Goldman Sachs vient de lancer un produit de couverture contre une crise bancaire européenne. Un produit qui devrait lui rapporter gros.
Vous vous souvenez peut-être comment Goldman Sachs a réalisé de fabuleux profits lors de l’effondrement de la bulle du crédit subprime ?
Je peux vous rafraîchir la mémoire mais si vous n’en avez pas besoin, cher lecteur, sautez directement à l’image.
Goldman Sachs avait fabriqué des produits dérivés synthétiques permettant à ses clients institutionnels en quête d’un petit rendement supplémentaire d’investir dans des paquets de crédits subprime titrisés (les fameux CDO).
En même temps, Goldman Sachs anticipait l’effondrement de ce même marché et avait aussi fabriqué des couvertures contre cet événement (CDS).
Bien entendu, l’ensemble de ces trucs et bidules financiers était « convexe », comme on dit en jargon, c’est-à-dire qu’en cas de chute les gains étaient énormes alors que les gains à la hausse étaient très faibles, de l’ordre de quelques points de base de rendement (100 points de base correspondent à 1% de rendement). Goldman Sachs se plaçait du côté des baissiers alors que la plupart de ses clients prenaient le pari spéculatif haussier.
4 trades…
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C’était d’une pierre trois coups. Des émoluments pour avoir conçu des CDO, des commissions sur les ventes des CDO, et des gains colossaux lorsque le soufflé est retombé conformément aux prévisions avisées des génies de la finance. Cynique mais efficace et, après tout, il n’est pas illégal de s’enrichir avec la bêtise des autres.
Selon Bloomberg, 10 ans plus tard, Goldman Sachs réitère l’opération.
Devinez quelle est cette fois le sous-jacent, le nouveau subprime de cette fin de décennie ?
Les banques européennes et la dette Tier 1 émise après la crise de l’euro. Environ 150 Mds$ de titres qui rapportent du 4,8%, un rendement 10 fois supérieur à celui de la dette bancaire dite senior (des titres dont la qualité est considérée comme étant juste inférieure à de la dette d’Etat).
Dans un monde de taux zéro ou négatifs, ces petits bouts de papier rapportent une fortune !
Les spécialistes appellent ces titres des AT1 (comme Additional Tier 1). Ils ne peuvent pas être couverts par des CDS (credit default swaps), l’assurance classique en finance. D’où la petite cuisine de produits dérivés mise en place par Goldman Sachs.
Voici comment est décrite cette nouvelle petite merveille par Bloomberg :
« Certains participants au marché cherchent une exposition à cette classe d’actifs tandis que d’autres couvrent leurs positions
D’un côté du marché des TRS, l’acheteur de l’indice anticipe que le rendement total de l’indice va augmenter. De l’autre côté, le vendeur de l’indice anticipe l’inverse. »
Vu comme ça, rien de mal : un acheteur et un vendeur, quoi de diabolique ? N’oubliez pas la machiavélique « convexité » ! Ce sont des produits synthétiques et les gains des uns ne sont pas les pertes des autres… Les gains des uns sont bien supérieurs aux pertes des autres.
Mais pourquoi un tel produit maintenant ?
Petit retour en arrière.
Les AT1 ont été émis pour ne pas en appeler aux contribuables au moment de la « crise de la dette en euro ». Pour allécher le marché, les intérêts sont élevés.
En juin dernier, lors du sauvetage de l’espagnole Banco Popular, les AT1 ont explosé en vol, ce qui a rendu certains investisseurs institutionnels nerveux.
D’où le besoin d’un produit de couverture puisque les CDS ne sont pas possibles.
Bloomberg encore :
« Ils [Goldman Sachs et JP Morgan] introduisent ces total return swaps parce que les obligations AT1 ne peuvent pas être couvertes par des CDS. En effet, une banque ne peut différer un paiement de coupon sans déclencher un défaut.
Le total return swap permet aux investisseurs de se couvrir contre le défaut d’un panier d’AT1 […] sans avoir à posséder les titres sous-jacents ou à immobiliser beaucoup de garanties.
Goldman Sachs est teneur de marché dans des swaps liés à un indice iBoxx de dettes bancaires émises en dollar et en euro. […]
Les deux indices comprennent des AT1 émises par des établissements de crédit tels que Banco Santander SA, Deutsche Bank AG and HSBC Holdings Plc. »
Dans ces conditions, ne vous étonnez pas si Angela Merkel freine des quatre fers pour la mise en place de la garantie bancaire européenne.
Pour résumer : il y a quelque chose de pourri au royaume des banques européennes. Des instruments de couvertures viennent d’être créés pour protéger les professionnels qui le désirent.
Et vous, quelle est votre couverture en cas de crise bancaire européenne ? L’euro pourra-t-il survivre à une telle crise ?
En attendant de découvrir la réponse, prenez vos précautions : voici les six mesures d’urgence que vous devriez mettre en place dès maintenant.