▪ Le CAC 40 teste 4 089 puis retombe vers 4 065… C’est décevant pour qui s’attendait à un test des 4 100 avant la publication des chiffres de l’emploi vendredi. Rien de grave à signaler, cependant, puisque nous assistons à la seconde meilleure clôture de la bourse de Paris depuis septembre 2008. Petit lot de consolation supplémentaire, le zénith annuel de la mi-janvier 2010 a été battu… d’un point très exactement (soit de 0,0025%), ce qui maintient l’indice dans sa tendance positive.
De manière plus objective, le « record » inscrit hier matin n’est que de l’épaisseur du trait. Voici en réalité un troisième test de la zone des 4 080 qui survient sur fond de plafonnement des indices américains sous des résistances majeures moyen terme. Selon nous, ça passe ou ça casse.
Vendredi dernier, les chartistes ont eu le sentiment que ça cassait… mais l’entame du mois de février s’est effectuée sur des chapeaux de roue. Les investisseurs ont semblé découvrir que leurs tiroirs s’étaient remplis d’argent frais au cours du week-end — ce qui est effectivement un peu le cas, grâce à la Fed.
▪ Pendant qu’ils faisaient le décompte de ces nouvelles liquidités, ils n’étaient plus occupés à tenter de décrypter le fil d’actualité qui rendait compte de la reprise des violences dans le centre du Caire. Cette fois-ci, les affrontements ne se faisaient plus avec la police, mais entre égyptiens pro- ou anti-Moubarak (lequel refuse de renoncer au pouvoir avant les élections de l’automne prochain).
Et si l’Egypte sombrait dans le chaos, les élections prévues pourraient-elles se tenir conformément au calendrier prévu ? Voilà le genre de question que le marché s’empresse de ne pas se poser. Et qui se soucie de la façon dont s’opère la transition en Tunisie ?
Le pays demeure privé de véritable gouvernement civil, c’est l’armée qui veille au grain. La machine économique, privée de touristes, reste au point mort depuis presque un mois. Et les investisseurs ont-ils bien capté la nature de l’étincelle qui avait déclenché l’incendie ?
Le terrain économique était certes desséché par des années de corruption et d’autocratie, le chômage de masse d’un côté et les prébendes de l’autre faisant office de maquis de broussailles et de bois mort prêt à s’enflammer… mais il fallait bien que le feu jaillisse de quelque part.
Les marchés semblent éprouver beaucoup de difficultés à établir un lien entre les émeutes dans les pays du pourtour méditerranéen et l’envol du prix des aliments.
▪ Pour beaucoup d’investisseurs, les évènements qui s’enchaînent ne sont que la traduction d’une aspiration à plus de démocratie. Ils ne songent pas spontanément à un signe de révolte basique contre la cherté des denrées de base et des carburants.
Même la Commission européenne commence à admettre, dans ses synthèses économiques, que la spéculation engendre un renchérissement artificiel des matières premières et des produits agricoles servant de support à des contrats à terme.
La Fed continue de se raccrocher à son indice PCE. Il exclut toutes les variables volatiles comme l’alimentation et l’énergie (parce qu’elles sont volatiles à la hausse) mais y maintient la téléphonie mobile et l’informatique qui sont également volatiles… mais uniquement à la baisse, et ce depuis 20 ans !
Le jour où la Fed aura éliminé toutes variables de calcul affichant une tendance haussière depuis la chute du Mur de Berlin, l’inflation sera définitivement vaincue !
Dans un pays actuellement en révolte contre la vie chère, les statisticiens qui concoctent le baromètre en plâtre (nous l’avons déjà désigné ainsi mais l’image colle tellement bien à la réalité) de la Fed seraient déjà en fuite pour l’Arabie Saoudite !
▪ En ce qui concerne le chômage réel, Wall Street se fie à une calculette en guimauve où certaines touches s’écrasent sous la pression sans qu’aucun chiffre n’apparaisse à l’écran. Les chômeurs en fin de droit, pfuitt, envolés ! Les demandeurs ayant renoncé à pointer toutes les semaines, plouf, plouf, comptés pour zéro ! La masse salariale qui n’augmente pas, c’est comme si on tapait sur « +/-« .
Une fois éliminées toutes les personnes qui respirent encore mais qui ne touchent aucun salaire dans la plus grande furtivité statistique, l’économie américaine donne l’impression de créer des emplois.
De nouvelles données sur l’emploi américain viennent d’être publiées ce mercredi mais elles n’ont guère suscité de réactions : l’enquête mensuelle du cabinet ADP indique 187 000 créations de postes salariés dans le secteur privé alors que les économistes anticipaient en moyenne 150 000.
Les signaux favorables se multiplient concernant la reprise économique aux Etats-Unis — ISM manufacturier publié mardi, indice de confiance en hausse — mais l’emploi reste pour l’instant le meilleur argument de la Fed en faveur de la poursuite du « QE2 ». Sauf que c’est tellement pire que ce qu’elle prétend !
Les chiffres qui seront publiés vendredi refléteront probablement une embellie sur le front de l’emploi. La calculette à clavier en guimauve nous épargnera de voir le taux de chômage repasser la barre des 10%. Il y a peu de chance qu’une inversion de tendance provienne des statistiques de la fin de la semaine.
▪ Peut-être faut il continuer de surveiller les convulsions qui agitent l’Egypte mais les images diffusées en direct depuis Le Caire n’ont nullement impressionné Wall Street ce mercredi. Elles étaient pourtant au moins aussi violentes et même beaucoup plus spectaculaires que vendredi (charges à dos de chameaux, bastonnades, lacrymogènes, tirs de semonce… enfin, on espère).
Les indices américains ont terminé la journée sans direction, sur des scores parfaitement anodins. Le S&P s’effrite de 0,27% mais préserve les 1 300 ; le Dow Jones grappille 0,02% in extremis — il est ressorti du rouge à 21h59.
Au beau milieu de cette apparente banalité, il y a pourtant un élément qui nous laisse bouche bée : le soudain effondrement de la volatilité sur les cinq principaux indices américains (les trois « classiques » plus le Dow Transport et le Russell 2000), avec une amplitude de variation intraday qui ne dépasse pas les 0,5% en valeur absolue.
Le Nasdaq (-0,06%) se stabilise autour de 2 750 points : 2 744 au plus bas, 2 758 points au plus haut. Il s’avère incapable de renouer avec les 2 760 points testés le 27 janvier.
Si l’on fait abstraction du trou d’air de vendredi, le Nasdaq aura passé la moitié du temps à plafonner sous 2 755 points au cours des cinq dernières séances. C’est plutôt étrange, ne trouvez-vous pas ?
▪ Nous ne savons pas trop ce que ce calme digne du « pot au noir » équatorial signifie pour les actions. Si vous recherchez de la volatilité, toutefois, vous en retrouvez là où il ne faudrait pas… c’est-à-dire sur le front obligataire.
Le rendement du bon du Trésor US 2020 a progressé à 3,49% contre 3,445% la veille (il était alors déjà en progression de quatre points). Celui du 30 ans s’est envolé au-dessus de la barre des 4,60% pour s’inscrire à 4,640% (contre 4,61% mardi).
C’est exactement le seuil technique à partir duquel nous estimons que tout peut basculer à moyen terme !