Donald Trump aurait l’intention de renvoyer le président de la Réserve fédérale, Jerome Powell. Si la menace semble aujourd’hui écartée, elle révèle une stratégie politique plus profonde.
La semaine dernière, une rumeur s’est propagée à Wall Street. Donald Trump serait sur le point de renvoyer Jerome Powell.
Il était dit que cela entraînerait une hausse des ventes d’obligations du Trésor américain, ainsi qu’une augmentation des achats d’or et de bitcoins.
Le New York Times s’est penché sur le sujet :
« Trump aurait rédigé un projet de lettre pour révoquer le président de la Fed et en aurait discuté avec les républicains du Congrès.
Lors d’une réunion dans le Bureau ovale avec les élus républicains de la Chambre, il aurait brandi une copie de cette lettre de licenciement. Reste à savoir s’il passera réellement à l’acte. »
Le président a brandi une copie d’un projet de lettre de licenciement de Jerome H. Powell lors d’une réunion dans le bureau ovale avec les républicains de la Chambre des représentants. Reste à savoir s’il mettra sa menace à exécution.
Quelques heures plus tard, la tonalité change : le renvoi de Powell semble désormais « extrêmement improbable ». Selon MarketWatch :
« Trump ne renverra pas Jerome Powell, affirme Bessent, le responsable du Trésor. ‘Le président Trump a été clair : il ne cherche pas à se débarrasser du président Powell’, a-t-il déclaré à Bloomberg Television. »
Bessent sait peut-être mieux que quiconque à quel point Powell peut lui être utile. Mais cet épisode, même s’il s’est refermé sans conséquence immédiate, révèle ce qui pourrait bien se tramer en coulisses.
En résumé, Trump ne renverra probablement pas Powell. Ses conseillers ne sont pas stupides : eux aussi redoutent une récession ou un marché baissier. Powell, dans cette stratégie, est un parfait bouc émissaire. On l’associera aux taux d’intérêt excessifs de la Fed et on lui fera porter la responsabilité de tout ce qui pourrait mal tourner.
C’est là que les choses sérieuses commencent.
Comme l’a rappelé mercredi l’ancien gouverneur de la Fed, Richard Fisher : « Chaque fois qu’un président est intervenu dans la politique monétaire, cela a débouché sur de l’hyperinflation. »
Fisher fait sans doute référence au début des années 1970.
A l’époque, Arthur Burns présidait la Fed. Richard Nixon était à la Maison-Blanche. Burns, professeur à Columbia, avait autrefois trahi son ami Murray Rothbard en rejetant sa thèse sur la panique de 1819. C’est depuis Columbia qu’il avait été appelé à Washington pour diriger la Fed en 1970.
Son prédécesseur, William McChesney Martin, avait refusé d’abaisser les taux simplement pour satisfaire le président. Burns, lui, se montra plus conciliant. Malgré ses réserves, il soutint le programme économique de Nixon en 1971 : détachement du dollar de l’or, contrôle des salaires et des prix.
Le taux directeur chuta de plus de 9 % fin 1969 à 3,5 % en janvier 1972. Résultat : l’inflation passa de 3 % en 1972 à 12 % deux ans plus tard.
Avec ce précédent en tête, il est facile d’imaginer ce qui pourrait advenir si Donald Trump obtenait un contrôle plus direct sur la politique de la Fed. Il a déjà affirmé que les taux d’intérêt devraient baisser de 300 points de base.
Et s’il le faisait vraiment ?
Voici le scénario que nous anticipons…
Trump aura probablement raison : l’économie flanchera, et Powell servira de fusible. Il sera tenu responsable de la débâcle. Puis, probablement à la faveur d’un krach boursier ou d’une récession, Trump disposera du prétexte qu’il attendait.
Il se posera en sauveur, comme lors de la crise du COVID. Il dégainera sa lettre et renverra Powell sans ménagement. Un nouveau président de la Fed, à l’image d’Arthur Burns, prendra les commandes, avec pour mission de baisser rapidement les taux.
Trump pourra ainsi rejouer le scénario de 2020 – période où, malgré la pandémie, il distribuait massivement des aides et des chèques.
En revanche, la suite risque d’être bien plus douloureuse.