La Bourse n’est qu’un monde de signes censés représenter une réalité dont ils s’éloignent pourtant de plus en plus…
Pas besoin d’être économiste, pas besoin d’ordinateur : une lecture éclairée du graphique ci-dessous permet de comprendre le monde qui a été créé depuis le début de l’année 2009.
C’est un monde imaginaire.
Je vous rappelle que le monde de la Bourse est un monde en lui-même : un monde de signes. Les cours de Bourse que vous voyez sur votre écran ou dans les journaux sont des signes, exprimés en monnaie.
Un prix, c’est un signe qui est accolé à une réalité ; ce n’est pas la réalité.
Ce monde de signes a sa vie propre en fonction de sa logique interne, des théories, des nouvelles, des volontés des autorités.
Et cette vie propre a été déconnectée de la vie réelle.
De plus en plus de monde à table
La richesse boursière ne reflète pas la richesse réelle, elle reflète le « passif » – c’est-à-dire les droits que les participants au jeu boursier croient détenir. Et ces droits rapportés, mis en perspective avec la production réelle de richesses, sont fortement réduits. Ils sont dilués.
Présenté de façon triviale, il y a de plus en plus de monde à table pour un plat qui n’a pour ainsi dire pas progressé. J’appelle cela la disjonction : on a beaucoup plus de promesses de repas que l’on a de nourriture à offrir aux convives.
La Bourse n’est pas la richesse réelle. Non, la richesse réelle ce sont les biens, les services. La Bourse n’est que la sommation, la masse de bons, de droits émis sur cette richesse réelle.
Je dis que le monde boursier est un monde en soi, un monde imaginaire.
Il faut préciser que c’est un monde dans lequel on échange de la monnaie élastique contre des promesses. Si la masse de monnaie enfle sans cesse comme c’est le cas depuis 2009, alors le monde imaginaire reflète cette inflation de la monnaie : il se déconnecte peu à peu et de plus en plus du monde réel.
La valeur est de moins en moins dans le monde vrai et de plus en plus dans la tête des gens. Ce qui signifie qu’ils se paient les uns sur les autres.
Depuis 2009 les autorités luttent, disent-elles, pour faire monter les prix des biens et services du monde réel.
Elles créent de la monnaie pour cela.
Hélas, elles ont échoué à produire l’inflation tant désirée. L’inflation ne s’est manifestée que dans les prix de la Bourse, dans le monde de l’imaginaire, dans le monde des promesses, créant une disproportion sans précédent.
Cette disproportion – dont le nom technique est « valorisation boursière excessive » – signifie que la fragilité financière est extrême.
C’est pour cela que ces mêmes autorités sont obligées de répéter sans cesse : non, il n’y a pas de bulle, tout est normal.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]