▪ Les permabulls ne se sentaient plus de joie vendredi dernier : après trois annonces spectaculaires des banques centrales (BCE le 6 septembre, Fed le 13, Banque du Japon le 19), les marchés n’ont pas reperdu un pouce de terrain. C’est surtout vrai du S&P, du Nasdaq, de l’Ibex et du DAX 30. Ce dernier a pulvérisé un nouveau zénith annuel à 7 465 points (+26% depuis le 1er janvier).
Contempler les marchés en lévitation alors que les indicateurs d’activité économiques coulent à pic et que les plus grands groupes industriels allemands réduisent leurs estimations de bénéfices ne donne pas le vertige aux éternels optimistes : les banques centrales veillent et rien de fâcheux ne saurait survenir.
Le yen n’a reculé que l’espace de huit heures d’horloge après l’annonce d’assouplissement quantitatif de 100 milliards de yens mercredi matin. Cela n’alerte pas davantage les permabulls.
Rien ne les fera douter de l’inexorabilité de la hausse des actions !
Les effets d’annonce concernant les QE ont soutenu les marchés durant des mois en 2009… des semaines en 2010… des jours début 2012 (souvenez-vous du lancement du second LTRO de la BCE fin février puis de la correction des indices dès la mi-mars).
Ils n’agissent plus désormais que l’espace de quelques heures cet automne. La Banque centrale du Japon vient d’en faire la cuisante expérience en milieu de semaine : la Bourse de Tokyo aura retenu ses gains moins de 24 heures.
▪ Gesticulations chinoises et marchés européens en queue de peloton
Les investisseurs sont toutefois rassurés par le peu de conséquences boursières des tensions sino-nipponnes. Ces dernières semblent surtout relever de manoeuvres de diversion orchestrées par Pékin ; il semble en effet y avoir un peu de flottement au sommet du Parti au moment de régler les derniers détails de la succession de Hu Jintao après 10 ans de pouvoir.
Les gesticulations diplomatiques chinoises ont été vite mises de côté. La semaine écoulée a été surtout marquée par un nouvel arbitrage des places européennes au profit de Wall Street, les indices américains étant maintenus coûte que coûte au contact des sommets annuels.
Après quatre séances de consolidation, les actions cotées sur le Vieux Continent ont salué la journée des « Quatre sorcières » par une progression moyenne de 0,9% qui permet d’effacer la quasi-totalité du terrain perdu au cours des séances précédentes.
Paris n’a repris que 0,6% vendredi : le CAC 40 restait en queue de peloton avec un score hebdomadaire de -1,4% et un bilan en demi-teinte sur le mois écoulé (+0,5% seulement). Vers midi vendredi, le bilan des cinq dernières semaines était tout simplement nul puisque l’indice hexagonal avait rétrogradé vers 3 505 points (-0,1%)… avant de reprendre 1% en ligne droite jusque vers 3 540 points environ (cela n’a pas suffi pour combler le gap des 3 553 points).
Lorsque l’on remet le CAC 40 en perspective sur les quatre dernières semaines écoulées, il devient difficile de partager le sentiment unanimement haussier des éditorialistes dans les principaux médias généralistes et financiers.
Le marché parisien a été soutenu la semaine passée par les défensives : Essilor et Air Liquide ont pris 1,6%, Danone 2%, Sanofi et Sodexho 2,7%, Legrand 3%.
Les acheteurs ne se sont donc pas précipités sur les dossiers les plus risqués, bien au contraire ! Les gérants ont vendu les « télécom » avec Bouygues (-4,3%) et France Télécom (-7,6%) puis des cycliques comme Schneider (-7%) ou Peugeot (-7,7% avec sa sortie du CAC40 ce lundi), puis Vallourec, Veolia et Renault (-4,5% en moyenne).
▪ Les marchés américains dirigés par la technique
Wall Street avait ouvert vendredi en progression de 0,35%. Cela suffit aux indices américains pour retracer leurs records annuels… au meilleur moment puisque l’échéance septembre a été compensée au plus haut de l’année 2012.
Les indices US ont en revanche clôturé sur des écarts insignifiants. Ils sont demeurés prisonniers durant six séances consécutives d’une « camisole algorithmique » qui avait pour vocation de permettre aux institutionnels de gagner des fortunes sur des stratégies d’écrasement de la volatilité et d’épuisement de la valeur temps.
Ce genre de facteurs purement techniques l’emporte largement sur des considérations fondamentales et surtout des paris directionnels sur la santé de l’économie à 12 ou 18 mois. Les manipulateurs de volatilité n’ont comme seul souci que de protéger leurs gains sur des échéances courtes et totalement prédéterminées. Le reste n’est que littérature.
La fameuse séance cruciale des « Quatre sorcières » s’est donc achevée sans surprise par… une absence totale de tendance et de volatilité (le S&P recule de 0,01% après -0,05% la veille), ce qui était à l’évidence le but recherché depuis une semaine.
Le VIX a été ramené au contact du plancher historique, vers 13,9. Ce niveau est identique à celui atteint cinq ans auparavant lors de l’inscription des précédents records absolus du Dow Jones et du S&P 500 fin octobre.
La stratégie du moment ne consistait pas à retracer les sommets mais à faire en sorte que Wall Street n’aille nulle part… Cela a été également le cas pour le super-géant Apple qui finit absolument stable à 700 $ — la mise en vente physique de l’iPhone 5 se solde par un non-événement malgré le buzz médiatique et la longueur record des files d’attente.
Le marché demeure plutôt « technique », avouent du bout des lèvres ceux qui feignent de ne pas voir ce qui s’impose comme une évidence : le marché n’est plus le reflet d’aucune réalité économique ni de la moindre anticipation conjoncturelle.
▪ Les robots encore aux commandes
La seule fonction qui reste aux marchés consiste à extraire des gains de très court terme via des stratégies impliquant une gestion millimétrée de la volatilité et une maîtrise totale des paramètres techniques qui orientent les indices boursiers (principe illustré par « la queue qui remue le chien »).
Ceci de façon à exploiter les réflexes pavloviens des milliers de robots-traders dotés de programmes d’analyse chartiste plus basiques que ceux des supercalculateurs quantiques opérant et arbitrant à la milliseconde — développés par les établissements financiers et hedge funds les plus « innovants ».
Dans ces conditions, les variations découlant des fondamentaux ou de l’actualité des entreprises ne représentent que l’écume des vagues boursières… lesquelles peuvent soudain se figer comme un groupe d’enfants jouant à « 1-2-3 soleil ». Le maître du jeu est celui ou celle qui tient le sifflet… et les marchés sont convaincus que ce sont les banques centrales.
Pour notre part, nous soupçonnons que quelques acteurs encore plus puissants leur dictent leurs quatre volontés dans une oreillette… et ceux-là se fichent totalement que la Fed ou la BCE parviennent à relancer l’économie ou à faire reculer le chômage.
2 commentaires
Voilà déjà quelques jours que je n’avais pas lu vos feuilles de chou.
Mais soyez rassuré, vous trouvez et expliquez toujours la tenue des marchés par les mêmes phénomènes !!!
Les manipulateurs tiennent les indices, les marchés sont sous l’emprise des camisoles algorithmiques, et c’est la queue qui remue le chien …. Soit dit au passage, il y a un petit bout de temps que vous nous aviez pas encore ressorti cette théorie.
Monsieur BEchade, pourriez vous essayez de vous adapter à ce nouvel environnement. Celui qui fait que le trading se fait à la nano seconde par des algorithmes. L’époque à évoluée depuis le temps où l’on passait ses ordres à la corbeille, et où après la séance on allait déjeuner au Vaudeville.
Essayez un peu de vous remettre en cause, de changer votre raisonnement intellectuel. Sinon il devient très lassant de vous lire. Tous les jours, quand vos articles résumant la séance, apparaissent sous la signature CF dans les pages de Boursorama, même si vous avancez masqué, on y reconnaît votre grosse patte. Et inéluctablement, comme un plat réchauffé de la veille, vous nous servez les mêmes plats. Variez un peu la carte de votre menu, car depuis bien longtemps déjà on est lassé de votre cuisine.
Monsieur,
Vous appartenez probablement à cette catégorie de personne qui s’adapte à tout et ne voit le mal nulle part… ni dans la déconnexion des marchés par rapport au « monde réel » qui a débouché sur la ruine du système financier.
Elle fut heureusement évitée par la nationalisation des pertes des banques, laquelle a engendré un effondrement de la croissance en Europe et une explosion de la pauvreté, mais également des indices boursiers… ce qui tombe sous le sens !
J’imagine sans peine que vous observez sans sourciller le « S&P » rester prisonnier durant 7 jours d’un corridor de fluctuation d’une dizaine de points qui n’enrichit que les vendeurs de « volat »… mais sans doute êtes vous suffisamment richissime pour en faire partie ?
Le recul du Dow Jones à 15 reprises le lundi (sur une série de 16) n’éveille certainement aucun soupçon de manipulation des marchés. Une telle hypothèse dénote de ma part une inclination envers la « théorie du complot ».
Vous semblez approuver sans réserve le « trading algorithmique à la nanoseconde » : nous espérons que votre « robot » personnel met la pâtée à ceux de Goldman Sachs et de quelques hedge funds qui manipulent les futures à loisir aux heures creuses.
Puisque de tels marchés truqués — qui s’imposent comme la négation du concept de « l’utilité sociale » — vous conviennent, c’est qu’ils doivent vous rendre riche (au détriment des loosers qui n’ont rien compris aux temps modernes) et procurer directement ou indirectement de bons emplois à tous vos proches et à vos amis.
Si tel n’est pas le cas… alors vos critiques sont absurdes !
Comme cela, je me sentirai moins seul dans ma dénonciation « absurde » de marchés qui n’enrichissent que des manipulateurs sans scrupules… et certains de leur impunité face à l’impuissance des autorités boursières.
Lisez attentivement ma chronique du jour… je l’avais rédigée lundi avant de prendre connaissance de votre e-mail. Elle est quasiment prémonitoire !
Cordialement,
PhB