Par Isabelle Mouilleseaux (*)
Une stratégie de sécurisation des approvisionnements inévitable
La Chine a clairement annoncé vouloir se constituer des "stocks stratégiques d’uranium" et vouloir prendre des participations dans des minières stratégiques. Les autorités chinoises pousseraient actuellement leurs entreprises nationales à acheter la matière radioactive, et à prendre des participations dans des minières d’uranium pour sécuriser les approvisionnements futurs.
Sachant que le Canada produit plus de 50% de l’uranium, et l’Australie environ 30%, le champ de bataille chinois est clairement le continent australien et ses centaines de minières. Avec l’effondrement des prix, les petits producteurs d’uranium ont vu leur cours dévisser et sont devenus des proies faciles pour les Chinois.
Les minières veulent pouvoir produire plus !
Les grands producteurs d’uranium le savent : d’ici quelques années la production sera insuffisante face à l’offre, puisque le déstockage d’armes nucléaires ne fera plus "tampon". Le marché est actuellement déficitaire de 60 millions de livres chaque année. Or les professionnels s’attendent à un doublement de la capacité en réacteurs nucléaires et une hausse de la demande de 67% d’ici à 2030 ! Alors aujourd’hui, ils cherchent à accroître leurs réserves, malgré des prix de l’uranium au plus bas.
Ainsi, le plus gros producteur mondial Cameco (18% de la production minière mondiale d’uranium) a indiqué que les cours étaient tombés à des niveaux tellement bas qu’il était en quête d’une acquisition, avec une enveloppe de deux milliards de dollars sous le coude.
Energy Resources of Australia, en partie détenu par Rio Tinto, et qui produit 11% de l’offre mondiale, a annoncé vouloir accroître sa production future en investissant dans sa mine de Ranger.
En attendant, où va le prix ?
Nous avons probablement atteint un point bas à 40 $ la livre. Sinon la Chine et les minières ne passeraient pas en mode "attaque".
Certains analystes voient l’uranium à 80 $ d’ici fin 2009. Je n’y crois pas. Si déjà il affiche 45 $, ce sera pas mal par ces temps de crise agités. D’après les prévisions de Goldman Sachs et JP Morgan, le cours de l’oxyde pourrait stagner autour de 50 $ jusqu’à 2011. Pour le coup, cela me paraît trop pessimiste. La Deutsche Bank a conclu un accord et table sur un cours de 80 $ fin 2010. +100% par rapport au prix actuel de 40 $.
Il existe clairement un potentiel de hausse à long terme
C’est peut être la raison pour laquelle Lehman Brothers a affirmé "haut et fort" qu’il ne braderait pas son stock d’uranium à 40 $. LB patientera pour vendre dans de meilleures conditions. La banque s’attend donc à une remontée du cours dans le temps.
Mon avis ?
Les fondamentaux long terme du marché de l’uranium me paraissent clairement haussiers. Le prix s’est temporairement effondré, tiré vers le bas par la crise, le décrochage des marchés et les rumeurs.
C’est probablement une bonne opportunité de se positionner, à condition d’investir dans une optique de long terme. Atteindre fin 2010 un cours de 60 $/70 $ la livre me paraît réaliste, à condition que les économies aient redémarré d’ici là, ce qui n’est pas encore gagné. On visera les 80 $ pour 2011.
En attendant, il y a clairement mieux que l’uranium pour investir actuellement : le pétrole. Son marché est dans la même configuration que celui de l’uranium : tendance long terme aussière, prix temporairement très bas. Sauf que la visibilité sur ce secteur est bien meilleure et les opportunités plus sûres.
Meilleures salutations,
Isabelle Mouilleseaux
Pour la Chronique Agora
(*) Isabelle Mouilleseaux rédige chaque jour l’Edito Matières Premières & Devises (Publications Agora), une lettre internet gratuite consacrée au marché des matières premières. Passionnée depuis toujours par la Bourse et par tous les marchés financiers, Isabelle s’est spécialisée dans les matières premières et veut permettre à l’investisseur particulier de découvrir et de comprendre l’investissement sur ce marché des matières premières.
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