Cela fait des années que nous anticipons une hausse des prix à la consommation. Mais les gouverneurs de la Fed sont incapables de comprendre comment nous en sommes arrivés là.
Les chiffres du mois de mars indiquent que les prix à la consommation ont augmenté de 11,2% en rythme annuel. Il s’agit de la plus forte hausse des prix depuis le lancement de cette série statistique en novembre 2010. À ce rythme, (pour vous donner une idée de ce qui nous attend) la valeur réelle de la dette publique aura diminué de 3000 Mds$ à la fin de l’année.
À quelque chose malheur est bon. Et comme nous le verrons, d’aucuns n’ont pas envie de combattre l’inflation dès maintenant.
Mais peut-être que le combat est déjà fini. S’agit-il du pic de cette première vague d’inflation ? MarketWatch explique :
« L’inflation pourrait avoir atteint un pic en mars et pourrait ralentir à partir de maintenant, mais la banque centrale des États-Unis doit poursuivre la remontée de son taux directeur, a déclaré le gouverneur de la Fed Christopher Waller.
‘Je pense qu’il s’agit actuellement du pic d’inflation et qu’elle va commencer à refluer’, a déclaré Waller dans un entretien sur CNBC.
La hausse des taux d’intérêt sur le marché devrait entraîner une contraction de la demande et les cours du pétrole, qui avaient flambé dans le sillage de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, ont déjà commencé à reculer, explique-t-il.
L’inflation a atteint 8,5% en rythme annuel en mars. Il s’agit de la plus forte hausse depuis 1981. Parallèlement, l’inflation sous-jacente (hors produits alimentaires et énergie) s’est révélée plus faible que prévu en mars. Or, dans la mesure où le taux d’inflation sous-jacente est considéré comme un indicateur fiable de l’inflation future, certains économistes commencent à affirmer que nous avons franchi le pic d’inflation ».
Un repli en trompe-l’œil
Comme toute chose dans le monde de la finance, les chiffres de l’inflation peuvent être trompeurs. Au début des années 1970, le taux d’inflation « sous-jacente » était supérieur à 10%. Puis, il s’est replié à 6%. « L’inflation a été vaincue », déclaraient les experts.
Mais l’inflation n’a pas été vaincue en 1975. Il s’agissait uniquement d’un repli tactique, pas d’une débâcle. Elle a reculé, attendu trois ans puis est repartie à l’attaque, bondissant cette fois de 13% en 1979.
Répondant à l’assaut, en 1980, Paul Volcker ne s’est pas contenté de mettre fin à la fête : il a opéré un resserrement de la politique monétaire sans précédent dans l’histoire des États-Unis, avec un taux directeur porté à 20%. Les indices boursiers ont dévissé. Le taux de chômage a progressé. Les politiciens ont hurlé. Et le taux d’inflation a reculé.
Mais Jerome Powell n’est pas Paul Volcker. 2022 n’est pas 1979. Le taux de prêt de la Fed, actuellement de 0,5%, est loin des 20% d’alors. Et la dette fédérale en 1979 (827 Mrd$) n’est rien comparé aux 30 000 Mrd$ actuels. Il serait alors inutile d’acheter des obligations à long terme. Comme toujours, il manque une partie de l’histoire : la plus importante. À l’époque, Paul Volcker était déterminé. Il avait vraiment envie de ramener l’inflation sous contrôle. Qu’en est-il de Jerome Powell actuellement ? Peut-être que ce n’est pas son objectif.
Cela fait des années que nous anticipons une hausse des prix à la consommation. C’est une conséquence prévisible et évidente de la politique d’expansionnisme monétaire. Mais les gouverneurs de la Fed sont incapables de comprendre comment nous en sommes arrivés là.
Et pourtant, ils ont imprimé 8000 Mrd$ de monnaie depuis 1999. La plus grosse injection de liquidité (4000 Mrd$) s’est déroulée sur une période de 18 mois après le mois de mars 2020. Face à cette flambée de la demande, le gouvernement fédéral a également manipulé l’offre, mettant à l’arrêt des pans entiers de l’économie dans l’espoir que cela permettrait d’éradiquer le Covid. Désormais, ils compressent l’offre en infligeant des sanctions à l’un des plus gros exportateurs de pétrole au monde. C’est donc en toute logique que les prix à la consommation augmentent. Il ne pouvait en être autrement.
Une inflation hors de contrôle
Il y a un an, la baisse du dollar était l’un des paris les plus sûrs à Wall Street. La Fed peut doper artificiellement les cours des indices boursiers. Elle peut abaisser le coût du crédit. Et elle peut financer les guerres absurdes et les programmes bidon du gouvernement fédéral. Mais seulement en faisant tourner la planche à billets. Et plus la masse monétaire augmente, plus la valeur (la qualité) du dollar s’érode. C’est la raison pour laquelle vendre le dollar constitue la position courte de notre transaction de la décennie.
Cela était tellement évident qu’il aurait fallu être soudoyé pour ne pas le voir venir, ce qui semble être le cas des experts qui travaillent pour la Réserve fédérale.
Il y a deux ans encore seulement, ils déclaraient que l’inflation était trop faible. Ils ont ensuite déclaré qu’une poussée d’inflation était possible et que cela serait une bonne chose. La Fed permettrait à l’inflation d’évoluer à un rythme supérieur au taux cible de 2% pour compenser des années de faible inflation.
Mais les chiffres de l’inflation ont rapidement et largement dépassé le taux cible de la Fed, comme un pilote qui entreprendrait d’atterrir sur une piste de l’aéroport international de Los Angeles et finirait par atterrir sur la lune. Les dirigeants de la Fed ont alors déclaré qu’il ne fallait pas s’inquiéter, que les chiffres de l’inflation, étonnamment hauts, étaient seulement ‘transitoires’.
Finalement, il y a deux mois seulement, Jerome Powell a déclaré que le terme ‘transitoire’ pouvait avoir des sens différents selon les personnes. Il a alors expliqué que la Fed était en train de réagir à la menace inflationniste avec une hausse de 0,25% du taux directeur.
Environ deux semaines plus tard, il y a fort à parier que Jerome Powell a réalisé qu’il était devenu la risée des marchés. Malgré la dernière mesure, le taux directeur de la Fed reste largement inférieur au taux d’inflation, à -7,5% après prise en compte de l’inflation. Il est ainsi passé pour le Neville Chamberlain de ceux qui combattent l’inflation.
Avec un cigare entre les dents, il a promis de combattre l’inflation ‘sur les plages, dans les rues…’, avec une hausse de 0,50% du taux directeur le mois prochain. D’après les chiffres publiés cette semaine, cela donnera un taux directeur de -7,5% en termes réels.
Libre à vous de penser ce que bon vous semble, cher lecteur. Mais pour nous, cela s’apparente bien plus à une politique de conciliation qu’à une véritable confrontation.