Comme prévu et à quelques heures de la fin du compte à rebours fatidique — qui n’a jamais existé que sous sa forme littéraire — voilà que survient le happy end !
La planète est sauvée : pas de défaut du gouvernement américain, pas de Lehman puissance 10 en vue.
Embrassons les pieds des membres du Congrès pour nous avoir évité le cataclysme absolu. Nous avons frôlé de peu l’Armageddon financier auprès duquel septembre 2008 serait passé pour une aimable péripétie.
Mais la réalité, c’est que personne n’a jamais cru au scénario catastrophe et la confiance de Wall Street ne s’est jamais vraiment démentie depuis 15 jours. Le communiqué de 18h15 mercredi soir leur a donné raison.
Il indique que les sénateurs ont convenu d’un accord qui assure le financement de l’Etat jusqu’au 15 janvier tandis que le plafond de la dette serait relevé jusqu’au 7 février.
▪ Reculer, pour mieux sauter ?
C’est 100% conforme à la rumeur qui circulait depuis vendredi… Rappelons que cette solution avait été rejetée parce qu’elle ne réglait rien sur le fond.
Eh bien, tant pis pour le « fond ». Dans trois mois, les Etats-Unis vont retomber dans les mêmes turpitudes parlementaires qu’en cette mi-octobre. Le Tea Party aura certainement eu tout le temps de peaufiner de nouvelles chausse-trappes susceptibles de pourrir le second mandat de Barack Obama.
Le budget 2014 devra être ficelé d’ici le 13 décembre : la foire d’empoigne au sujet de la fiscalité et d’Obamacare a encore de beaux jours devant elle.
Les marchés semblent estimer que tout est bien qui finit bien. Cependant, il reste à faire adopter par la Chambre des représentants un « arrangement » qui n’arrange aucune des formations politiques.
Mais ce qui importait, c’était de soulager les marchés — et accessoirement le million de fonctionnaires qui ne touche plus aucun salaire depuis 17 jours.
Personne ne semble penser que ces 17 jours de psychodrame ne laisseront pas d’autre trace qu’un petit mauvais souvenir un peu agaçant.
▪ Les marchés soulagés par le compromis…
Les marchés américains ont salué sans excès de ferveur le compromis de 18h15. Ils se sont même légèrement tassés après le communiqué officiel et ce, jusque vers 21h45 (+1% en moyenne), avant de repartir de l’avant pour finir la séance au plus haut — un grand classique.
Le Dow Jones a pris 1,36%, le S&P 1,4% et le Nasdaq 1,2%. Ce dernier s’offre au passage un nouveau plus haut depuis 12 ans à 3 840 points) Enfin, le Russel 2000 a pulvérisé un record historique avec 1,2% à 1 092,5 points.
Le VIX — l’indice du stress — a connu une détente spectaculaire de 21%. Notons cependant que ce mercredi coïncidait également avec un changement d’échéance mensuelle. Il ne serait pas étonnant que des institutionnels se soient mis massivement vendeurs — sans prendre grand risque vu l’actualité — pour envoyer un signal positif et provoquer une clôture des actions au zénith.
▪… mais quelque peu plombés par certains résultats
Bien essayé, mais cela n’a fonctionné que quelques minutes, le temps de découvrir les résultats trimestriels d’IBM (publiés peu après 22h). La société affiche un chiffre d’affaires en baisse de 4% et rate le consensus (à 23,7 milliards de dollars contre 24,75 milliards de dollars attendus).
Idem pour LVMH quelques heures plus tôt. La contre-performance du troisième trimestre est imputable aux marchés émergents — ces derniers demeurent pourtant dans l’inconscient collectif des gérants les locomotives de la croissance mondiale.
De façon assez surprenante, les opérateurs ont zappé le bénéfice ressorti supérieur aux estimations (+6% à quatre milliards de dollars, soit 3,99$ par action) ; nous parions que les véritables attentes étaient au-delà des 4$/titre.
Tout l’enjeu des prochaines heures et des prochains jours va consister justement à évaluer ce que sont les véritables attentes des marchés.
Plus cyniquement, nous parions que les sherpas attendent simplement de déterminer de quelle manière ils pourront sortir le maximum de papier tandis que la fin du feuilleton shutdown masquera pour quelques heures encore la prolifération des profit warnings.
Nous assisterons probablement à des résultats moins pires que prévus mais qui confirment un troisième trimestre de dégradation des marges, des chiffres d’affaires et des optimisations des moyens de production. Derrière cette ronflante appellation se cache en réalité des vagues de licenciements sous la pression d’actionnaires qui exigent des rendements intenables.