Les pertes du marché obligataires sont saignantes… mais jusqu’à présent, tous ceux qui ont cru entrevoir la fin du grand marché haussier se sont trompés. Cette fois est-ce différent ?
« Avec 1 700 milliards de dollars, le marché obligataire a souffert de sa plus grosse perte mensuelle », c’est le titre d’une dépêche de Bloomberg d’hier soir. « Le marché obligataire haussier depuis trente ans semble vouloir finir dans un bang », continue le texte.
Bigre ! Bloomberg deviendrait-il un Cassandre propagateur de sombre pessimisme dans le monde doré et rose de la finance internationale ?
Sur deux mois, les obligations ont encaissé une perte de 2 800 milliards de dollars tandis que les rendements ont augmenté de 52 points depuis le plus bas de juillet dernier.
Peu de gens prêtent attention aux marchés obligataires. C’est un truc assommant, d’ailleurs rien que le mot « obligation » sent la corvée. Les obligations n’ont pas d’histoire, contrairement aux actions d’entreprise. Le jargon est obscur : rendement, maturité, sensibilité (si, si, ces petites choses seraient sensibles).
« Mais », me direz-vous, Ô lecteur sagace et averti par mon ennuyeuse prose passée, « il n’y a rien qu’un peu de quantitative easing ne puisse arranger. Les banques centrales rachètent les obligations et hop, le tour est joué, plus de marché baissier, vapeur renversée. »
La vie n’est plus une maladie mortelle ! |
Tous les baissiers du marché obligataire se sont fait déchirer par les banques centrales. Ils sont terrés dans leurs bunkers, où ils lèchent leurs plaies. Ils contemplent tristement la poussière qui tombe sur leur or et leur réserve d’eau fraîche qui baisse. Quant à l’amour, le deuxième ingrédient d’une vie qui vaut la peine d’être vécue, ils n’en ont plus eu depuis si longtemps qu’ils ont oublié ce que c’était…
Alors que l’argent ne soit plus gratuit et devienne plus cher, est-ce possible ? Est-ce croyable ? Que le créditisme ait une fin ?
Voici l’allure des rendements du 10 ans américain.
Et le marché obligataire en euro, celui qui nous intéresse à quelques jours du référendum italien ? Les rendements des emprunts italiens baissent à nouveau depuis que Mario Draghi a indiqué qu’il rachèterait tout.
Dans une récente tribune, « Le sauvetage secret de l’Europe« , Hans Werner Sinn, professeur d’économie à l’université de Munich, indique que le reste de l’Europe doit à l’Allemagne et au Pays-Bas 819 milliards d’euros (ce sont les comptes de Target – le système obscur de compensation entre banques centrales nationales de la Zone euro).
Cette dette a augmenté de 180 milliards d’euros depuis le début de l’année. Soit 20 milliards d’euros par mois
Les négociations européennes sur les « transferts fiscaux » commenceront en 2018.
Les transferts fiscaux à l’échelle nationale consistent, par exemple, à faire payer les contribuables de l’Italie du Nord pour soutenir l’Italie du Sud, à faire payer les Français pour la Corse, certains départements d’Outre-Mer, etc.
Des compatriotes partageant la même langue, le même drapeau, les mêmes mythes nationaux, la même gastronomie,… acceptent de s’entraider.
Les contribuables allemands et hollandais accepteront-ils de payer 20 milliards d’euros par mois, soit 8% de leur PIB, de « transferts sociaux » pour que l’Europe du sud (Espagne, Grèce, Portugal, Italie) garde son train de vie et puisse continuer à dépenser toujours plus ? Des bons souvenirs de vacances au soleil suffisent-ils à justifier un tel effort ?
J’en doute.
[NDLR : Les jours de l’euro sous sa forme actuelle sont comptés si les rendements montent en dehors de la Zone euro. Il n’y aura plus que la BCE comme acheteur des emprunts européens et la fuite devant la monnaie commencera. Votre banque résistera-t-elle, votre assurance-vie est-elle menacée ? Pour connaître les réponses et les solutions préparer votre patrimoine à encaisser le choc, c’est ici.]
Hans Werner Sinn pense cependant que les gouvernements de l’Allemagne et des Pays-Bas accepteront l’union fiscale, tout simplement parce qu’ils ne peuvent pas dévoiler l’ampleur des pertes passées qu’il faudrait autrement assumer.
Je n’en suis pas aussi sûre que lui…