On a un peu oublié la crise de la dette italienne, mais les chambres de compensation s’inquiètent et prennent leurs précautions.
Hier, dans Les Echos, il y avait un petit article dans les pages « marchés » que peu de monde a dû lire avec avidité. Son titre : « LCH relève ses marges sur la dette italienne ».
« C’est une conséquence directe de la crise qui a secoué la dette italienne fin mai. La chambre de compensation Repoclear de LCH, spécialisée dans les opérations de pension livrée (ou repo), a décidé d’augmenter à compter de ce jeudi, les marges initiales demandées aux banques qui souhaitent utiliser leurs obligations d’Etat italiennes pour lever des financements. La chambre de compensation italienne CC & G, filiale, comme LCH, du London Stock Exchange, a fait de même. »
Les opérations de « repo » permettent à un établissement financier de lever de l’argent frais contre des titres de dette qu’il détient déjà. Il vend pour une durée fixée à l’avance ses titres, et s’engage à les racheter à l’échéance convenue.
Bien entendu, il les vend moins cher et les rachète un peu plus cher, de façon à ce que celui qui les a « pris en pension », comme disent les financiers, y trouve son intérêt.
Les chambres de compensation enregistrent ces mouvements et font office d’intermédiaires. Elles ont besoin de prendre des garanties au cas où une des contreparties faillirait à ses obligations. Ces garanties sont les marges que mentionne l’article.
Dit clairement, ceux qui veulent momentanément échanger de la dette italienne contre du cash doivent payer plus cher qu’avant et consigner en gage une somme plus importante. Ce sont les banques italiennes qui ont le plus de dette italienne à leur bilan (en dehors de la BCE, bien sûr).
Ce qui n’échappera pas à votre sagacité légendaire, cher lecteur, c’est que cette petite cuisine arrive après la crise italienne, qui est presqu’oubliée.
Voici l’évolution du rendement du 10 ans italien depuis un an :
Juste après les élections italiennes en mai dernier, les taux longs italiens ont dépassé 3% pour ensuite redescendre autour de 2,5%. Sur le marché obligataire, les rendements évoluent comme l’inverse des prix ; ceci signifie donc que les obligations italiennes – qui avaient lourdement chuté – sont en train de remonter.
Alors, les chambres de compensation enfileraient-elles des gilets de sauvetage après la tempête ? Non, il est plus probable qu’elles estiment que la crise italienne n’est pas terminée. La tempête de mai ne serait qu’un avertissement.
Les déséquilibres ne cessent de s’intensifier au sein de la Zone euro. L’indicateur de la situation est – comme le pointait Alan Greenspan – le système Target, qui comptabilise qui doit à qui au sein de l’union monétaire.
L’Italie et l’Espagne sont les plus gros débiteurs, de 400 milliards d’euros et 450 milliards d’euros respectivement, et l’Allemagne est le plus gros créditeur, de presque 900 milliards d’euros.
La politique monétaire laxiste de la BCE menée depuis la crise économique n’a fait qu’amplifier les écarts au lieu de les resserrer.
L’Italie est le Lehman Brothers de 2018.
- Elle est fragile et surendettée
- Elle ne sera pas secourue (Mario Draghi va lâcher la présidence de la BCE dans un an et les sommes en jeu sont trop importantes)
- Elle est suffisamment grosse pour déclencher un krach mondial
Mes collègues britanniques estiment que le système bancaire et financier britannique est le plus exposé à l’Italie mais le système allemand serait lui aussi ravagé.
Nous vivons dans une économie reposant sur le crédit, mais des crédits improductifs. Consommation, automobile, immobilier à des prix excessifs et surtout financement de politiques publiques absurdes : tout ceci repose sur du crédit et donc de la dette.
Nous arrivons au moment où, même avec des taux à zéro ou presque, on s’aperçoit que ces crédits ne pourront pas être remboursés.
Cette crise sera plus grave que celle de 2008 car les banques centrales ont perdu toute crédibilité. Au-delà du système financier, c’est la survie du système monétaire qui sera en jeu.
C’est pourquoi il est sage et avisé de placer un peu d’argent dans les monnaies « hors système » que sont l’or et les cryptomonnaies.