Il y a un an, en avril 2016, l’IFOP publiait son sondage annuel sur « Les Français et le Libéralisme » pour L‘Opinion et Génération Libre. Plus de 90% des citoyens déclaraient « aimer » l’autonomie, le mérite, l’initiative, la responsabilité et l’effort. Une très large majorité aimait la concurrence (65%), le libéralisme et les réformes (59%) et seuls 30% des citoyens indiquaient aimer l’Etat-providence. 53% appréciaient l’économie de marché contre « seulement » 41% qui affirmaient aimer le socialisme.
Pourtant, début avril, Jean-Luc Mélenchon devenait la personnalité politique préférée des Français selon La Tribune. Dans le sondage Kantar Sofres OnePoint du 9 avril, le leader de La France Insoumise dépassait pour la première fois François Fillon (respectivement 18% et 17%) alors que Marine Le Pen partageait la première place du classement avec Emmanuel Macron, avec 24% des intentions de vote. Un second tour Le Pen – Mélenchon n’est plus considéré comme une hypothèse impossible.
Rien ne doit arrêter la révolution, surtout pas l’échec ?
Le 7 mai au soir, les Français auront donc soit un président étatiste, soit un président très étatiste. Un président qui pourrait devenir un véritable « homme fort » ne se préoccupant « ni du Parlement ni des élections », après que sa politique socialiste ait inéluctablement échoué. Car en effet, comme le rappelle Guillaume Nicoulaud, « les dictateurs le sont devenus parce que leurs politiques économiques plantaient et rien ne doit arrêter la révolution. »
C’est d’ailleurs ce que semblent souhaiter 49% des Français qui voudraient « un homme fort qui n’a pas à se préoccuper du Parlement et des élections », à en croire le huitième « Baromètre de la confiance politique » publié par le Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF) au mois de janvier. Il faudrait expliquer à ces Français-là qu’on peut difficilement avoir un système politique démocratique (91% sont en faveur d’un tel système) et ce qu’il est convenu d’appeler une dictature.
Qu’attendons-nous de l’Etat ?
Cela n’est qu’un avis, mais il me semble que cette contradiction est compréhensible. Une grande partie des Français souhaite que l’Etat assure avec détermination ses fonctions fondamentales. Avant toute chose, le rôle de l’Etat est de faire en sorte « que chacun […] travaille en liberté le jour et dorme en paix la nuit », c’est-à-dire qu’il assure « le maintien de l’ordre et la distribution de la justice » par l’emploi de la force publique, comme l’expliquait l’économiste libéral du XIXème siècle Frédéric Bastiat. Le sondage de l’IFOP, en faisant apparaître que 58% des Français aiment l’autorité et 91% la responsabilité, conforte cette interprétation.
L’Etat s’étant petit à petit immiscé dans tous les pans de notre vie quotidienne, il a de plus en plus de mal à remplir son rôle premier. C’est ce que Jean-François Revel entendait lorsqu’il écrivait que « pour tout libéral, le but est de rejeter non l’Etat mais l’étatisme, c’est-à-dire la maladie qui rend l’Etat incapable de remplir sa fonction parce qu’il veut assumer les tâches qui appartiennent à la société et aux individus. »
« La vraie alternative n’est pas entre plus d’Etat ou moins d’Etat. Elle est entre le bon Etat et le mauvais ».
Pour ceux qui ne verraient pas quelles réalités peuvent recouvrir « le mauvais Etat », je prendrai un exemple autre que les méfaits de l’Etat stratège que La Chronique traite abondamment. Dans une vidéo aussi pédagogique qu’amusante, Daniel Tourre relève qu’à défaut de réfléchir à une meilleure efficacité de l’Etat dans l’accomplissement de ses fonctions régaliennes, les Jeunes socialistes ont organisé un atelier sur le thème « Quelle sexualité pour le citoyen ? »
Outre le fait qu’il régisse déjà les moindres aspects de la vie en société et certaines caractéristiques de votre habitation, l’Etat a donc vocation selon les apparatchiks socialistes de demain à s’introduire dans votre chambre à coucher. Le but poursuivi ? Dans une perspective socialiste, on peut imaginer qu’il s’agit de s’assurer que vous avez bien une sexualité « républicaine », « égalitaire » et pourquoi pas « solidaire », afin d’assurer une parfaite « justice sociale »…
Le constat que faisait Mario Vargas Llosa se vérifie :
« La pierre de touche de l’Etat-providence est son inévitable vocation étatique et collectiviste, qui engendre des psychologies passives et une abdication de la responsabilité personnelle devant l’Etat, dans les mains duquel l’individu remet l’obligation de l’éduquer, de le soigner, de le transporter, de lui donner du travail, de le pensionner et de l’enterrer ».
[NDLR : Découvrez cette bizarre devise qui échappe au contrôle de tous les Etats. Certains le qualifient d’or numérique. Qu’en est-il vraiment ? Découvrez-le ici.]
Un Etat fort n’est pas un Etat omniprésent
Nos responsables politiques ne brillent pas par le respect et la considération qu’ils portent à la justice et à la police nationale.
Nicolas Sarkozy, ancien président de la République, nous explique qu’il a préféré racler l’os de l’Etat régalien plutôt que la graisse de l’Etat mammouth…
Alain Juppé n’est pas non plus réputé pour l’amour qu’il porte à la police, ni à la justice. « Je ne veux pas l’Intérieur, je n’aime pas les flics. Pas la Justice. Je déteste les juges », aurait-il déclaré alors que Nicolas Sarkozy espérait son retour au gouvernement. C’est en tout cas ce qu’avance Anna Cabana dans son ouvrage Un fantasme nommé Juppé.
Dans Un président ne devrait pas dire ça, le livre de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, c’est François Hollande qui est pointé du doigt. Le président aurait tenu les propos suivants :
« Cette institution, qui est une institution de lâcheté… Parce que c’est quand même ça, tous ces procureurs, tous ces hauts magistrats, on se planque, on joue les vertueux… On n’aime pas le politique. La justice n’aime pas le politique… »
Emmanuel Macron a quant à lui une vision très personnelle des missions de la police. Outre la protection des personnes et des biens, elle aurait également vocation à assurer des tâches qui relèvent plus à mon sens du conseiller d’orientation et de l’assistante sociale que de la police. Encore une fois, ça n’est qu’un avis.
Par ailleurs, comment ne pas déplorer les ordres intimant aux policiers de terrain d’éviter d’intervenir dans certaines cités ? Une conversation avec un policier vous convaincra que c’est tout sauf un mythe. Pourtant, les Français veulent que l’Etat agisse contre la délinquance et le crime, qu’ils soient le fait de racailles en survêtement ou en col blanc.
Enfin, on peut regretter que le contribuable débourse chaque année 95 € pour le budget de la Justice et 341 € pour le budget de l’Intérieur, alors que la redevance audiovisuelle se monte à 137 €…
Que vous soyez attaché à la démocratie et à l’Etat de droit ou bien que vous souhaitiez l’avènement d’un « homme fort », n’oubliez jamais que l’Etat doit être un serviteur et non un maître. Le meilleur moyen pour s’en assurer est qu’il se concentre sur ses fonctions essentielles et vous laisse le plus libre possible.
4 commentaires
Oui enfin, il faut prendre en compte aussi les économies et les gains qu’apportent une politique sécuritaire
1/ Bon déroulement du commerce sur le territoire
2/ Bon déroulement du tourisme sur le territoire
3/ Economies effectuées à la sécurité sociale si les individus sont mieux protégés et blessés moins souvent
4/ Economies effectuées pareil qu’en 3/ mais sur la route.
5/ Economies effectuées sur les assurances si les vols et cambriolages diminuent
6/ Surtout la protection de la vie
Vous ne regardez que les coûts directs mais pas les gains et les économies indirectes qu’apportent nos agents de la sécurité
Pas évident qu’on soit plus avancé, car quand on refuse l’État des étatistes on récolte celui des financiers.
Regardez l’Europe…tout pour les banques et les lobbies.
@EchoGmt7
L’Etat des étatistes est celui des financiers. C’est pour cela qu’ils ont besoin de l’Etat omnipresent.
Bonjour,
De toutes façons Lty78, il n’y a pas d’État fort sans souveraineté monétaire.
Donc, les États de la zone euro sont des États faibles. Le cas de la Grèce nous a suffisamment démontré que, pour se goinfrer, les financiers n’ont pas besoin d’un État omniprésent.