La pandémie a eu un impact délétère sur l’économie – et, quoi qu’en disent les médias, la reprise sera difficile… et ne se fera pas sans répercussions très négatives pour les ménages et les investisseurs.
L’absence d’accélération de l’inflation des prix à la consommation malgré le ralentissement de la croissance de la productivité depuis la fin des années 90 et le début des années 2000 (qui n’est guère surprenant compte tenu de l’accumulation de mauvais investissements) est remarquable.
L’une des raisons souvent invoquées pour expliquer ce phénomène (en fait étroitement lié à l’absence de boom économique majeur malgré des taux d’intérêt artificiellement bas) réside dans la sclérose économique provoquée par l’inflation monétaire.
Certains ménages, victimes d’une taxe de répression monétaire (TRM) élevée et qui ne s’étaient pas laissés séduire par les promesses de plus-values potentielles sur les marchés financiers, n’ont cessé de renforcer leur épargne pour leur retraite.
Généralement, les investisseurs en actions n’ont pas vraiment tendance à récompenser les entreprises qui réalisent des investissements murement réfléchis et qui se préparent pour la prochaine crise. A la place, ils suivent la tendance et sont véritablement obnubilés par les miracles de l’ingénierie financière.
Cela implique que la perception par les autorités et les marchés du niveau auquel se situe le taux d’intérêt dit neutre est tombé très largement en dessous de ce qu’il aurait été dans un régime monétaire sain.
Ce n’est pas tout…
Vous avez un monopole ?
Un autre facteur explique cette sclérose : le renforcement du pouvoir monopolistique, lui-même alimenté par l’inflation des prix des actifs. Les entreprises qui sont parvenues à convaincre les investisseurs (qui ne perçoivent à présent que des intérêts faméliques sur leur épargne) qu’elles étaient sur le point d’obtenir une position monopolistique (ou qu’elles pourraient y parvenir dans le futur) ont réussi à envoyer le cours de leurs actions à des niveaux stratosphériques.
L’espoir de pouvoir bénéficier d’une position monopolistique est un élément-clef pour comprendre l’engouement du marché pour le secteur du numérique, caractérisé par d’importants effets de réseau et où le gagnant remporte toute la mise, ce qui est particulièrement séduisant pour les spéculateurs.
Les entreprises qui sont dans cette démarche de construction d’une position monopolistique bénéficient d’un coût des fonds propres particulièrement bas et peuvent donc éradiquer plus facilement toute concurrence potentielle de nouveaux entrants à l’aide d’une combinaison de baisse des prix et de rachats préventifs. La perte de dynamisme économique qui en résulte se manifeste par une baisse du taux d’intérêt neutre.
Par conséquent, les taux bas (voire négatifs) n’ont pas entraîné d’accélération de l’inflation des prix à la consommation, alors que dans le même temps l’inflation du prix des actifs ne montre aucune tendance endogène de retournement, comme cela aurait pu se produire en raison de la baisse des taux de profit ou de l’augmentation du taux de défauts sur les crédits, et ne rencontre aucune résistance politique.
En fait, nous sommes maintenant depuis plusieurs années dans une situation où une taxe de répression monétaire élevée coexiste avec une faible inflation des prix à la consommation et une inflation persistante des actifs (l’inflation des actifs est ici mesurée par le degré auquel les signaux-prix sur les marchés financiers sont faussés par l’inflation monétaire).
Impact délétère
Il paraît plausible que la pandémie ait prolongé la durée de cet Etat stationnaire de l’inflation des prix à la consommation et des actifs. Quelles que soient les histoires rapportées par les médias financiers, le fait est que la pandémie a eu un impact délétère sur le niveau de prospérité économique.
Outre le fait que les taux de croissance trimestrielle fantastiques qui sont annoncés ne sont qu’une illusion d’optique, même les économies (comme celle des Etats-Unis) qui sont maintenant revenues au même niveau de PIB qu’à la veille de la pandémie ont définitivement perdu des revenus cumulés considérables au cours de cette période.
De plus, le PIB durant la pandémie (et même encore à présent) inclut de nombreuses dépenses liées à la guerre contre le coronavirus — ce qui n’est normalement pas considéré comme un élément de prospérité.
Compte tenu de l’accélération de l’inflation monétaire et des émissions massives d’emprunts d’Etat pour financer les aides et autres transferts publics, il est possible que, dans l’ensemble, les citoyens des pays développés aient le sentiment de bénéficier d’une situation plus confortable. Si tel est le cas, alors c’est une illusion fondée sur la méconnaissance de la TRM qui est actuellement imposée à grande échelle et des autres impôts qui vont nécessairement s’alourdir.
Ces facteurs fondamentaux représentent un frein aux dépenses privées. Nous devons également ajouter le déclin potentiel à venir des investissements des entreprises positionnées dans les secteurs qui ont connu un boom (ou une bulle ?) en raison de la pandémie.
Par conséquent, le niveau des taux d’intérêt compatible avec un certain équilibre du système économique suite au reflux de la pandémie pourrait être inférieur à celui de la période pré-pandémique.
Les gouvernements et les banques centrales pourraient ainsi disposer de nouvelles marges de manœuvre pour manipuler les taux d’intérêt à la baisse sans provoquer une accélération de l’inflation des prix à la consommation. Ils pourraient alors engranger des montants encore plus importants au travers de la TRM, sous couvert de l’inflation des prix des actifs qui reste populaire.
Scénarios alternatifs
Il existe cependant des scénarios alternatifs dans lesquels les montants collectés au travers de la TRM diminueraient ; les gouvernements se tourneraient à la place vers une taxe par l’inflation.
Supposons par exemple qu’un nouveau programme de « relance », qui aurait été mis en place au cours de l’hiver 2021-2022 face à l’émergence d’un retournement à la baisse du cycle économique (ou pire), n’ait pas réussi à empêcher le passage d’une situation d’inflation des prix des actifs à un krach des marchés financiers puis à une récession.
Au moment où il apparaîtra clairement que la somme colossale de mauvais investissements réalisés au cours des dix dernières années (y compris durant la pandémie) ne représente qu’un stock de capital obsolète, que les dépenses publiques atteindront de nouveaux sommets et que la Fed adoptera des politiques monétaires encore plus radicales, tous ceux qui crient au loup concernant la menace d’un emballement de l’inflation des prix à la consommation pourrait bien finir par avoir raison.
Article traduit avec l’autorisation du Mises Institute. Original en anglais ici.