▪ Au lendemain des élections européennes, les indices boursiers européens s’empressent de battre des records historiques en cascade… mais les volumes d’échange s’effondrent. Cela ne ressemble-t-il pas à la fin d’une partie de Monopoly ?
Encore devrais-je préciser que l’activité des marchés dégringole depuis le milieu de la semaine dernière. Il suffit de lire la courbe des volumes du CAC 40, de l’EuroStoxx 50 ou du S&P 500… Avec un effondrement de 35% vendredi à la veille d’un week-end de trois jours pourtant très chargé politiquement, c’est édifiant.
Les transactions chutent d’autant plus spectaculairement que les indices se mettent à grimper de plus en plus vite. Il n’y a qu’à observer la hausse de 0,25% supplémentaires du CAC 40 au cours du dernier quart d’heure (jusque vers 4 527 points), avec moins de 100 millions d’euros échangés.
Voici une phrase que vous avez déjà eu l’occasion de lire dans de précédentes chroniques : "plus les cours montent, moins il y a d’acheteurs".
Ce lundi, les marchés ont battu des records : 1,25 milliards d’euros échangés à Paris à 17h29 et 1,5 milliards d’euros à 17h35 au fixing.
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Alors bien sûr, les opérateurs anglo-saxons étaient en congé ce lundi… mais la dernière fois que ce cas de figure s’est produit, il s’était traité 2,8 milliards d’euros sur le CAC 40, soit pratiquement le double !
J’en reviens donc à l’évocation de la fin de partie de Monopoly : le joueur qui a installé des hôtels sur chacune des trois cases des quartiers les plus huppés et qui possède les quatre gares est assuré de remporter la partie si n’importe lequel de ses adversaires — lesquels ont déjà hypothéqué toute ou partie de leurs propriétés — tombent avenue de Breteuil, avenue Foch ou rue de la Paix.
Leur seule chance d’éviter une ruine immédiate, c’est de tirer la carte "allez en prison et ne touchez pas 20 000 euros" |
Leur seule chance d’éviter une ruine immédiate, c’est de tirer la carte "allez en prison et ne touchez pas 20 000 euros". Pendant trois tirages de dés, ils peuvent encore retarder l’issue fatale mais redoutent de "faire un double" qui les remettrait dans le circuit.
▪ Une banque pas tout à fait comme les autres…
Les commentaires des cinq ou six joueurs déjà ratissés qui ont quitté la table sont intéressants à analyser : "avez-vous remarqué que la banque (centrale) versait 100 000 euros au plus gros propriétaire à chaque tour de tableau alors que nous ne recevions que 10 000 ?"
"Avez-vous remarqué que le gagnant jouait avec ses propres dés et ne sortait que des doubles ?"
"Avez-vous remarqué qu’il n’a tiré que des cartes ‘recevez 10 000 euros’ ou ‘la banque vous rembourse 15 000 euros’ alors que nous ne tirions que ‘frais de scolarité : payez 10 000 euros", ‘impôts sur les propriétés : payez 5 000 euros par maison, 20 000 euros par hôtel’ ?’
Bon, tout le monde l’a compris, la partie était truquée et la chance insolente du gagnant ne devait strictement rien au hasard.
Malheureusement, les pigeons se sont fait ratisser avant même d’avoir eu le temps de recenser trop de coups de bol pour avoir la certitude que la banque (qui distribue les billets, gère les hypothèques, brasse les cartes "chance" et "caisse de communauté") et les gagnants étaient de mèche.
▪ Il y a de quoi se pincer !
Je me régale aujourd’hui d’entendre de multiples commentateurs se réjouir que les élections européennes ou ukrainiennes n’aient que des impacts positifs sur les actifs financiers. Ils nous expliquaient lundi que les résultats n’avaient au fond aucun importance et que seule comptait l’anticipation d’un nouveau shoot de morphine monétaire par la BCE le 5 juin prochain…
Je me pinçais presque d’entendre sur BFM Business lundi soir un stratège de JP Morgan affirmer que vu les excédents de liquidités en circulation, le fait que les bénéfices ne grimpent pas ou très lentement ne constituait pas un frein à l’envolée des marchés : ils ont tout le temps d’attendre que les profits s’alignent sur la hausse des cours (puisque les taux vont rester scotchés à zéro pour très longtemps à partir du 5 juin prochain).
Mais pas question d’attendre la reconnexion cours/bénéfices en faisant du surplace. Vu la pente ascendante un peu moins verticale des neuf derniers mois, une progression marginale des bénéfices devrait largement suffire à entretenir un rythme de hausse compris entre 8% et 10% par an, plus 3,5% de dividendes distribués (on est déjà loin du compte aujourd’hui mais peu importe) d’ici 2017/2018.
La manipulation/subversion de tous les mécanismes de fixation des prix va entrer dans une phase encore plus radicale d’ici une dizaine de jours |
En d’autres termes, ce brillant stratège nous explique benoitement que les actifs grimpent sans aucune cause réelle et que la manipulation/subversion de tous les mécanismes de fixation des prix va entrer dans une phase encore plus radicale d’ici une dizaine de jours !
La confiance des complices des banques centrales est telle que la volatilité pourrait enfoncer le plancher historique des 11 de l’été 2007.
Une fois que ce sera fait, plus rien n’empêchera en théorie la volatilité de poursuivre sa décrue vers des territoires inexplorés : et pourquoi pas moins de 10, et pourquoi pas 8 tandis que le CAC 40 s’avancerait en toute sérénité vers les 5 000 points d’ici l’automne, totalement insensible aux turpitudes politiques, aux guerres civiles, aux profits qui baissent mais demeurent meilleurs que prévus.
▪ Ni vendeurs, ni contrepartie
Il n’y a plus de vendeurs. Ils ont été soigneusement ratissés, plumés à grands coups de manipulation algorithmiques et médiatiques (les cours s’envolent parce que la crise est terminée et la prospérité de retour, of course).
C’est pourquoi il n’y a plus de contrepartie. Le prix des terrains, des propriétés, des hôtels de ce Monopoly de dupes devient "déclaratif".
Comme il ne reste plus personne pour en contester la valeur, il n’y a plus qu’à décréter à chaque tour une augmentation de 8% à 10% puis à inscrire le score dans le journal du lendemain… indéfiniment.
Les deux ou trois gagnants sponsorisés par la banque centrale peuvent maintenant aller boire le champagne ensemble… |
Les deux ou trois gagnants sponsorisés par la banque centrale peuvent maintenant aller boire le champagne ensemble… et se moquer de tous ces idiots qui se sont fait tondre sans broncher en respectant scrupuleusement les règles du jeu, et qui n’ont même pas osé renverser la table ni couvrir les escrocs de goudron et de plumes alors que la tricherie aux dés pipés et le faux-monnayage crevait les yeux.
Les gagnants possèdent tout et se disent assurés — comme le stratège de JP Morgan — que les prix ne baisseront plus jamais… à moins que l’un d’entre eux ne trahisse ses compères, récupère sa pile de billets de Monopoly et tente de les échanger contre des vrais pour s’éclipser discrètement avant que la brigade des jeux ne fourre son nez dans leurs magouilles.
Tenter de revendre une partie de ce qui a été acquis avec de la fausse monnaie serait de la dernière stupidité puisqu’il n’existe évidemment aucun acheteur dans le monde réel qui paierait ne serait-ce que le dixième de la valeur fictive des maisons et des hôtels gagnés sur le tapis vert.
Oui, vert… comme une pyramide de faux dollars.
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