▪ Devinez ce qui s’est passé hier ?
Rien du tout.
Les investisseurs retiennent leur souffle. Pourquoi ? Parce que Ben Bernanke devrait entrer dans l’histoire aujourd’hui. Tout le monde est accroché au rebord de son fauteuil, à se demander quel genre d’histoire ce sera.
"Un assouplissement enchanté", c’est ainsi que le décrit le Financial Times.
Le Financial Times est d’avis que les derniers chiffres sur la croissance trimestrielle américaine — 2% — sont simplement insuffisants.
"La reprise américaine reste paresseuse", titrait le journal. "Le nouvel assouplissement quantitatif est tout décidé".
Le problème, avec une croissance à 2%, c’est qu’elle ne suffit pas à faire grimper l’emploi. L’économie américaine doit créer environ 50 000 emplois par mois simplement pour tenir le rythme de la croissance démographique. C’est à peu près ce que permet une croissance de 2%.
Mais quand on a déjà un taux de chômage qui frôle les 10%, il faut faire mieux. Rester à flot ne suffit pas ; il faut vivre avec des millions de personnes sans emplois. Elles doivent être logées, nourries et soignées. On se retrouve donc avec une économie qui s’appauvrit en réalité.
▪ Oui, ça fait partie du problème. Etant donné la manière dont l’économie est organisée, le secteur privé doit soutenir une grande partie du secteur public… une partie qui se fait chaque jour plus lourde. Si la croissance est paresseuse, toute l’économie recule, même avec des chiffres positifs pour la croissance du PIB. Sans vraie croissance, les autorités ne récoltent pas grand’chose en termes d’impôts… et accumulent de gigantesques déficits. Cela augmente la dette pesant sur les quelques personne qui en portent toute la charge — les gens qui travaillent dans le secteur privé, à des activités non-zombies et produisant de la richesse.
Et voilà qui va vous choquer : le niveau de dette par travailleur du secteur privé américain va quasiment doubler entre 2007 et 2015. Oui, selon une nouvelle étude faite par un ancien économiste du FMI, les niveaux de dette grimpent en flèche — dans les pays "riches". Ils grimpent particulièrement vite aux Etats-Unis, qui passeront du 11ème rang, en termes de charge de dette par employé du secteur privé, en 2007 au troisième rang d’ici 2015.
Que se passe-t-il ? Les baby-boomers prennent leur retraite. Ils font une transition majeure : ils étaient une source de financement, ils deviennent une source de dépenses. Au lieu de payer les factures, en d’autres termes, ils deviennent les gens pour qui les factures sont payées.
Conséquence : le travailleur moyen dans le privé US se retrouvera en 2015 avec 68 500 $ de dette gouvernementale à porter. On ne parle pas là du fossé budgétaire. C’est de la dette. De la dette soumise à des taux d’intérêt.
Elle n’inclut pas, par exemple, le passif lié aux retraites au niveau des différents états de l’Union… qui se monte à lui seul à plus de 5 000 milliards de dollars. Pas plus qu’elle ne tient compte des autres engagements et promesses non-provisionnées des gouvernements locaux et fédéraux — qui, selon Laurence Kotlikoff, dépassent les 200 000 milliards de dollars.
Sans croissance "robuste"… toutes ces dettes vont elles aussi s’effondrer sur les autorités… et tout le reste du monde.
Ce qui nous ramène à ce pauvre Bernanke. Il est tellement sous les feux de la rampe, ces derniers temps, qu’il doit commencer à bronzer.
"La Fed sur le point de prendre ses décisions les plus importantes depuis des décennies", titre un autre article du Financial Times.
"Etant donné les objectifs du comité, il semblerait, toutes choses étant égales par ailleurs, qu’il faille prendre des mesures supplémentaires", déclarait Ben Bernanke lui-même il y a quelques semaines.
Il va donc passer à l’action. Combien ? Probablement sans limite. Quand ? Probablement tout de suite. Degré d’efficacité ? Houlà… vous en demandez trop, cher lecteur.
Mais bon, nous allons mordre à l’hameçon. Quelle sera l’efficacité des nouvelles impressions de monnaie faites par la Fed ?
Ce sera un échec total. Un désastre.