La guerre commerciale s’intensifie. Musk, malgré lui, en est l’un des piliers.
Lundi, Kevin Hassett, conseiller à la Maison-Blanche, a alimenté la rumeur selon laquelle le président mettrait en « pause » les droits de douane afin de donner aux pays une chance de s’entendre avec l’équipe de Trump. Les actions se sont envolées – semblant, pour un temps, inverser la tendance à la baisse.
Hier matin encore, il semblait que le creux de la vague était atteint.
Mais ensuite, Trump a mis fin à tout espoir persistant d’être un homme raisonnable. CNN rapporte :
« Le président Donald Trump s’apprête à imposer mercredi une taxe stupéfiante de 104% sur toutes les importations chinoises, a annoncé mardi la secrétaire de presse de la Maison-Blanche, Karoline Leavitt… La Chine devait déjà voir ses droits de douane augmenter de 34% mercredi, dans le cadre du paquet tarifaire ‘réciproque’ de M. Trump.
Mais le président a ajouté 50% supplémentaires après que Pékin n’a pas renoncé à sa promesse d’imposer 34% de droits de douane en représailles sur les produits américains avant midi mardi, ajoutant 84% de droits supplémentaires. Les actions américaines, qui ont grimpé en flèche mardi matin, ont commencé à baisser à la suite des commentaires de Leavitt. A 15 heures, le Dow Jones, le Nasdaq et le S&P 500 étaient tous en territoire négatif.
Leavitt explique :
‘Le président Trump a une colonne vertébrale d’acier, et il ne se brisera pas.’ »
Cette « colonne vertébrale d’acier » a été martelée par des « conseillers » véreux, notamment Peter Navarro, qui lui ont donné la forme qu’elle a aujourd’hui.
Selon la presse, d’autres initiés préféraient utiliser les droits de douane comme simple outil de négociation. Mais Navarro n’est pas vraiment intéressé par le fait d’encourager le libre-échange. Voici ce qu’il a déclaré :
« Aux dirigeants mondiaux qui, après des décennies de tricherie, proposent soudain d’abaisser les droits de douane, sachez que ce n’est que le début. »
Le début de quoi ? Rien de bon, à notre avis.
Elon Musk a rétorqué que M. Navarro était « un véritable crétin », « plus bête qu’un sac de briques », et que « ce qu’il dit est manifestement faux ».
Elon a sans doute raison sur ce point. Il n’en demeure pas moins que c’est une déclaration incroyable à entendre de la bouche d’initiés de la Maison-Blanche. D’autant que les droits de douane défendus par Peter Navarro sont au coeur même de la politique économique de Trump.
Alors, si l’architecte est un crétin, que dire du bâtisseur ? Et pourquoi Musk fait-il partie de l’équipe ?
Elon Musk est aujourd’hui le principal bailleur de fonds de l’équipe Trump, dont il est devenu l’un des membres les plus en vue. Grâce à son soutien, Trump et Navarro ont pu chambouler l’ordre commercial mondial – ce système de libre-échange, aussi imparfait soit-il, qui a permis à plus de gens de sortir de la pauvreté que n’importe quelle autre politique économique dans l’Histoire.
Prenez la Chine, par exemple : environ 800 millions de personnes y ont rejoint l’économie moderne en une génération, atteignant un niveau de vie désormais comparable à celui de nombreux pays européens ou des Etats-Unis.
Mais Navarro semble incapable de comprendre ce phénomène avec des mots simples.
« Depuis 1976 – l’année où les déficits commerciaux américains sont devenus chroniques — jusqu’en 2024, les Etats-Unis ont accumulé un déficit commercial total supérieur à 20 000 milliards de dollars. Cela représente plus de 60% du PIB américain actuel. Résultat : des intérêts étrangers ont mis la main sur des terres agricoles, des logements, des entreprises technologiques… et même une partie de notre approvisionnement alimentaire. »
Mais les Etats-Unis ont-ils vraiment « transféré » de la richesse réelle ? Pas vraiment.
Les étrangers nous ont envoyé des voitures, des T-shirts, des gadgets — des biens tangibles, de la vraie richesse. Et que leur avons-nous donné en échange ? Des reconnaissances de dette : des dollars, des bons du Trésor.
C’est ça, un déficit : si nous leur avions donné des biens d’une valeur équivalente, il n’y aurait pas eu de déficit. Mais comme ce que nous avons fourni valait moins que ce que nous avons reçu, la différence a été comblée avec de la monnaie. Nous avons reçu des choses ayant une vraie valeur… et leur avons remis des I.O.U.s.
Comme nous l’évoquions hier, les conseillers de Trump interprètent le déficit commercial comme une preuve de « tricherie ». Pour eux, si un pays nous vend plus que nous ne lui vendons, c’est qu’il nous « arnaque ». Une interprétation populiste qui marche en politique – mais certainement pas en économie.
En suivant cette logique, les Etats-Unis auraient donc été des tricheurs pendant un siècle, disons des années 1870 aux années 1970. Pendant cette période, ils ont inondé le monde de tracteurs, de chars, de pétrole, de nourriture, de vêtements, de films… et en retour, ils ont accumulé des excédents convertis en or.
C’est ainsi que les Etats-Unis sont devenus le plus grand détenteur d’or au monde.
Puis, tout a basculé. Comment expliquer un tel retournement de situation ? Les Américains sont-ils passés du statut de champions de l’exportation à celui de pigeons du commerce mondial ?
La réponse, cher lecteur, ne se trouve ni dans les étoiles, ni chez nos partenaires commerciaux… mais en nous-mêmes. Ce qui a changé, c’est le système monétaire mondial, bouleversé par les Etats-Unis.
Après 1971, les Etats-Unis ont cessé d’exporter des biens réels pour exporter des dollars déconnectés de l’or, ainsi que d’autres instruments de dette. Produire des billets ou des bons du Trésor est infiniment plus simple que de produire des voitures ou des sous-vêtements.
Musk, lui, fabrique de vrais objets. Une machine qui fore des tunnels géants. Une voiture devenue un leader mondial. Un programme spatial capable de sauver des astronautes. Un réseau de satellites qui offre une couverture globale.
Il a bâti un empire de sociétés tangibles, produisant des choses bien réelles (même si sans doute largement surévaluées par les marchés américains). Il comprend l’économie réelle. Ce qu’il ne maîtrise pas, en revanche, c’est la politique.
Et Navarro ? Que sait-il au juste ? Sait-il seulement quoi que ce soit ?
Selon Musk : « Il n’a rien construit. »
1 commentaire
« Comment expliquer un tel retournement de situation ? Les Américains sont-ils passés du statut de champions de l’exportation à celui de pigeons du commerce mondial ? »
Ce qui a changé c’est tout simplement que l’Occident ne domine plus le monde ni scientifiquement, ni techniquement, ni économiquement, ni financièrement. Fini le Mondialisme, récente appellation du Colonialisme. Bonjour la Mondialisation. La Libre Concurrence a servi les intérêts Occidentaux pendant plus d’un siècle. Il va falloir la combiner avec le Protectionnisme. Trump est sans doute moins idiot qu’on le dit.