… C’est une profanation. Avec une vraie révolution, les choses se seraient passé bien autrement la semaine dernière à Washington.
Les médias s’en donnent à cœur joie – montrant à satiété les vidéos des événements de la semaine dernière.
Une « insurrection ! », ont hurlé les journaux. Une « invasion », ont dit les commentateurs. Une « révolution », ont déclaré les analystes. « Pearl Harbor », a osé le sénateur Chuck Schumer, qui n’avait sans doute pas toute sa tête. « Des terroristes nationaux », a insisté Joe Biden. « Un coup d’Etat », a affirmé un autre clown.
Michelle Obama s’est exprimée elle aussi, affirmant qu’on avait assisté à une « profanation » du Capitole.
Oui… elle a mis en plein dans le mille. C’est uniquement là qu’étaient les dommages significatifs : dans le mythe…
Selon la propagande, le Capitole US est le cœur de la démocratie américaine. C’est là que les représentants du peuple se rassemblent pour débattre solennellement – avec tout l’art oratoire de Cicéron et le courage indomptable d’Auguste – des sujets importants auxquels est confrontée la nation.
Ils pèsent soigneusement le pour et le contre, les coûts et les avantages, et mettent de côté leurs propres préjugés et intérêts afin de parvenir à des décisions qui bénéficient à tout le pays.
C’est évidemment faux. Le Congrès US est une collection de 535 ronds-de-cuir préoccupés avant tout de leurs propres intérêts. A de rares exceptions près, ils approuvent des lois impliquant des milliers de milliards de dollars (qui ne sont pas leur propre argent), écrites par des lobbyistes et des compères, sans même les lire.
Peu d’entre eux ont une perspective historique. Et aucun des principes qu’ils traînent avec eux ne survivrait à une douche matinale.
Souillure et selfies
Mme Obama a raison, cependant. Le temple a été souillé. Le saint des saints… la basilique de St Pierre pour les vrais croyants des Etats-Unis… la Mecque de leurs démocrates et de leurs républicains… un autel révéré des touristes estivaux…
… Ces murs sacrés ont été pris d’assaut par une foule de laissés-pour-compte (nous tenons de source fiable qu’on trouvait quelques gestionnaires de hedge funds ou professeurs de sociologie dans cette horde déchaînée)…
… Qu’on a retrouvés en train de prendre des selfies pour que les autorités puissent les arrêter pour violation de propriété, vandalisme, trahison, possession de substances illicites et autres accusations diverses et variées.
Tout le monde s’est bien amusé !
Révolutionnaires touristes…
Comme quasiment tout ce qui passe désormais pour des nouvelles ou des affaires publiques – quel que soit votre point de vue politique –, c’était une plaisanterie. Une escroquerie. La « révolution » était télévisée, mais comme la téléréalité ou le catch professionnel, tout était faux.
Ces gens n’étaient pas des « terroristes »… des révolutionnaires… ou des insurgés.
Ce n’était qu’une foule de désespérés au QI limité… n’ayant pas d’idées… aucun but… et pas une once de réflexion.
De vrais terroristes seraient venus avec des bombes, du carburant… et un plan. Ils auraient tué quelques membres du Congrès US et pris le reste en otage… ou tout simplement incendié le bâtiment du Capitole.
De vrais révolutionnaires seraient guidés par un vrai révolutionnaire… vers une vraie révolution. Donald Trump n’est pas Vladimir Lénine… Che Guevara… Fidel Castro… ou Maximilien Robespierre. Il n’est pas révolutionnaire du tout.
S’il était entré dans le Capitole, il n’aurait pas su quoi faire non plus ; il l’a d’ailleurs prouvé à la Maison Blanche. Pendant quatre ans, il a mené un faux programme visant à « rendre sa grandeur à l’Amérique »… et n’a ni assaini le marigot, ni étanché le flot de richesses allant des masses vers l’élite. Il est désormais la personne idéale pour mener un « coup d’Etat » factice.
… Contre vrais révolutionnaires
Les vrais insurgés ne se baladent pas simplement dans le temple… admirant ses magnifiques œuvres d’art et laissant des papiers par terre. Ils le détruisent.
Comme Oliver Cromwell… utilisant les églises catholiques irlandaises comme écuries pour ses chevaux et latrines pour ses hommes. Comme le temple de Salomon, rasé par les Babyloniens en 586 av. JC. Comme Sitting Bull à Little Big Horn, qui n’a pas laissé un seul survivant.
Ils ne s’arrêtent pas à l’autel, par ailleurs.
En 1793, la ville de Lyon défiait les révolutionnaires français – mais ne tarda pas à être conquise. Chaque maison appartenant à « un riche » devait être détruite.
Une vraie horde révolutionnaire ne se contente pas de se comporter comme des touristes mal embouchés. Elle tue… viole… pend… brûle… torture… et pille.
Les femmes sont agressées dans les rues. Les hommes sont abattus sans procès… souvent tout simplement pour s’être trouvés au mauvais endroit au mauvais moment. Des groupes – qu’ils soient noirs, juifs, riches, catholiques, tsiganes, collaborateurs, contre-révolutionnaires (tous les groupes qu’on veut, en gros) – sont isolés pour être exécutés.
Lors du massacre de Badajoz, au début de la Guerre civile espagnole, par exemple, les révolutionnaires ont tenu une grand’messe… puis ont assassiné 4 000 habitants du lieu qui restaient loyaux au gouvernement.
La foule qui se tenait à Washington la semaine dernière n’a pas célébré de messe. Elle n’a assassiné personne volontairement. Elle n’a même pas massacré la police du Capitole… ou coupé la tête de son commandant pour la mettre sur une pique (comme lors de la prise de la Bastille).
Les barbares ne s’en sont pas pris aux jolies démocrates qu’ils auraient croisées sur les lieux… ils n’ont pas même mis le feu à une poubelle.
Une vraie insurrection
Enfin, une vraie insurrection ne se produit pas quand les marchés sont à des sommets historiques… qu’il y a de la nourriture en abondance dans les rayons des supermarchés… que le carburant coule à flot dans les stations-service… qu’on peut obtenir un prêt immobilier à 2,5%… et que les autorités distribuent encore de l’argent dont on pense qu’il a toujours une vraie valeur.
Non, cher lecteur, la vraie révolution reste à venir. Nous ne sommes qu’à la limite glissante et floue de la destruction de l’empire américain, en d’autres termes.
Il y a encore beaucoup de chemin à parcourir.