** "Eh bien, je suppose que c’est la fin de l’été", déclara Elizabeth tandis qu’elle nous disait au revoir à la gare. "Mais c’était un bel été pour tout le monde… on n’a pas à se plaindre".
* La gare est si petite que nous étions seuls sur le quai. Votre correspondant était le seul passager à monter dans le train. Quelques voyageurs somnolents se trouvaient déjà dans le wagon lorsque nous nous sommes assis. Aucun n’a levé la tête ou ouvert les yeux — et votre correspondant n’a pas tardé à sombrer lui aussi dans un petit sommeil ferroviaire.
* Dormir dans le train, c’est différent de dormir dans un lit. On n’est jamais complètement inconscient. Non, l’esprit rejoue les drames et les délices du passé récent… flottant entre les faits et l’imagination.
* Nous avons commencé à penser aux fêtes auxquelles nous avons assisté cet été… aux enfants et à leurs aventures… Nous avons imaginé que nous étions en train de peindre les volets (nous les avons tous terminés — une centaine environ !)… et nous avons pensé à la crise du crédit.
* Nous nous sommes rappelé nos propres mots (à un ami) :
* "Appeler ça une crise du crédit est sans doute trompeur. Ce n’est pas quelque chose qui se contente d’arriver — puis prend fin. C’est plus probablement le début d’une tendance. Les taux d’intérêt (réels et/ou nominaux) tendent à grimper et baisser en suivant de longs cycles qui durent environ une génération — entre 25 et 30 ans. Lorsqu’ils baissent, les gens empruntent plus librement, et la valeur du nantissement — les maisons, les entreprises et ainsi de suite — grimpe, ce qui leur permet d’emprunter encore plus. C’est la phase de boom d’une économie. Mais lorsque les taux grimpent, les prix des actifs tendent à baisser. Les prêteurs perdent donc de l’argent, parce que leur nantissement vaut moins qu’auparavant… et parce que les emprunteurs ne peuvent pas, ou ne veulent pas, rembourser les prêts. Naturellement, les financiers cessent de prêter si librement… et on obtient ce que les gens appellent une ‘crise du crédit’. Ce n’est que le début d’un krach".
* "La ‘crise du crédit’ disparaît des gros titres en quelques mois, mais les tendances de baisse des taux se poursuivent… pendant longtemps".
* "Bien entendu, il est difficile de le voir, parce qu’il y a les taux nominaux… et il y a les taux réels. En fait, c’est vraiment comme un champ de bataille, où il se passe tant de choses dans tant d’endroits différents qu’il est difficile de savoir qui gagne. Une période de hausse des taux d’intérêt réels est intrinsèquement déflationniste, ce qui signifie… du moins de la manière dont nous utilisons le terme… que les valeurs des actifs diminuent et que les gens ne sont pas aussi riches qu’autrefois. Et dans la mesure où les valeurs des actifs baissent, les entreprises cessent de se développer, des emplois sont supprimés et on finit généralement avec une récession ou un ralentissement. Mais on peut avoir de l’inflation — l’inflation des prix à la consommation — en même temps. C’est ce qui s’est produit dans les années 70. La chute des prix des actifs appauvrit les riches. La hausse des prix à la consommation appauvrit les pauvres. Bien entendu, ils peuvent aussi s’appauvrir simplement en dépensant plus d’argent. Il y a de nombreuses manières de se ruiner".
* Durant les années de boom, les Américains se sont ruinés en dépensant plus qu’ils n’avaient gagné. A présent, d’une manière ou d’une autre, ils doivent corriger l’erreur. Dépenser moins. Epargner plus. Travailler plus.
* Deux gros titres confirmaient notre théorie le week-end dernier :
* "Travailler plus longtemps : une tendance croissante pour les Américains", déclarait un article de l’Associated Press. L’âge moyen pour la retraite est de 63 ans aux Etats-Unis. Il va probablement grimper.
* "Epargner pour un premier versement, une nouvelle réalité", titrait un autre article dont nous avons oublié la source. Les prêteurs, inquiets de la chute de la valeur des nantissements, n’avanceront plus 100% de l’argent nécessaire pour acheter une maison. Quiconque veut acquérir une maison devrait apporter de l’argent de son côté.
* "Mais les cycles économiques sont très confus", avons-nous continué. "Voilà pourquoi tant d’économistes sont certifiés fous. Ils en perdent l’esprit".
* "Nous essayons de chercher la tendance majeure… et essayons de comprendre ce qui se passe réellement. Inutile d’essayer d’être trop précis. Le mieux qu’on puisse faire, c’est de comprendre, vaguement et imparfaitement, la direction fondamentale prise par l’économie. Ce que nous voulons dire, c’est que chaque jour est un nouveau jour… avec des mouvements de prix inattendus. Et il y a aussi des schémas plus larges. Le mieux qu’on puisse faire — ou peut-être est-ce le mieux que NOUS puissions faire — c’est d’essayer de voir où l’on se trouve selon ces schémas larges du comportement humain, qui semblent réapparaître tout au long de l’histoire. Si l’on regarde les choses selon cet angle, il nous semble que nous venons de vivre une expansion de crédit telle qu’on n’en voit qu’une fois par génération… suivie désormais par une contraction de crédit telle qu’on n’en voit qu’une fois par génération. Et cela signifie, plus généralement, une baisse des prix des actifs réels et des taux d’intérêt réels en hausse. Cela signifie aussi une diminution du niveau de vie".
** "Pourquoi est-ce que vous utilisez le nous de majesté quand vous écrivez ?" nous a récemment demandé un lecteur. "N’est-ce pas un peu prétentieux ?"
La réponse est oui. Mais c’est une prétention relativement innocente. En fait, nous ne savons pas vraiment pourquoi nous utilisons le "nous". Mais nous pouvons essayer de deviner. Nous avons une profession solitaire. Nous n’avons jamais rencontré de politicien pour lequel nous avions envie de voter — sinon des causes perdues comme notre ami Ron Paul. Nous n’avons jamais vu de file de gens à qui nous voulions nous joindre, ou de club où nous voulions nous inscrire. Et souvent, il semble que nous sommes seul à monter dans le train — que nous décrivions la fin de l’empire… la guerre contre la terreur… ou le déclin de l’économie américaine. Utiliser le "je" nous donne simplement une impression de solitude.