Je disais vendredi que la balance commerciale du solaire américain en 2010 a été excédentaire de 1,88 milliard de dollars ! En 2010, les exportations américaines ont surpassé les importations dans le solaire. En effet, des compagnies ont réussi à préserver des activités aux Etats-Unis, tout en profitant des coûts de construction extrêmement faibles en Asie.
Ainsi une firme comme First Solar a réussi à obtenir une garantie de prêt de 5,3 milliards de dollars de la part du département de l’Energie américain. Le prêt doit permettre la construction de quatre nouvelles fermes solaires aux Etats-Unis, dans l’Ohio. Parallèlement, la firme profite également de faibles coûts de construction en poursuivant ses activités en Malaisie.
Au-delà d’une bonne stratégie industrielle, les compagnies bénéficiaires cette année ont progressé également grâce à la qualité de leurs produits. On avait tendance à l’oublier, les Etats-Unis restent le pays de l’innovation.
▪ La R&D, la ressource cachée des Etats-Unis
Dans le grand secteur du solaire, deux petits secteurs tirent leur épingle du jeu et ont été particulièrement excédentaires en 2010. Il s’agit des sociétés exportatrices d’équipements solaires et les producteurs de polysilicone.
Les Etats-Unis ont donc réussi à garder un avantage sur quelques segments du solaire.
1 – En ce qui concerne les producteurs d’équipements, ils ont exporté 2,55 milliards de dollars, contre des importations de 428 millions de dollars.
2 – Surtout, les Etats-Unis ont exporté pour 2,52 milliards de dollars en polysilicone en 2010.
Le polysilicone, ce sont de petits cristaux de silicone, essentiels dans la construction des cellules photovoltaïques. Sans polysilicone, point de panneaux photovoltaïques.
Or deux faits jouent en faveur des Etats-Unis :
– une pénurie endémique sur le marché des polysilicones ;
– et une forte présence des producteurs américains sur ce marché.
Grâce à un faible coût de l’énergie hydroélectrique, les producteurs américains ont pu proposer des produits à bas coût, et profiter de leur avance technologique pour devenir exportateurs nets vers le marché chinois. Un tour de force.
▪ Pourquoi garder un oeil sur le solaire ?
Un conseil : ne vous détournez pas trop rapidement du solaire.
Certes, les gouvernements des pays développés ont fait un constat simple : l’énergie solaire coûte encore trop cher comparée à ce qu’elle rapporte. On estime à deux ans le temps pour un panneau solaire de produire autant d’énergie qu’il en a consommé lors de sa construction.
Investir dans le solaire est donc encore inutile et coûteux… pour l’instant. Les foules pro-environnementales tressent aujourd’hui des lauriers aux constructeurs d’éoliennes offshores, la nouvelle énergie à la mode. Mais comme toutes les foules, cette-ci est versatile, et pourrait très vite revenir vers le solaire. Pourquoi ?
D’abord parce qu’aucune énergie renouvelable ne peut être écartée à l’heure actuelle, au risque de tirer un trait sur ce qui sera peut-être une bonne partie de l’énergie de demain.
D’autre part, nos gouvernements ne peuvent pas laisser la Chine devenir le seul et unique producteur de panneaux photovoltaïques au monde. Cette nouvelle dépendance serait vécue comme un échec alors que nous luttons pour nous sortir de notre dépendance au pétrole.
Enfin, lorsque les Etats-Unis auront suffisamment développés leurs technologies, ils pourraient alors recommencer à gagner des parts de marché dans le solaire. Les jeux ne sont donc pas faits.
Si Pékin mène actuellement la danse, l’empire du Milieu sait qu’il a encore un lourd déficit au niveau technologie. Ce n’est pas pour rien que les Chinois guettent à présent des constructeurs américains à la pointe de la R&D sur le solaire, comme Applied Materials.
▪ Sur qui garder un oeil ?
Le secteur du solaire est en creux de vague. Après la remise des compteurs à zéro avec la faillite de nombreux acteurs cette année, on y verra désormais plus clair.
Une chose est sûre, les constructeurs chinois semblent promis à un grand avenir, à en croire l’engouement autour de ces valeurs. Signe de cette confiance, l’introduction sur la Bourse de Shanghai de la firme solaire Jingyuntong Technology devrait rapporter ce mois-ci trois fois le montant initialement annoncé, du fait de la forte demande.
Mais côté américain, les opportunités sont assez nombreuses également. Après un second semestre 2011 rouge sang, certaines opportunités devraient émerger. Affaire à suivre de près, donc.
Et n’oubliez pas : c’est l’atout technologique qui fera la différence. Quant aux compagnies comme First Solar ou JA Solar, elles apparaissent survendues actuellement. Au prix où sont leur action, ces valeurs méritent qu’on s’y intéresse.
Première parution dans l’Edito Matières Premières & Devises le 07/09/2011.
3 commentaires
La différence se fera peut être aussi sur le recyclage des panneaux photovoltaiques. Pour l’instant pas de solution écologique, de quoi décevoir les convaincus qui ont investis dans l’energie solaire dans le but de protéger l’environnement.
que pensez vous de SOITEC ? qui a développé une technologie originale photovoltaïque à fort rebdement énergétique . Elle affiche récemment deux beaux succés commerciaux : clearance pour construire une usine de production en Californie , et vente de sa techno à une sté chinoise.
Monsieur,
Soitec fait effectivement partie des compagnies que je suis. Il est devenu de plus en plus rare qu’une compagnie européenne du secteur solaire attire l’attention, particulièrement en temps de crise. Soitec fait donc partie des exceptions. J’aime particulièrement son hyper spécialisation dans le solaire, ce qui lui a permis de résister à la concurrence chinoise.
Je reste cependant très méfiant à court terme. Soitec est également exposé au secteur de l’électronique. Or ses activité sur ce secteur sont en déclin. Je ne suis pas sûr que cette situation s’arrange avant quelques mois.
Prudence, donc.
Cordialement
Florent Detroy