Les politiques monétaires de la Fed sont dirigées par un principe essentiel : la crédibilité. Une bonne excuse pour prendre de mauvaises décisions.
La Fed est-elle aussi incompétente qu’elle le paraît ?
C’est ce que nous allons regarder, aujourd’hui.
L’inflation de la Fed fâche désormais les consommateurs, les investisseurs et les politiciens.
Selon CNS, durant la première moitié de février :
« Dans le comté de Los Angeles, le prix moyen du gallon d’essence standard en self-service a augmenté de quatre dixièmes de cent, […] passant à 4,754 $, soit un plus haut record enregistré pour la huitième fois ces neuf derniers jours.
Le prix a augmenté de 8,6 cents sur 12 journées, ces 13 derniers jours, avec notamment une hausse de trois dixièmes de cent enregistrée [le vendredi 11 février], selon les chiffres provenant de l’AAA [NDLR : l’association américaine des automobilistes] et de l’Oil Price Information Service. Cela représente 2 cents de plus qu’il y a une semaine, 8 cents de plus qu’il y a un mois, et 1,21 $ de plus qu’il y a un an. »
Et les électeurs le sentent passer. Selon un gros titre, les dépenses mensuelles par foyer ont augmenté de 256 $.
La Fed dans l’étau
« Faites quelque chose » dit le message passé aux gouverneurs de la Fed. Mais « allez-y mollo » dit celui de l’élite. La dernière chose qu’elle souhaite, c’est un krach retentissant à Wall Street.
Oui, la Fed est prise dans un étau.
D’un côté, il y a le maintien de taux bas et l’impression d’argent qui a payé les factures de l’Etat et enrichi les plus riches.
De l’autre, il y a l’économie des gens ordinaires, qui a désespérément besoin de stabilité, de prix constants et de taux d’intérêt honnêtes.
D’un côté, on trouve 90% des Américains – des familles qui travaillent dur avec des budgets limités, et qui ressentent l’inflation comme une rage de dent.
De l’autre côté, il y a Wall Street et l’élite, qui font les lois… contrôlent le Congrès… et la Fed elle-même.
A présent l’étau se resserre, et la crédibilité de la Fed est sur le point de se craqueler.
La « crédibilité » est presque toujours une invitation au désastre.
Alexander Hamilton a dû penser que sa crédibilité était en jeu, lorsqu’il a accepté un duel contre Aaron Burr.
C’est sur une question de « crédibilité », que l’on a persisté à envoyer de jeunes Américains se faire tuer au Vietnam… et plus tard en Afghanistan… bien longtemps après qu’ils auraient dû rentrer chez eux.
Un garde-fou pour le capitalisme
Alors quel mauvais tour va jouer la « crédibilité », cette fois-ci ?
Le mois de septembre 2008 a probablement été le moment décisif. La crédibilité de la Fed était alors également en jeu.
Ben Bernanke, le président de la Fed de l’époque, était face au Congrès. Ce moment a défini Bernanke comme un petit escroc pleurnichard, et il a également défini la Fed. A partir de là, elle allait tenir le premier rôle dans la destruction de la prospérité américaine.
Le Fed devait être le garde-fou du capitalisme. En tant que banque des banquiers, on attendait d’elle qu’elle conserve la tête sur les épaules quand les autres perdaient la leur.
Elle était censée maintenir une atmosphère apaisée et raisonnée, en termes de calculs et de réflexion, afin de prévenir le type de panique qui mène au chaos et à des pertes inutiles.
Mais le 10 septembre 2008, le président de la Fed en personne, Ben Bernanke, était planté devant le Congrès. Il n’a pas tenté de rétablir une atmosphère de réflexion apaisée, au sein des législateurs du pays, mais a fait en sorte que leurs cheveux se dressent sur la tête et qu’ils aient des visions d’apocalypse.
En gros, en vue de faire paniquer les membres du Congrès au point de voter une loi de 700 Mds$ que pas un seul d’entre eux n’avait lue… pour des raisons que personnes ne comprenait… il a eu recours au plus gros mensonge jamais raconté par un banquier central.
Sans même esquisser un sourire, Bernanke a dit au Congrès « nous n’aurons peut-être plus d’économie dès lundi » s’ils ne votaient pas cette loi de relance totalement dingue le vendredi.
C’était totalement absurde et tout le monde le savait.
Trop stupide pour réussir
Voici l’erreur que les investisseurs, les ménages, les entreprises et les spéculateurs avaient commise : ils avaient prêté ou emprunté trop d’argent.
Ils l’avaient fait car la Fed elle-même les avait fourvoyés, en maintenant des taux trop bas trop longtemps, et en encourageant l’endettement.
Mais les économies ne cessent pas de fonctionner sous prétexte que la banque centrale fait des erreurs. Si on les laisse tranquilles, les marchés corrigent les erreurs, et c’était précisément ce qui était en train de se passer sur les marchés obligataires et actions américains : ils triaient les bons et mauvais investissements.
Les marchés font rapidement et efficacement le ménage dans les dettes excessives. Les crédits sont évalués au prix du marché. Les débiteurs font défaut. Les dettes diminuent à mesure que des prêteurs intrépides vont à la rescousse des meilleures d’entre eux, tout en laissant sombrer les autres.
Quelle énorme erreur qu’intervenir et stopper ce processus de rectification. Mais c’est exactement ce qu’a fait Ben Bernanke, économiste universitaire n’ayant aucune connaissance ni compréhension de la façon dont l’économie réelle fonctionne.
Son message était d’une naïveté à couper le souffle. C’était équivalent à remettre votre relevé d’identité bancaire à un Nigérian rencontré sur internet… puis attendre qu’un virement de 25 M$ arrive sur votre compte.
Au lieu de permettre au capitalisme de régler ses problèmes de dettes douteuses, Bernanke, Yellen, et désormais Powell, sont intervenus avec ce dont le marché avait le moins besoin : encore plus de crédit.
Les taux directeurs de la Fed sont tombés à zéro, et y sont restés presque tout le temps, depuis.
Une fois que la Fed a été sur le coup, plus un seul grand prêteur n’a fait faillite.
Ceux qui étaient trop stupides pour s’en sortir sont devenus « too big to fail » (trop grands pour faire faillite). Les idiots n’ont pas été séparés de leur argent. Les gestionnaires téméraires ont obtenu leurs bonus, et sont devenus encore plus téméraires. Et les problèmes d’endettement excessif se sont aggravés.
La dette totale des Etats-Unis a presque doublé, et affichait 86 000 Mds$ fin 2021.
Mais quel type de stratégie était-ce, pour combattre une crise de la dette ?
Hélas, la Fed n’a rien appris. Elle continue d’imprimer de l’argent à une cadence de 20 Mds$ par semaine. Et elle promet de faire quelque chose pour préserver sa crédibilité.
Quoi ? Il parait qu’elle s’apprêterait à relever les taux d’intérêt ! Peut-être même de 100 points de base ! Cela donnerait des taux de MOINS 6,4%.
Nous avons un peu le vertige, rien que d’y penser.