 points de PIB à chaque hausse des taux de 1% de la Fed, n’y a t il pas un moment où l’économie réelle des Etats Unis ne pourra pas les produire ?
Un moment où les débiteurs ne pourront pas rembourser les créanciers, ainsi que cela s’est passé au cours de la crise des subprime en 2008 ?
Pour mémoire, à cette époque, la hausse des taux de la Fed avait provoqué l’insolvabilité des emprunteurs du marché immobilier.
Pourquoi ? parce que l’économie réelle ne leur avait pas permis de tenir le choc de cette hausse de leur dette.
Il y avait une bulle sur le marché des actions, et une autre sur le marché de l’immobilier.
Des facteurs aléatoires ont conduit à l’éclatement de la seconde, avant la première, mais l’inverse était également possible.
Les créanciers n’ont donc rien gagné du tout à cette hausse des taux, et la crise d’insolvabilité s’est rapidement propagée au monde entier, et a failli provoquer l’explosion du système monétaire mondial.
Comme le souligne avec raison Djamel, le surendetté risque de ne pas pouvoir payer la facture.
Alors que la Fed commence à réduire son bilan, où le surendetté pourrait il bien trouver l’argent nécessaire ?
Hannibal Pantalacci : oui je ne nie pas cela mais c’est un autre problème, c’est différant que de dire 1 point de hausse de taux coute 4% de PIB car la dette est de 400% du PIB. Le raisonnement est faux pour la raison évoquée précédemment. A l’inverse si la hausse des taux déclenche une vague de défaut en mode effet dominos, alors on fera face à une chute brutale de l’activité dans des proportions imprévisibles. C’est la relation mathématique que je remet en cause.