Par Léo Golovine (*)
Quand Wall Street s’enrhume…
Très classiquement, depuis une bonne vingtaine d’années, on parle d’une forte corrélation entre les marchés européens et américains. Wall Street semble dicter sa loi au monde entier… et combien de séances européennes ont-elles complètement changé de visage vers 15-16 h (Paris), quand ouvre New York ?
Cependant, la corrélation, bien qu’elle reste forte, n’est pas parfaite. Parfois l’Europe est "en retard" par rapport aux Etats-Unis, et parfois elle évolue de manière indépendante… D’ailleurs, si le Dow Jones (à la différence du Nasdaq Composite) a récemment encore marqué ses plus hauts historiques, le CAC 40 en est loin, de même que d’autres indices européens.
… les Européens ont la grippe
Le phénomène ne vous aura très certainement pas échappé : en ce début d’année 2008, les principaux indices actions européens affichent un recul bien plus prononcé que leurs homologues américains. Etrange, non ? Puisque c’est bien d’outre-Atlantique que nous vient la fameuse crise des subprimes. Oui mais voilà : mondialisation de la finance et financiarisation du monde obligent, nos établissements bancaires sont eux aussi touchés — en témoignent les récentes dépréciations d’UBS ou de la Société Générale.
Et pourtant, les chiffres sont là : depuis le début de l’année, la plupart des places du Vieux Continent affichent des baisses supérieures à 10%, tandis que le S&P 500 ne perd "que" 5% et le Dow Jones 4%. Injuste oui… ce sont eux qui nous enrhument et nous qui trinquons. Que voulez-vous…
Qui des Etats-Unis ou de l’Union européenne est en meilleure santé que l’autre ?
Je vous ai déjà parlé du concept de la "force relative". Le phénomène que nous constatons aujourd’hui n’est donc pas exceptionnel. Si l’on reprend l’historique de la force relative Europe/Etats-Unis au cours de ces huit dernières années, deux périodes de forte tendance se détachent.
Pendant le dégonflement de la bulle boursière des valeurs TMT, entre 2000 et 2003, l’orientation baissière du ratio nous informe que les indices boursiers européens ont plus fortement baissé que les Etats-Unis. Certes, si on avait pris le Nasdaq pour base, cela serait moins vrai, mais ceci dit, le S&P500 intégrait lui aussi des valeurs technologiques — plus encore sans doute que les indices européens.
Inversement, alors que les marchés actions ont accentué leur dynamique haussière dès la fin 2004, les actions européennes se sont mises à faire mieux que leurs rivales (ah… quand même !). Sur les 18 derniers mois, aucune tendance ne s’est réellement dégagée, jusqu’au violent décrochage de ce début d’année… Serait-ce le commencement d’un nouveau cycle baissier ?
Ni l’un ni l’autre : les Etats-Unis nous entrainent dans leur chute !
Cette sortie par le bas d’une longue d’une période de consolidation n’augure rien de bon. Les configurations graphiques propres des indices sont baissières à moyen terme, et l’étude de cet indicateur ne vient donc que renforcer ce scénario. Avis aux haussiers…
Pour invalider ce signal, il faudrait à la fois un net retour de la force relative dans le trading range 2005-2007, et une hausse sur l’indice américain lui-même ; mais avec quelle énergie ? D’où l’économie américaine blessée, que l’on soupçonne déjà d’une récession, tirerait-elle la vigueur nécessaire pour un rebond désespéré ?
En tout cas, la corrélation entre l’Europe et les marchés américains (qui restent malgré tout la principale place financière dans le monde) risque de demeurer forte dans les mois à venir, même si elle ne devrait plus être aussi prononcée que par le passé, le poids de l’économie américaine dans le monde étant en passe de diminuer de manière "dramatique", pour reprendre le cliché anglo-saxon.
Quoi qu’il en soit, l’important pour moi c’est d’avoir une tendance claire pour jouer les turbos, même à très court terme. Et puisque cette "force relative" semble nous annoncer une tendance baissière, tant mieux : nous allons pouvoir continuer de jouer la baisse avec un effet de levier !
Meilleures salutations,
Léo Golovine
Pour la Chronique Agora
(*) En 2002, Léo Golovine fonde le site de conseils ImmenseFortune.com, qui exploite le résultat de ses recherches sur le marché. De 2002 à 2007, sa méthode aura ainsi permis de fortement surperformer les indices boursiers à l’aide d’une approche inédite de suivi de tendance et de gestion des positions. Léo Golovine est également à l’origine du seul test pratique sur le marché français de la célèbre méthode américaine Dow Dividend Approach, qui montre d’excellents résultats depuis 5 ans. Actuellement, il collabore avec plusieurs médias boursiers, continue à entreprendre et partage son temps entre Moscou et Paris dans le cadre de plusieurs projets financiers. Il est, pour les lecteurs de la Chronique Agora, l’Analyste responsable du service de trading @Turbos Trader.