** L’inflation n’est pas censée être un problème. Si elle n’est pas assignée à résidence, du moins porte-t-elle un bracelet électronique à la cheville. Pourtant, les preuves de son évasion s’accumulent.
* Quant à la raison pour laquelle elle est censée être sous contrôle, l’explication habituelle veut que l’entrée de l’Asie dans l’économie mondiale a réduit les coûts de main d’œuvre. Dans la mesure où la main d’œuvre est une part importante des biens comme des services, il serait raisonnable de penser qu’une baisse des salaires mènerait à une baisse des prix.
* Quant à pourquoi l’inflation pourrait être galopante, nous avons une explication : les Asiatiques doivent manger, eux aussi.
* Les salaires, en Chine continentale, seraient en hausse de 20% par an. En d’autres termes, la main d’oeuvre bon marché n’est plus si bon marché que ça… et elle le devient de moins en moins chaque année. Et maintenant que tous ces salariés grimpent l’échelle sociale, ils veulent un peu plus de viande dans leur soupe.
* L’argent, comme nous le savons tous, pousse sur les arbres. Pas la nourriture. (Les lecteurs peuvent essayer de trouver un sens à cette métaphore quand ils en ont le temps). Et mettre plus d’Asiatiques au travail n’augmente pas automatiquement l’offre de terres agricoles… de ce qui y pousse… ou de ce qu’on y trouve en sous-sol. Nous assistons donc exactement à ce à quoi il fallait s’attendre. Alors que l’augmentation de la production industrielle a réussi à maintenir des prix pas pour les biens manufacturés, l’augmentation de la masse monétaire a forcé à la hausse les prix des choses qui ne sortent pas des usines. L’or, l’art contemporain, le terrain et l’huile de cuisine nous viennent en tête.
* L’huile de cuisine, c’est parce qu’elle a fait les gros titres cette semaine :
* "… Samedi dernier à Chongqing", rapporte le New York Times, "les gens ont commencé à faire la queue avant l’aube devant un magasin Carrefour offrant une réduction sur des bidons d’huile de friture, une denrée essentielle pour bon nombre de plats chinois. Lorsque les portes se sont ouvertes, une bousculade a eu lieu, durant laquelle 31 personnes ont été blessées et trois personnes tuées. Le ministre du Commerce chinois a réagi lundi en interdisant les promotions à durée limitée".
* Officiellement, les prix grimpent au taux annuel de 6,5% en Chine. Même au taux officiel, les Chinois n’ont pas vu une telle inflation depuis près de 11 ans. Mais la nourriture grimpe plus vite… au rythme de 17,6%. C’est un gros problème en Chine. Les gens ne gagnent pas beaucoup d’argent — ils doivent donc en dépenser une bonne partie en denrées alimentaires. Voilà pourquoi quelques-uns se sont fait tuer en essayant de faire une bonne affaire sur l’huile de cuisine.
* Nous nous rappelons que Jacques Diouf, directeur de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, avait prédit il y a quelques semaines de ça : "si les prix continuent à grimper, je ne serais pas surpris de voir des émeutes pour de la nourriture".
* Eh bien voilà, M. Diouf. Vous aviez raison.
** Maintenant, revenons à l’ensemble du tableau.
* "Le trou noir des prêts hypothécaires est pire, je pense, que ce qu’on a vu", a déclaré Tony James, président de Blackstone, société de private equity. "Il est plus profond, plus sombre, plus effrayant. [Les banques] cherchent désormais de nouvelles réserves et à mon sens… elles n’ont pas une idée claire de la manière dont les choses vont évoluer, et la confiance est basse".
* A notre sens à nous, il s’est produit un changement en profondeur dans les marchés mondiaux. Et les preuves continuent de s’accumuler…
* Les prix de l’immobilier, en Californie du Sud, sont redescendus assez bas pour effacer les 2,5 dernières années de gains, nous dit le Los Angeles Times.
* A Atlanta, 5 244 maisons seront vendues aux enchères le mois prochain ; 53 365 d’entre elles ont déjà été vendues cette année… le total se montant à 26% environ par an.
* Quant au Chicago Tribune, il nous parle d’une étude réalisée par le Centre américain pour les prêts responsables, prédisant "une vague de saisie" équivalant à 223 milliards de dollars.
* Une centaine de milliards par ici… une centaine de milliards par là… ça fait vite de vraies sommes.
* Les Américains sont les plus grands dépensiers de la planète — avec 20% de la consommation mondiale totale. Ce sont les plus gros utilisateurs de pétrole au monde. Ce sont également les gens les plus endettés sur Terre. Et voilà qu’ils se trouvent à court d’argent. La valeur de leurs maisons chute. Leurs salaires stagnent ou diminuent. Leur dollar est si déprimé qu’il n’arrive plus à se lever le matin.
* Cette semaine, en fait, il a de nouveau été mis à mal. Quand pourra-t-il faire une pause ?