** "Le célèbre mot qui commence par D est de retour", annonçait le Financial Times hier. "La déflation pourrait-elle être le prochain gros choc du système financier ?"
* Mais où était le Financial Times ces derniers temps ? Le monde n’a jamais vécu pire déflation. Les bourses mondiales ont perdu près de 10 000 milliards de dollars. L’immobilier américain a perdu près de 5 000 milliards de dollars. Le pétrole a chuté de moitié par rapport à son record. L’or est lui aussi en baisse. Bear Stearns est proche de zéro.
* Même le marché obligataire commence à subir la déflation. Les rendements augmentent, jusqu’à 3,97% pour les bons du Trésor US à 10 ans.
* Par rapport à l’année dernière à la même date, la bourse américaine — selon les chiffres du S&P 500 — a perdu 35%. Cela signifie que les détenteurs d’actions américains ont à eux seuls perdu 5 000 milliards de dollars. Et l’une de nos maisons aux Etats-Unis a chuté tellement bas qu’elle est carrément sous terre ; le niveau d’hypothèque est plus haut que la valeur de la maison.
* Le Financial Times doit parler du prix des produits de consommation. Ce qu’on paie pour le lait et l’essence. Ces prix-là ne baissent pas encore. Mais ils n’augmentent pas très vite non plus.
* Le taux d’inflation américain semble avoir atteint son niveau record à près de 5,5% et commence à redescendre. En Europe, le taux a atteint les 4%. Celui-ci commence aussi à redescendre. Et partout où vous regardez, les baisses de prix font leur apparition. Les panneaux "soldes" apparaissent dans les vitrines. On peut voir des publicités pour des billets d’avion à bas prix dans le métro de Paris. Les prix scandés dans les salles de ventes sont, selon un informateur bien renseigné, bien plus doux qu’il y a six mois.
* Une chose qui sombre réellement au fin fond de l’océan, c’est le transport maritime. L’indice Baltic Dry mesure les coûts d’acheminement par bateau… et jauge la santé du commerce mondial. Les prix d’acheminement par voie de mer augmentent quand des commandes sont passées… et livrées. Quand le nombre de commandes baisse, l’indice baisse lui aussi. Eh bien, si l’on en croit l’indice, pas besoin d’appeler Messieurs Smoot et Hawley. Le commerce mondial s’écroule sans leur intervention.
** La déflation… Ça vous rappelle quelque chose, cher lecteur ?
* Le Japon, évidemment ! C’est la tendance que votre éditeur a vue venir 10 ans trop tôt : une chute à la japonaise.
* "Une crise longue et profonde pourrait soulever le spectre d’une déflation équivalente à celle qui a longtemps affecté l’économie japonaise", a déclaré l’un des membres de l’American Enterprise Institute.
* "Si les Etats-Unis devaient répéter l’expérience japonaise, nous pourrions nous attendre à ce que les actions retournent à leur niveau de 1995, avec un Dow Jones sous la barre des 4 000, et ce en 2012, au moment précis où les baby-boomers américains auront le plus besoin d’argent", annoncions-nous il y a de ça quelques années.
* Pendant ce temps, "les gouvernements du monde entier appuient de toutes leurs forces sur la pédale de frein pour tenter de sauver le système et faire qu’il continue de fonctionner à tout prix", affirme un stratégiste de Saxobank.
* Cette "pédale de frein" est la seule chose qui permet au dollar de valoir encore quelque chose : freiner sur les dépenses… freiner la remise en marche des planches à billet… freiner par instinct pour protéger l’intégrité du système financier mondial basé sur le dollar.
* Et où tout cela nous mène-t-il ?
* Peter Anderson, de RCM, nous a ôté les mots de la bouche :
* "Nous nous attendons à plus d’impôts, plus de réglementations, un gouvernement plus important et un déficit majeur. Le décor est ainsi planté pour une potentielle bulle de l’inflation qui pourrait atteindre des dimensions énormes, mais qui n’apparaîtra probablement pas avant au moins 2011-2012. C’est dans cet environnement que le dollar devrait cesser de chuter face à l’euro et au yen".
* La déflation maintenant. L’inflation plus tard. C’est ainsi que les choses devraient se passer. Chute des prix des actifs… puis chute des prix des produits de consommation… puis "l’argent des hélicoptères"… puis une augmentation des prix… puis la fin d’un système monétaire mondial basé sur le dollar US.
* Notre Transaction de la Décennie devait inclure les premières phases de tout ça — mais seulement une petite partie : la relation entre l’or et le prix des actions. En 1982, pendant une courte période, vous auriez pu acheter toutes les actions de l’indice Dow Jones pour une seule once d’or. Mais le temps que la bourse termine sa hausse épique, en janvier 2000, (pendant que l’or faisait une chute tout aussi épique !) il vous aurait fallu 44 onces d’or pour acheter le Dow Jones. Aujourd’hui, ce ratio a considérablement chuté. Il vous faut seulement 13 onces d’or pour acheter le Dow Jones. Et puisque les actions chutent, le ratio devrait tomber sous la barre des cinq… et peut-être même à un pour un (et à ce moment-là, n’oubliez pas qu’il sera temps de vendre l’or et d’acheter des actions).
* Quand nous regardons vers l’avenir, il nous semble que le côté "or" de la transaction devrait rester intéressant pendant encore 10 ans. Quand le dollar commencera à chanceler, l’or va s’envoler. Mais si M. Anderson a raison, la phase de déflation devrait prendre fin vers le début de la prochaine décennie. Pour l’instant, la devise est reine. Les dollars — et les bons du Trésor US — vous protègent des pertes sur les marchés des actifs. Mais ne vous attachez pas trop au billet vert. Tôt ou tard, le roi devra monter sur l’échafaud.
* Oui, cher lecteur, tout se passe comme prévu. Mais qui l’avait prévu ainsi ? Pas les consommateurs — qui pensaient avoir encore plus d’argent à dépenser. Pas les investisseurs ; ils se font écraser par les marchés. Pas Bernanke ou Paulson ; ils tentent désespérément de tout arrêter.
* Non, c’est la Nature qui l’avait prévu ainsi… une nature où les bulles éclatent toujours… où tout ce qui monte redescend… et où les gens n’ont jamais ce qu’ils attendent ou espèrent, mais ce qu’ils méritent.
* "La Nature dans sa sagesse, et Dieu dans Sa grâce", avions-nous écrit en 2003, "s’assurent que les gens récoltent ce qu’ils ont semé"…
* N’oubliez pas : une correction est égale et opposée à la tromperie qui la précède. Il y a quelques années, nous avions prédit que, d’après le niveau d’hallucination de masse dans les marchés en 2005 et 2006, la correction à venir serait énorme.
* Nous savons maintenant à quel point.