** Hier, le 11ème jour du 11ème mois de l’année, à 11 heures précises, Londres s’est tue. Nous avons observé un instant de silence pour nous souvenir de nos héros morts à la guerre.
* Cet instant marque le moment où, il y a 90 ans, les affrontements ont cessé sur le front ouest. Les soldats des deux camps ont hésité… ils se sont demandés si c’était vrai. Après avoir passé quatre ans à s’entretuer les uns les autres – faisant 40 millions de morts – tout à coup, les chefs d’Etat ont décidé qu’ils devaient arrêter. Doucement, précautionneusement, les poilus français… les tommies anglais… les doughboys américains… les fritzes, huns, krauts allemands sont sortis des tranchées. Ils ont traversé le champ de bataille pour saluer leurs adversaires. Ils se sont serré la main. Ils ont échangé du tabac. C’était terminé.
* "Qu’est-ce que c’était que tout ça ?", a demandé avant-hier soir notre collègue Simon Nixon. "J’ai lu de nombreux ouvrages sur la guerre, j’ai essayé de comprendre. Mais apparemment, personne ne comprend. Qu’est-ce qui a déclenché la guerre ? Qui a voulu cette guerre ? Personne n’est capable de répondre à ces questions."
* Avant que la guerre ne commence, l’Europe et l’Amérique jouissaient de la prospérité la plus impressionnante de toute l’histoire de l’homme. Principalement grâce à l’Empire britannique, qui avait permis la mondialisation du point de vue du commerce. Un homme de biens, à Londres, à Paris ou à New York, pouvait commander ses chaussures à un cordonnier italien, son thé en Inde, ses assiettes en Chine, sa montre à Genève, son whisky en Ecosse et son fusil de chasse en Allemagne.
* Ce qui signifie que la guerre, d’un point de vue commercial, n’avait d’intérêt pour personne. Un auteur et conférencier populaire a dit à son public que la guerre faisait partie du passé ; qu’il était impossible pour des pays modernes d’entrer en guerre les uns contre les autres puisque qu’ils dépendaient largement de la production des uns et des autres.
* Mais l’histoire ne s’arrête jamais là.
* Il se trouve que le ciel est tombé en 1914… et il a continué à tomber pendant les 31 années suivantes. Dans la liste de toutes les catastrophes qui se sont abattues sur la génération de 1914 – la guerre, la crise, la grippe, la faillite, l’hyper-inflation – il ne faut pas oublier de mentionner le Dust Bowl. Ces pauvres "Okies" ont tout subi.
* Quelles leçons peut-on tirer de tout ça ? Que tout peut arriver, même ce que vous pensiez impossible. Et que quand les choses tournent mal… cela peut être très grave.
* Qu’est ce qui peut encore mal tourner? Tout… y compris ce que vous n’auriez même pas imaginé.
* Mais retournons dans le passé… du moins jusqu’à avant-hier. Quand le soleil s’est levé sur Tokyo, l’espoir des investisseurs s’est levé avec lui. La Chine a sorti son propre programme de renflouement ce week-end – un plan appelé programme de "stabilisation sociale" ; plan qui consiste, pour le gouvernement, à dépenser plus de 500 milliards de dollars pour tenter d’éviter la révolution.
* C’est certainement ce qui dérange en ce moment le sommeil des décideurs de l’Empire du Milieu – l’horreur de centaines de millions de Chinois sans emploi et désespérés.
* L’espoir a illuminé une grande partie de la journée. Les bourses asiatiques sont remontées – encouragés par le plan de renflouement chinois. Mais ensuite, les mauvaises nouvelles sont tombées… et à l’aube à New York, l’espoir commençait déjà à disparaître. A la clôture, les actions étaient mitigées en Asie, et le Dow Jones avait perdu 73 points à Manhattan. Le pétrole a clôturé à 62 $ avant-hier, et il glissait vers les 60 $ le lendemain.
* L’or se vendait hier à 745 $ – après être remonté avant-hier.
* Nous avons déjà vu les choses commencer à mal tourner. A moins que les 45 prochains jours n’apportent un rebond remarquable, cette année sera la pire année pour la Bourse depuis 1937. Des milliers de milliards de dollars ont été perdus… ce qui a déjà entraîné des changements importants dans la façon dont les gens pensent. En quelques semaines, le sentiment dominant a radicalement changé, il est passé de la cupidité à la peur.
* Vous vous souviendrez de l’administration Bush comme d’une administration qui a travaillé dur pour effrayer les gens. Ils sont arrivés avec leurs "niveaux de menace" ridicules pour essayer de convaincre la foule qu’elle était en danger constant.
* Maintenant, la foule se sent réellement en danger – en danger de perdre leurs emplois et leurs maisons. La crainte prétendue a laissé place à une crainte réelle. La nouvelle administration va tout faire pour se détourner de cette crainte pour tenter de redonner confiance aux gens.
* C’est "la fin d’un cauchemar national" annonce le TIME magazine. Plus de tortures. Plus de "niveaux de menace". Les employés de Burger King ne seront plus soupçonnés d’être des terroristes. Les terroristes ? Qui s’en inquiète ? Le danger est désormais réel… et juste sous nos yeux. Tout le monde panique.
* Et dans l’histoire nationale, une réaction stupide en chasse une autre. Ce que nous avions à craindre avant, c’était une attaque terroriste mondiale qui pouvait porter atteinte à notre liberté. Aujourd’hui, nous abandonnons volontiers notre liberté, dans l’espoir de ne pas perdre plus d’argent. Aujourd’hui, quand les autorités frappent à la porte, nous les accueillons à bras ouverts. Parce que nous avons besoin qu’ils nous donnent de l’argent… qu’ils financent nos banques… qu’ils renflouent notre industrie automobile… qu’ils financent nos foyers… qu’ils sauvent notre économie… et nos emplois…
* Imaginez qu’il y a seulement quelques mois nous étions assez naïfs pour penser que les gens devaient s’occuper de leurs propres finances… que le marché libre devait décider de la survie des entreprises ou et de leur fermeture… que les acheteurs et les vendeurs devaient fixer le prix des capitaux… et que les capitalistes devaient financer leurs propres banques et compagnies d’assurances avec leur propre argent.
* Nous sommes beaucoup plus intelligents aujourd’hui ! Désormais, nous incluons le gouvernement dans nos prières : qu’il soit guidé par des hommes sages et de valeur… qu’il prenne les choses en main. Et pourquoi ne pas compter sur le gouvernement ? N’oubliez pas, la seule chose à craindre, c’est la crainte elle-même.