▪ Nous avons de plus en plus de mal à suivre les derniers développements du dossier grec. Le patron de la Bundesbank — Jens Weidmann, le remplaçant d’Axel Weber — se dit opposé à l’émission d’euro-obligations (garanties par les états de l’Eurozone) que réclame Georges Papandréou.
Angela Merkel laisse entendre de son côté qu’elle ne serait plus opposée (mais l’a-t-elle jamais réellement été ?) à un défaut partiel de la Grèce sur sa dette.
Une issue que rejette Hillary Clinton qui promet même le soutien des Etats-Unis à la Grèce pour éviter d’en arriver au défaut de paiement : « il faut vaincre le cancer de la crise de la dette, qui menace l’ensemble de la Zone euro ».
Elle assimile les mesures d’austérité du gouvernement Papandréou pour repartir sur de bonnes bases à une chimiothérapie ; c’est pénible et cela dure souvent plus longtemps que l’organisme ne peut le supporter.
Nous préférons éviter de nous étendre sur cette thématique qui fait froid dans le dos ; nous ne connaissons que trop le caractère aléatoire des évolutions de ce type de maladie, le caractère récidivant, les métastases qui prolifèrent sournoisement, etc.
▪ Nous ne savons pas si les Européens tiendront un sommet à partir du 21 juillet (jeudi) à Bruxelles au sujet de la crise. Angela Merkel a en effet averti qu’elle ne s’y rendrait pas si aucune solution jugée acceptable par l’Allemagne n’était mise en avant — comprenez que les créanciers privés doivent mettre la main à la poche, sinon il ne sert à rien de discuter.
Cela fait plus de 18 mois que l’Allemagne trouve — à chaque fois que la situation devient critique — des moyens et des arguties pour retarder l’adoption de mesures d’urgence ; tout cela au prétexte que l’on ne fait rien de bon dans la précipitation…
Si l’image du cancer que nous sert Hillary Clinton s’avère pertinente, cela incriminerait sévèrement l’Allemagne car plus la maladie est détectée et combattue précocement, plus les chances de guérison s’accroissent.
Retarder les examens, tergiverser sur le choix de traitement… et les chances de rémission s’amenuisent irrémédiablement. Suivez le regard d’Hillary Clinton et de son homologue grec Stravros Lambrinidis. Les décideurs politiques et les grands argentiers germaniques ont les semelles lisses à force de traîner les pieds.
La tension est encore montée d’un cran dimanche soir. Jean-Claude Trichet a averti (sur le site Internet du Financial Times Deutschland) les gouvernements de la Zone euro qu’ils seront responsables (comprenez devront assurer la garantie) de la dette grecque en cas de défaut de paiement, sinon, plus question pour la BCE d’accepter le papier émis par Athènes.
Mais un autre problème crucial se pose alors. Si la Grèce fait défaut, sa dette se verra appliquer une décote tellement radicale (entre 50 et 70%) que la BCE verra ses fonds propres se volatiliser. Cela entraînera une recapitalisation de plusieurs dizaines de milliards, à laquelle l’Allemagne devra bien participer. D’une manière ou d’une autre, Berlin devra passer à la caisse, ou c’est l’Eurozone qui passera à la trappe.
▪ Face à la désunion européenne, l’impasse dans laquelle se retrouvent les pourparlers sur l’extension de la dette aux Etats-Unis n’inquiète guère Wall Street. Le Tea Party semble pourtant bien décidé à camper sur ses positions, arc-bouté sur le principe qu’aucune hausse d’impôts n’est envisageable et que la solution ne réside que dans une diminution des dépenses sociales.
Par calcul politique, les républicains paraissent déterminés à laisser les ultra-libéraux envoyer les Etats-Unis droit dans le mur. Evidemment, ils accuseront l’administration Obama de n’avoir ni levé le pied, ni tourné le volant… même si c’est faux, même si la mauvaise foi des négociateurs du Tea Party apparaît chaque jour plus évidente. Il n’empêche qu’une large fraction de l’opinion publique considèrera que la Maison Blanche est responsable, puisqu’elle est aux affaires.
Si tel est bien le scénario qui se dessine, la date butoir du 2 août est le genre d’occasion de provoquer un chaos (ce serait Armageddon selon un porte-parole démocrate) qu’il convient de ne pas laisser passer. La dernière année du mandat de Barack Obama se transformera en cauchemar politique et économique et il y a de fortes chances qu’il ne s’en relève pas.
▪ Nullement affecté par une telle perspective, qui entraînerait aussitôt la dégradation de la dette américaine promise par Moody’s jeudi, Wall Street optait résolument pour une tendance haussière en fin de séance vendredi.
Les indices américains ont clôturé pratiquement au plus haut du jour. Le Nasdaq a gagné près de 1%, contrairement aux indices européens qui ont fini assez proches de leurs niveaux d’ouverture (-0,75%).
Le différentiel de performance de part et d’autre de l’Atlantique s’est encore creusé la semaine passée. Le bilan hebdomadaire s’établit à -1,4% pour le Dow Jones et -2,4% pour le Nasdaq, contre -4% pour l’Euro-Stoxx 50 et -4,8% pour le CAC 40. Ce dernier inscrivait un score à 3 726 points, seconde pire clôture de l’année 2011 après celle du 16 mars dernier.
▪ La journée technique des Trois sorcières a été également fertile en statistiques allant de décevantes à carrément mauvaises. De quoi entretenir chez certains opérateurs la conviction que la Fed sera contrainte de mettre en oeuvre de nouveaux stimuli pour l’économie américaine.
La chute de la confiance des consommateurs américains telle que mesurée par l’Université du Michigan serait donc une bonne surprise. L’indice a dévissé de pratiquement huit points, de 71,5 en juin vers 63,8 en juillet alors qu’il était attendu en légère hausse vers 72.
Sur le front de l’inflation, les prix à la consommation aux Etats-Unis ont reculé de 0,2% en juin par rapport à mai. L’indice CPI dit core, qui exclut l’évolution des prix hors alimentation et énergie, ressortait en hausse de 0,3% contre un consensus de +0,2%.
Déjouant également les pronostics plutôt optimistes, l’indice Empire State de la Fed de New York est demeuré négatif, à -3,8 pour juillet (au lieu de rebondir entre +1 et +5). Cela illustre une activité manufacturière durablement déprimée dans cette région.
Dans la même veine, la production industrielle ne s’est accrue que de 0,2% aux Etats-Unis au mois de juin, là où les économistes s’attendaient à une progression de l’ordre de 0,3%.
Résultat : l’accumulation des périls politiques et économiques a propulsé l’once d’or vers un nouveau record historique de 1 594 $ le vendredi 15 juillet.
En cas de débordement des 1 600 $, synonyme d’une explosion du Mont St Helens de la dette américaine — une sorte de 2012 avant l’heure prédisent les catastrophistes — le métal précieux pourrait s’envoler vers les 2 000 $. Ce pic pourrait voir le jour après une brève correction technique liée au krach des indices boursiers et des bons du Trésor américain.
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