Par Frédéric Laurent (*)
Les petits épargnants, par manque de connaissance des marchés financiers, finissent toujours par investir au plus mauvais moment.
Bien sûr, tout le monde sait "qu’il faut acheter au son du canon et vendre au son du violon". Pourtant mon expérience des marchés me pousse à croire qu’il se passe presque toujours l’inverse pour les petits porteurs.
Il faut comprendre que le marché est fait et tenu par des institutionnels. Il suit des cycles économiques, c’est-à-dire qu’après une période de hausse plus ou moins longue, lui succède forcément une période de baisse ou de consolidation (cela revient au même pour vous).
Et pourtant, le petit porteur, — très souvent mal conseillé par son "banquier" (qui est en fait un commercial qui cherche juste à lui vendre les produits de la banque afin de toucher sa commission) — se retrouve systématiquement à investir au plus haut… et revendre au plus bas.
Peut-être vous reconnaîtrez-vous dans l’exemple qui suit… car des millions de petits porteurs l’ont vécu.
Rappelez-vous : nous sommes en été 1998. Le CAC est 4 500 points. Le petit épargnant, notamment français, par sa méconnaissance des marchés et sa relative aversion au risque, a tendance à penser que les marchés actions sont toujours risqués et que ce n’est pas pour lui.
A partir de là, il s’en détourne jusqu’au jour où, pressé par son entourage — ses voisins qui lui font miroiter leurs plus-values juteuses enregistrées les derniers mois, ses relations, son banquier, ses amis qui lui disent "quand même, tout le monde profite de la hausse sauf toi !" –… il réfléchit.
Le rendement de son livret de caisse d’épargne à 3% ou le rendement d’un contrat d’assurance-vie en fonds garanti à 4% lui paraissent alors bien maigres. Lui viennent des envies de fortune, de richesse, et de, lui aussi, participer à cette fête du profit qui parait si facile et quasi illimitée.
En fait il lui aura fallu des mois pour arriver à cette conclusion : lui aussi peut investir et lui aussi a droit à sa part du gâteur puisque même ses voisins en profitent !
Il ouvre alors un compte-titres — pour le plus grand bonheur du guichetier de sa banque à qui il demande conseil (erreur ! rappelons-nous que le "banquier au guichet" n’est qu’un commercial sorti de son école et qui n’a en général aucune connaissance boursière).
Et là, tout se passe en fait comme il en a toujours rêvé : son investissement, modeste pour un démarrage (car il entend bien voir comment cela se passe), prend des allures d’envolée lyrique. Pensez donc : 10% en l’espace de quelques semaines ! C’est ce qu’il obtenait en plus de deux ans sur ses précédents placements.
Alors c’est décidé : il arrive à convaincre son épouse que la bourse et les placements financiers connaissent une croissance phénoménale, que l’époque a radicalement changé et que le krach de 29, c’est du passé. Il est bien décidé à lui aussi profiter de cette manne inespérée. Même le chauffeur de taxi qui le ramène de l’aéroport (à la suite d’un petit voyage pour voir ses enfants à l’autre bout de la France), lui dit qu’il vient de réaliser des profits extraordinaires sur des sociétés dont il n’a jamais entendu parler mais qui représentent, de source sûre, l’avenir ! Les potentiels de profits dont énormes, et il faudrait être fou pour passer à côté.
Nous sommes alors en été 99, il fait beau, et il songe à tous les plaisirs auxquels il pourra succomber très bientôt. Nouvelle voiture, petit voyage en amoureux avec Madame — il lui a promis depuis si longtemps ! — et puis… on offrira un ordinateur à notre petit-fils… Un an s’est écoulé depuis ses premières réflexions : le CAC est à 6 500 points.
C’est décidé : fini les placements pépères, et mesurés… à nous la fortune ! Il vide son livret de caisse d’épargne, une bonne partie de son assurance-vie et investit le tout sur des sociétés technologiques présentées sous leur meilleur jour par son conseiller (bancaire, toujours).
A qui achète-t-il ? Aux institutionnels qui, en tant que professionnels des marchés, vendent car ils ont compris qu’il était temps de prendre ses bénéfices.
Début 2000, il fait nettement moins beau ; le CAC 40 a connu une sévère baisse, une chute de plus de 10%… mais conforté par son conseiller, ses nouvelles lectures financières grand public, on lui conseille de "moyenner à la baisse".
Ah, la moyenne à la baisse ! Avec ça, on ne peut pas perdre, puisqu’on abaisse son prix d’achat moyen en réinvestissant son reste d’économie à bon marché (les cours ont baissé) ! Avec cette martingale, impossible de perdre. Il n’y a plus qu’à attendre que le marché remonte pour réaliser la plus-value tant attendue.
Malheureusement, la descente aux enfers ne fait que commencer. Elle sera brutale et rapide. Le CAC 40, après avoir frôlé les 7 000 points tant espérés, a vu la capitalisation boursière fondre comme neige au soleil. Il arrive sur les 2 500 points au début 2002. Notre petit épargnant a perdu en deux ans près de 50% de son capital. Il lui faut maintenant 100% de hausse pour refaire ses pertes !
Poussé par son entourage familial, par sa femme qui le regarde comme un bon à rien, il vend ce qui lui reste à perte (très grosse). Plus jamais il ne veut plus entendre parler des marchés financiers après ce désastre financier et personnel.
2007 arrive et l’histoire recommence. Depuis plus d’un an, son conseiller le tanne pour réinvestir, ses amis lui donnent des conseils imparables, et ses voisins lui font à nouveau miroiter les profits qu’ils ont réalisés ces deux dernières années.
Attention danger ! L’histoire recommence ! A mon avis, les marchés sont dans une tension telle que le risque de krach est bien là. Alors-vous encore perdre 50% de votre capital en investissant trop tard, parce que votre "banquier" vous aura encore conseillé que… ?
Dans un marché tel que nous allons certainement le connaître, rappelez-vous que le but premier est : ne pas perdre d’argent, préserver votre capital de l’inflation, de la baisse du pouvoir d’achat et vous assurez une sécurité financière ! Il faut dès à présent absolument penser à protéger votre capital, à gérer votre patrimoine de manière prudente et, ponctuellement, vous positionner sur quelques opportunités bien sélectionnées.
Mais c’est évidemment tout un programme… sur lequel je reviendrai prochainement : restez à l’écoute, les choses vont changer pour les investisseurs individuels !
Meilleures salutations,
Frédéric Laurent
Pour la Chronique Agora
(*) Gestionnaire de patrimoine et investisseur de talent, Frédéric Laurent aide depuis des décennies les épargnants français à protéger leur capital tout en le faisant prospérer. Il mettra bientôt toutes ses compétences à votre service — surveillez de près vos e-mails pour tout savoir !