Par Jean-Claude Périvier (*)
Assurance tous risques
Les fonds de pension ont bien compris l’intérêt d’investir dans les infrastructures : c’est une exposition de long terme qui engendre une visibilité financière idéale sur la croissance des bénéfices des opérateurs, avec des rendements assez stables, sans risques prévisibles. Est-ce pour autant prendre une assurance tous risques en bourse ? Bien entendu, ce n’est pas le cas, ce serait trop beau.
La recherche que j’ai effectuée pour vous sur ce thème laisse toutefois apparaître qu’il n’y a pas à proprement parler une classe d’actifs "infrastructures". En réalité, les vecteurs d’investissement dans ce domaine sont des sociétés industrielles ou des utilities. Ce qui implique l’inconvénient de présenter une exposition à d’autres secteurs. Le cas typique est celui des cimentiers, impliqués dans la construction des ponts, des ouvrages publics, mais aussi dans le logement et l’immobilier, ce qui est pénalisant actuellement.
Tout investissement n’est pas dénué de risque. Il y a toujours un risque de ralentissement de la demande, comme en ce moment avec le ralentissement de la croissance de l’économie mondiale. J’ai dit "ralentissement de la demande, ralentissement de la croissance", je n’ai pas dit "arrêt, baisse de la demande". Tout simplement parce que c’est impossible pour les infrastructures, sauf à revenir en arrière dans le temps, vers des situations des siècles antérieurs. Et toute l’histoire économique le démontre, nous vivons des cycles, ou des phases si vous préférez, enchaînant ralentissement et accélération. N’oubliez pas que les infrastructures sont un thème permanent : entretien, réparation, amélioration, nouveaux besoins, la croissance ininterrompue de la population mondiale conduit à des phénomènes d’usure comme de renouvellement des infrastructures.
Ne soyez donc pas surpris ni déçu si les titres qualifiés "infrastructures" subissent un déclin dans un marché baissier. Lorsque le marché se sera stabilisé, c’est là que vous verrez tout le bénéfice que vous pourrez tirer de ces investissements.
Construire, toujours construire
Spécifiquement, parlons des grands chantiers : construction d’immeubles d’habitation ou de bureaux, routes et autoroutes, barrages, etc. Les entreprises hexagonales se défendent plutôt bien dans ce secteur.
Nous n’avons que l’embarras du choix, car les entreprises françaises sont présentes aux premières places dans les grands chantiers du monde : Vinci construira le plus grand pont du monde entre Bahreïn et le Qatar, le même Vinci est en charge d’un immense barrage sur le Nil, Bouygues jette un pont en Corée du Sud sur la baie de Masan, tout en étant présélectionné pour l’élargissement du canal de Panama, Suez va construire et exploiter un gigantesque barrage et une centrale hydroélectrique au Brésil, etc.
Les héros sont fatigués
Seulement les bourses s’effondrent. Au sein de la cote, les plus belles entreprises comme Vinci, Lafarge, St Gobain, en France, piquent du nez de manière incroyable. L’explication avancée tient à la remontée des taux d’intérêt, pénalisante pour ces sociétés dont l’endettement est endémique, soit parce qu’il est lié au métier qui demande de lourds investissements, soit pour financer des acquisitions, gage de parts de marché supérieures.
Une autre explication serait que la croissance mondiale va s’essouffler, que celle des pays émergents, dont les fameux BRIC, va ralentir, et par conséquent les carnets de commandes vont se vider. Si la première explication peut faire sens, la seconde me paraît assez théorique : oui, la croissance de la Chine va baisser de 11,7 à 10% peut-être. Mais 10% c’est colossal ! Même chose pour l’Inde, et idem pour la croissance mondiale qui passerait à 4,8%.
Reste l’inflation, due en grande partie au pétrole cher, lui-même lié à la baisse inéluctable du dollar, cette dernière érodant mécaniquement les marges à l’export. Les marchés ont toujours raison, dit-on. En l’occurrence, je ne le crois pas. Mais ils reflètent un état d’esprit des intervenants qui, actuellement, font preuve du pessimisme le plus sombre, et ont peur de tout.
Le boom du siècle à portée de main
Le monde est au début d’un boom extraordinaire des infrastructures, évalué à plus de 40 milliards de milliards de dollars, qui seront investis sur plusieurs décennies. Les entreprises qui vont en bénéficier sont celles qui apportent du savoir-faire en construction, en ingénierie, en transport, en financement, ainsi que celles qui fournissent des produits de base comme l’acier, le ciment, les équipements lourds et matériaux de construction.
Dès à présent, les dépenses en infrastructures dans les pays émergents sont supérieures à celles de l’Europe et des États-Unis pris ensembles Je ne saurais trop vous recommander de participer à cette fantastique épopée des infrastructures, et même si aujourd’hui tout paraît sombre, n’ayez aucun doute : demain le soleil se lèvera, ce qui a baissé montera.
Avez-vous observé la marche d’un pendule, ou vous souvenez-vous de vos cours de base de physique sur le pendule ? Le pendule est têtu : quand il a atteint sa position extrême d’un côté, il repart immanquablement dans l’autre sens. Jusqu’à un excès inverse. Et il repart vers le précédent. Nous arrivons à un point d’excès extrême. Le pendule va repartir dans l’autre sens.
Meilleures salutations,
Jean-Claude Périvier
Pour la Chronique Agora
(*) Parallèlement à sa carrière dans le conseil aux entreprises et l’intelligence économique, Jean-Claude Périvier s’intéresse à la Bourse et à l’investissement depuis 1986. Analyste de talent, il excelle à détecter et anticiper les tendances futures… pour en déduire les meilleures opportunités de gain dans sa toute nouvelle lettre d’information, Défis & Profits.