** Dans une crise du crédit, les prêts, les dépenses, les emprunts — tout se contracte. Les Japonais ont découvert que prêter de l’argent, même à taux zéro, ne suffit pas à ressusciter l’"instinct animal" d’une économie en plein boom. La déflation gagne, en d’autres termes.
* Mais cela n’empêche pas les banques centrales et les gouvernements de tenter leur chance. La semaine dernière, nous parlions d’un rapport de Bridgewater Associates selon lequel le credit crunch pourrait effacer 12 000 milliards de dollars de crédit dans toute l’économie. Les autorités essaieront de compenser cela par une combinaison de politiques budgétaires et monétaires. Malheureusement, la somme est trop élevée. Et elle ne tient pas compte des tendances naturelles des gens dans les périodes difficiles : ils attendent et ils épargnent. Si les Américains se transformaient soudain en Japonais, et commençaient à économiser leur argent à la manière des Japonais, cela enlèverait 1 000 milliards de dollars supplémentaires de l’économie de consommation chaque année.
* L’économie américaine va donc probablement traverser une zone de turbulences. Mais nous soulignons souvent que les Etats-Unis ne sont pas le Japon ; ils ne sont pas aussi sains. Et l’économie mondiale a changé de manière fondamentale ces 20 dernières années.
* Lorsque les Japonais ont essayé de stimuler leur économie avec des prêts à taux zéro, l’argent a souvent terminé dans des paris spéculatifs sur le marché américain dans les années 90… ou dans de nouvelles usines en Chine. Aujourd’hui, lorsque les autorités essaient de stimuler l’économie américaine, les spéculateurs se tournent vers le pétrole et les matières premières. Les prix grimpent, forçant les Américains à payer leurs importations plus cher… et augmentant les taux d’inflation à la consommation partout dans le monde. Résultat : l’inflation gagne aussi.
* Et le pauvre Américain s’en prend donc de tous les côtés. Il se fait battre par l’inflation… tandis que la déflation lui botte le train.
*** Ron Paul explique comment les Etats-Unis se sont retrouvés là :
* "Il y a eu plusieurs étapes. Depuis la création de la Réserve fédérale, en 1913, et jusqu’en 1933, la Banque centrale s’est établie en tant que gestionnaire officiel du dollar. En 1933, les Américains ne pouvaient plus détenir d’or, éliminant ainsi les contraintes qui empêchaient la Réserve fédérale de gonfler la masse monétaire pour la guerre et pour les programmes sociaux".
* "En 1945, d’autres contraintes avaient été éliminées grâce à la création du système monétaire de Bretton-Woods, faisant du dollar la devise de réserve mondiale. Ce système a duré jusqu’en 1971. Durant la période entre 1945 et 1971, certaines contraintes de la Fed sont restées en place. Les étrangers — mais pas les Américains — pouvaient convertir leurs dollars en or, à 35 $ l’once. A cause d’une création excessive de dollars, ce système a pris fin en 1971".
* "C’est le système post Bretton-Woods qui était responsable de la mondialisation de l’inflation et des marchés, et qui a généré une gigantesque bulle mondiale sur le dollar. Cette bulle est en train d’éclater, et nous voyons ce que c’est que de subir les conséquences des nombreuses erreurs économiques commises par le passé".
* "Ironiquement, ces 35 dernières années, nous avons profité de ce système plein de défauts. Dans la mesure où le monde acceptait les dollars comme s’il s’agissait d’or, il nous suffisait de contrefaire plus de dollars, de les dépenser à l’étranger (encourageant ainsi [les emplois américains] à passer eux aussi à l’étranger) et de profiter d’une prospérité non méritée. Ceux qui prenaient nos dollars et nous fournissaient des biens et des services n’étaient que trop pressés de nous re-prêter ces dollars. Cela nous a permis d’exporter notre inflation et de retarder les conséquences que nous commençons à voir".
* "Mais cela n’a jamais été destiné à durer, et à présent, nous devons payer la facture. Notre gigantesque dette étrangère doit être payée ou liquidée. Nos obligations arrivent au moment où le monde hésite de plus en plus à détenir des dollars. La conséquence de cette décision est l’inflation des prix [aux Etats-Unis] — et c’est ce à quoi nous assistons aujourd’hui. L’inflation des prix à l’étranger est plus élevée encore [qu’aux USA], conséquence de la volonté des banques centrales étrangères de monétariser notre dette".
* "Imprimer des dollars sur de longues période de temps ne fait peut-être pas immédiatement grimper les prix — mais cela finit toujours par arriver. A présent, nous voyons un rattrapage des anciennes augmentations de la masse monétaire. Aussi dures que soient les choses actuellement avec un carburant à 4 $ le gallon, ce n’est qu’un début. Ce n’est qu’une grossière distraction que de pousser à ‘forer, forer, forer’ comme solution à la crise du dollar et aux prix élevés du carburant. Laisser le marché augmenter l’offre et les forages, c’est très bien, mais ce n’est qu’une grossière distraction des péchés des déficits et des combines monétaires de la Réserve fédérale".
* "Cette bulle est différente, et plus grosse, pour une autre raison. Les banques centrales collaborent secrètement pour mettre en place une planification centrale de l’économie mondiale. Je suis convaincu que des accords entre banques centrales destinés à ‘monétariser’ la dette US ces 15 dernières années ont bel et bien existé, même secrètement et hors d’atteinte de quiconque — et en particulier du Congrès américain, qui ne s’en soucie pas, ou ne comprend tout simplement rien. Et alors que ce ‘cadeau’ qui nous a été fait prend fin, nos problèmes empirent. Les banques centrales et les divers gouvernements sont très puissants, mais en fin de compte, les marchés sont dépassés lorsque les gens qui se retrouvent coincés avec des dollars en perte comprennent ce qui leur arrive et réinjectent ces dollars avec zèle dans l’économie, rallumant ainsi la fièvre inflationniste".
* "Cette fois-ci — puisqu’il y a tant de dollars et tant de pays impliqués — la Fed a pu ‘couvrir’ toutes les crises qui menaçaient ces 15 dernières années, en particulier avec Alan Greenspan comme président de la Réserve fédérale, qui a permis à cette bulle de devenir la plus grande de toute l’histoire".