Bush, Obama, Trump… et maintenant Joe Biden : la liste des présidents américains qui ne font qu’alourdir leur dette nationale s’allonge, et la crise du Covid-19 n’arrange franchement pas les choses.
Début 2021, la dette fédérale américaine a franchi la barre des 28 000 Mds$, ce qui représente 130% du PIB américain. Le Bureau du budget du Congrès américain (CBO) s’attend à ce que d’ici 30 ans, le montant de la dette publique par rapport au PIB double pour se monter à 202% de ce dernier en 2051.
Le multiplicateur budgétaire américain a beau ne plus en finir de plonger, Joe Biden compte bien mettre sa pierre à l’édifice – ou plutôt sa pelletée de terre sur le cercueil de la solvabilité budgétaire américaine.
Méga plan de relance américain : le retour de l’helicopter money
Niveau endettement, la cavalerie américaine ne semble pas près de s’arrêter. Dès le 10 janvier dernier, soit 10 jours avant l’entrée en fonction du nouveau POTUS, Bruno Bertez annonçait la couleur :
« Le mandat de Sleepy Joe aura toutes les caractéristiques d’un mandat démocrate habituel avec inflation des dépenses, déficits, gabegie, corruption, népotisme, interventionnisme et bien sûr inflation du Big Government. Encore heureux si nous échappons à la guerre. »
Pour le moment, on n’a pas été déçu puisque cette fois-ci, ce n’est plus avec les milliards que l’on jongle comme à l’époque de Donald Trump, mais avec les milliers de milliards de dollars : le nouveau plan de relance se chiffre en effet à 1 900 Mds$.
Trump ou pas Trump…
… Les Etats-Unis ont bien eu droit « au meilleur plan de relance que vous ayez jamais vu. »
L’American Rescue Plan Act of 2021 a été approuvé le 10 mars par la Chambre des représentants et signé le lendemain par Joe Biden. Le Sénat avait validé le texte le 9 mars. A toutes fins utiles, rappelons que les Etats-Unis, c’est ce pays où la Commission du budget du Sénat est présidée par Bernie Sanders.
L’un des aspects les plus significatifs de ce plan est le retour de l’helicopter money. En mars, le Trésor US a pour la troisième fois fait des chèques à sa population. Chaque Américain gagnant en-dessous de 80 000 $ annuels s’est vu crédité de 1 400 $ directement sur son compte en banque.
Une fois de plus, cela a été l’occasion de vérifier que le personnel politique change d’avis comme de chemise, en fonction de ses intérêts du moment. Je vous laisse en l’occurrence décider qui a raison entre la Janet Yellen de 2018 (présidente de la Fed) et celle de 2021 (secrétaire au Trésor).
30 octobre 2018 : « Yellen affirme que la hausse du déficit n’est pas tenable : ‘si j’avais une baguette magique, j’augmenterais les impôts’. »
6 mars 2021 : « Janet Yellen déclare que le Congrès doit ‘faire preuve d’audace’ pour le plan de relance Covid. »
Le plus grand plan de relance de l’histoire américaine ?
Bref, cette fois-ci, il y en a pour la bagatelle de 1 900 Mds$ (1 600 Mds€), soit grosso modo le montant du PIB canadien.
Ces chiffres ne disent pas grand-chose, cependant. Comparons plutôt le plan Biden (« Covid 6 », en noir sur le graphique ci-dessous) aux mesures budgétaires décidées sous Trump (« Covid 1-5 », en jaune). On s’aperçoit alors qu’avec les démocrates, la distribution d’argent public a encore changé de braquet…
Si l’on envisage maintenant la situation en pourcentage du PIB américain, comme le permet le graphique ci-dessous…
(Source : SRP)
… On s’aperçoit enfin que le plan Biden est d’une ampleur bien plus importante que les mesures budgétaires mises en place pour faire faire à la crise de 2008 sur la séquence 2008-2011. Il s’agit donc de l’un des plans les plus importants de l’histoire des Etats-Unis.
Il va nous falloir nous habituer à ces chiffres faramineux. Mi-mars, Goldman Sachs indiquait que l’administration Biden n’allait sans doute pas en rester-là. La banque anticipait un plan de relance total doté d’une enveloppe de 4 000 Mds$…
Un pronostic qui a de bonnes chances de se concrétiser puisqu’on apprenait le 23 mars que la Maison Blanche envisage de consacrer 3 000 Mds$ aux infrastructures américaines.
Bien sûr, un plan aussi faramineux ne serait pas financé intégralement par la dette : une augmentation du taux de l’IS a été évoquée. Elle ne permettrait cependant de couvrir qu’une portion infime de ce nouveau plan et, in fine, le déficit budgétaire américain continuerait de se creuser.
Quelle performance économique en 2021 pour l’économie américaine ?
Pour ce qui est des 1 900 Mds$ déjà votés, il est attendu par l’exécutif américain qu’ils permettent aux Etats-Unis d’atteindre 6% de croissance en 2021 – un niveau qui n’a plus été observé depuis 40 ans.
Notez cependant que ce genre de prévision est plus que jamais à prendre avec des pincettes. En l’occurrence, l’OCDE n’anticipe que 3,2% de croissance pour l’économie américaine cette année, soit pas loin de 50% de moins.
Si c’est l’administration Biden qui voit juste, cela ramènerait alors la croissance économique américaine sur sa tendance pré-Covid.
Faut-il se réjouir de cette orgie de dépense publique ? S’il s’agit de reproduire l’expérience américaine des années 1960, certainement pas.
Retour aux errements de la Great Society de Lyndon Johnson : grâce à Biden, les pauvres n’ont pas fini d’être pauvres !
Ces montagnes d’argent déversées sur l’économie vont évidemment avoir un effet sensible en termes de croissance à court terme. Pour le reste c’est une autre histoire. Comme l’expliquait Jean-Marc Daniel sur BFM Business le 15 mars :
« Ils en sont sur le plan économique à des idées des années 60. Ils ont une vision de l’économie où plus on dépense, plus on a de croissance économique. Or tout cela a été infirmé par la réalité depuis une cinquantaine d’années. »
La référence est juste puisque, comme l’écrivait Jason L. Riley dans le Wall Street Journal le 9 mars dernier :
« Le programme d’aide Covid est la plus grande expansion de l’Etat-providence depuis la Great Society de Johnson. Or l’expérience des années 1960 devrait contribuer à tempérer les attentes ».
Avant que Johnson (1963-1969) n’arrive au pouvoir, le taux de pauvreté aux Etats-Unis était en déclin depuis 20 ans. Après avoir fait un plus bas à 18% en 1964, il a augmenté dans les années 1970, alors même que les successeurs de Johnson avaient étendu les programmes de lutte contre la pauvreté mis en place dans les années 1960.
Bref, dépenser de l’argent public pour combattre la pauvreté n’a jamais été très efficace.
Avec un taux de pauvreté au plus bas depuis 1959, on peut cependant douter que la réduction de la pauvreté soit l’objectif premier de l’administration Biden. Pour les détails, je vous renvoie à cet article de Contrepoints qui dresse la liste de eux qu’il s’agit de punir et des bénéficiaires :
Si vous pensez que ce genre de politique n’est qu’un léger excès de clientélisme de la part d’un système politique très libéral, détrompez-vous. Au cas où vous en doutiez, aux Etats-Unis comme en France, cela fait bien longtemps que la dépense publique n’est plus concentrée sur le régalien.