▪ Eh bien… août est terminé. Pour les actions américaines, c’était le pire mois depuis presque une décennie. Le journal britannique Telegraph nous en dit plus :
"’Il est assez clair que l’économie américaine a le dos au mur’, a déclaré Barry Knapp, directeur de la stratégie actions US chez Barclays Capital. ‘Le paysage macro-économique domine, et en ce moment, on ne peut déterminer clairement ce qui va sortir le marché de cette ornière’."
"Ces craintes ont occupé le devant de la scène durant la dernière séance du mois".
"A New York, les marchés ont profité d’un bref répit au milieu du blizzard de données économiques moroses, les chiffres sur le marché de l’immobilier américain et la confiance des consommateurs US étant ressortis meilleurs que prévus. L’indice Conference Board de la confiance du consommateur est passé à 53,5 le mois dernier, par rapport à 51 en juillet, tandis que les derniers chiffres de l’indice S&P/Case-Shiller montraient que les prix du logement avaient grimpé de 4,2% en juin par rapport à la même époque l’an dernier".
"Le rebond du jour s’est toutefois révélé de courte durée, le compte-rendu de la dernière réunion de la Réserve fédérale ayant ramené les investisseurs aux thèmes familiers qui ont prévalu tout l’été. Ben Bernanke, président de la Fed, a passé les dernières semaines sous une pression croissante de la part des marchés pour déclarer qu’il fera plus pour lutter contre les perspectives d’une deuxième récession si la reprise continue de ralentir. Selon le compte-rendu, certains des membres du FOMC considèrent qu’il y a ‘un risque accru à la baisse pour les perspectives tant de la croissance que de l’inflation’."
▪ Comme nous l’avions prévu dans ces colonnes, Martin Wolf comme Paul Krugman prennent le chemin le plus facile. Non que nous ne l’emprunterions pas également, si nous étions à leur place. Ils ont conseillé à l’équipe Obama de mettre en place de gigantesques programmes de "relance". Et comme la relance n’a pas fonctionné, ils disent que les programmes n’étaient pas assez gigantesques.
Et Dieu merci, l’administration a suivi certains de nos conseils, ajoutent-ils. Sinon, les choses seraient bien pires !
Dans le Financial Times d’aujourd’hui, Wolf fait allusion à un récent article d’Alan Blinder et Mark Zandi. Tous deux utilisent "un modèle macro-économique standard" pour déterminer que sans l’intervention des autorités, le déclin du PIB aurait été trois fois pire, et le chômage aurait dépassé les 16%. Et — vous y croyez, vous ? — le déficit fédéral américain serait à 2 600 milliards de dollars.
Oh là là… nous sommes vraiment reconnaissant à Wolf, Krugman, Summers, Obama, Bernanke et tous les autres savants qui nous ont protégé d’un sort si affreux.
Mais attendez une minute, ce "modèle macro-économique standard" semble parfait… mais nous ne pouvons nous empêcher de nous poser des questions. Il peut prédire des issues possibles en se basant sur des facteurs de politique fédérale, n’est-ce pas ? Et Wolf dit qu’il est "standard", nous imaginons donc qu’on peut le trouver au supermarché du coin. L’équipe Obama devait donc déjà en disposer il y a deux ans, n’est-ce pas ? Nous ne pouvons nous empêcher de nous demander s’il s’agissait du même modèle que celui qu’ils ont utilisé lorsqu’ils ont prédit que le chômage ne dépasserait pas les 8% — si le Congrès approuvait la loi de relance proposée par l’administration. Ce devait être un autre… parce que le Congrès a approuvé la loi, et le chômage a dépassé les 9% malgré tout.
Et il est toujours au-delà des 9% — près de deux ans après la mise en place des efforts de relance.
Donc peut-être que ce "modèle macro-économique standard" n’est en fait qu’une vaste… Mais imaginons que ce ne soit pas le cas. Laissons notre imagination prendre son vol… grimper en flèche… s’affranchir de la gravité, des soucis de ce monde ou de la réalité pratique. Imaginons que ces économistes savent ce qu’ils disent !
Imaginez que les autorités n’aient rien fait — ce qui était plus ou moins la politique standard aux Etats-Unis depuis leur fondation en 1776 jusqu’au milieu du mandat d’Herbert Hoover en 1930… et toutes les années qui ont précédé… jusqu’à la fondation de Rome. Imaginons maintenant que Blinder et Zandi ont raison. Sans intervention de la Fed, le PIB aurait chuté de 12% — trois fois la perte réelle… et la moitié de la perte enregistrée durant la Grande Dépression. Voilà qui aurait été un désastre, pas vrai ?
Eh bien… peut-être pas. Cela aurait pu être une bénédiction. L’idée d’une correction, c’est de corriger. L’étude Blinder/Zandi nous dit que l’économie a fait des erreurs équivalant à 12% du PIB. D’accord… eh bien, peut-être que l’économie en fait trop. Qui sait ? Mais pensez aux folles années de la Bulle époque… Lorsque les prêteurs donnaient aux chômeurs un prêt hypothécaire se montant à 110% de la valeur gonflée d’une maison. Pensez aux accords de private equity basés sur des estimations de croissance proprement hallucinantes. Pensez aux centaines de milliers de milliards de dollars de produits dérivés basés sur des formules complexes aussi factices qu’idiotes. Pensez à toutes les décisions prises en partant du principe que le crédit à la consommation continuerait à se développer comme il l’avait fait de 1949 à 2007. N’était-ce pas trop optimiste ? Trop ambitieux ? Trop irréaliste ? Nous serions surpris s’il n’y avait pas eu plus d’erreurs… se montant à bien plus de 12% du PIB.
Et maintenant, posez-vous la question… quel bien a été accompli en ne corrigeant pas ces erreurs ? En n’épongeant pas l’excès de dette ? En ne laissant pas les banques insolvables faire faillite ? En ne permettant pas à des activités usées et non-compétitives de mourir en paix ?
Nous ne savons pas combien d’erreurs ont été commises. Nous ne savons pas jusqu’où le PIB devrait baisser. Et nous ne savons pas ce qu’il se serait passé si on avait laissé des acheteurs et des vendeurs volontaires régler leur sort de la manière traditionnelle — par la panique, le défaut de paiement, la faillite, la restructuration et la reconstruction.
Nous n’en savons rien. Nous ne le saurons jamais. Mais il n’y a aucune raison de penser que les choses auraient été pires si nous l’avions découvert il y a un an. Une chute de 12% du PIB était peut-être exactement ce dont nous avions besoin. Nous pourrions être actuellement sur la voie de la prospérité, au lieu de nous trouver confrontés à cinq ou quinze ans supplémentaires de stagnation, de déclin et de désespoir.