▪ Le CAC 40 évoluait dans le rouge vers 11h mercredi matin. Il gagnait 0,5% vers 15h et a finalement terminé en hausse de 1,9% à 3 691 points.
Entre temps, aucune statistique positive n’a été publiée en Europe. Par ailleurs, la hausse des promesses d’achats de logements neufs aux Etats-Unis a été largement compensée par une rechute de 5,3% des commandes de biens durables.
Vers 17h25, le CAC 40 gagnait pratiquement 2%. Une véritable aubaine saluée par de brillants esprits qui invoquaient un soudain retour de « l’appétit pour le risque »… aussi prévisible que le retour des fortes fièvres pour une victime du paludisme ?
Cette explication nous paraissant un peu courte, nous sommes allés chercher quelques pistes sur les médias anglo-saxons. Les commentateurs y vantaient les bienfaits de la poursuite de la politique d’impression massive de fausse monnaie jusqu’à l’amélioration des chiffres du chômage (2018 ou 2020 ?), ainsi que la volonté de Ben Bernanke de sortir du quantitative easing en douceur.
Il ne dit rien de différent de ce qu’il avait expliqué la veille. Le maintien coûte que coûte du QE illimité — malgré un débat au sein de la Fed — c’est exactement ce à quoi les marchés s’attendent depuis des mois. Y a-t-il seulement 5% d’opérateurs qui pensent que la Fed pourrait cesser ses rachats brutalement et sans préparer les marchés à une extinction progressive du QE ?
Les marchés se cherchaient manifestement un prétexte pour rebondir après deux séances de grande nervosité.
▪ Tous les voyants sont au vert… mais pourquoi ?
A Wall Street, les pertes n’ont pas dépassé les 1,5% lundi soir. Elles étaient déjà effacées dès la première heure de cotation avec un Dow Jones qui gagnait 1% (à 14 040, et 14 100 points vers 21h30) et un Nasdaq qui grimpait de 1,2% à 3 170 points au moment de la clôture des places européennes.
Nous pourrions effectivement comprendre la joie de Wall Street d’entendre Ben Bernanke affirmer qu’il ne détecte ni bulle d’actifs ni guerre des devises (il ne détectait pas non plus de risque pour le système bancaire américain en juillet 2008…). En revanche, nous sommes totalement incapables d’expliquer la flambée de 3% du Dow Transport, qui a testé les 6 000 points pour la deuxième fois de son histoire : aucune statistique publiée hier aux Etats-Unis n’expliquait un tel score fleuve.
A Paris, la fin de séance de mercredi s’est caractérisée par un véritable emballement haussier de 1,9%. Cela alors que l’imbroglio italien n’est en rien résolu, tandis que la dégradation de la conjoncture en Europe (notamment l’aggravation du chômage et le plongeon de la consommation en Allemagne et en Italie) ne justifie en rien un gain de 1,6% sur l’Euro-Stoxx 50.
Une nouvelle fois, les robots se sont « grimpé les uns sur les autres » avec le déclenchement (complètement spontané ?) d’un stop-achat technique au-dessus des 3 660 points. A 3 691,5 points, le CAC 40 revient très exactement à mi-chemin entre son plancher annuel retracé le 26 février au matin et son plus haut annuel retracé lundi à 3 787 points.
Cette remontée inespérée tombe au meilleur moment puisque le mois de février s’achève aujourd’hui. Encore un petit effort de +1%… et le CAC 40 affichera un score positif par rapport au 31 janvier. Il signerait ainsi un huitième mois positif sur une série de neuf et un cinquième mois consécutif de hausse.
Tous les voyants boursiers semblaient repassés au vert mercredi soir. Pourtant, nous aimerions bien connaître sur quel compromis travaille le Congrès US pour réduire l’endettement des Etats-Unis et écarter les coupes budgétaires automatiques d’ici demain soir.
▪ Course contre la montre et démineurs
Par ailleurs, nous avons du mal à qualifier le refinancement de l’Italie hier matin à 4,83% (contre 4,17% fin janvier) de « succès ». Certes, la demande était au rendez-vous — essentiellement domestique, il faut le souligner — mais si la situation perdure, les agences de notation pourraient sortir de la neutralité qu’elles prétendent observer depuis lundi.
L’imbroglio politique en Italie pourrait s’avérer très gênant pour la BCE dans le cas où elle serait pressée d’intervenir. L’absence de suivi du programme d’austérité mise en place par Mario Monti interdirait en effet le recours aux OMT (outright monetary transactions) pour racheter de la dette italienne : les rachats de dettes sont subordonnés à la stricte application de mesures de rigueur correspondant aux exigences de Berlin, celles-là même que la population italienne rejette à plus de 60%.
Ben Bernanke une fois encore joue les démineurs : si l’Italie capote, les banques américaines auront les moyens d’y faire face… Sous-entendu : pour celles qui seraient en difficulté, je double la vitesse des rotatives et j’imprime plus vite que mon ombre.
Pour résumer cette folle semaine, admirons comment la Fed a tenu en haleine les marchés (et surtout plumé les « suiveurs ») avec sa magistrale interprétation du gentil et du méchant policier.
Richard Fisher évoque les dissensions au sein de la Fed au sujet de la poursuite du QE3 et les marchés plongent. Ben Bernanke se présente trois séances plus tard devant les caméras avec son air florentin (et tellement content de lui-même qu’il a du mal à le dissimuler) pour confirmer qu’il n’a jamais été question d’infliger le moindre sevrage à Wall Street et que la morphine monétaire va continuer de couler à jet continu, même si le collège des anesthésistes n’est pas d’accord sur la couleur de la seringue. Et il va continuer jusqu’à ce que les artères du marché explosent ou que son cortex se mette en rideau.
Nous connaissons pas mal d’internautes qui aimerait qu’une voix familière s’élève pour dénoncer ces manipulations grotesques et répéter une fois encore avec force « indignez-vous ! »