** Avant de prendre ses fonctions, le président de la Réserve fédérale américaine, Ben Bernanke, avait promis de larguer des liasses de billets depuis des hélicoptères si jamais l’économie américaine avait un jour besoin d’une injection rapide de liquidités. Cependant, ce qu’il a négligé de mentionner, c’est qu’avec la distribution de billets verts fraîchement imprimés, les trousses de secours d’urgence contiendraient aussi suffisamment de bâtons pour bloquer les roues d’un avenir prévisible.
– On comprend donc pourquoi les investisseurs ne savent plus quel projectile financier aura le plus d’impact sur le marché ; les bâtons ou les liquidités (ou bien ne sont-ils que deux côtés distincts d’un même projectile) ?
– Ceux qui pensent que l’injection de liquidités devrait relancer les rouages rouillés de l’économie disent que le moment d’acheter est quasiment arrivé. "Ces renflouement ont seulement besoin d’un peu de temps pour s’infiltrer dans le système", prétendent-ils. "On sera ensuite de nouveau en piste, plus forts et encore meilleurs qu’avant".
– Ceux qui pensent que les outils utilisés par la Fed mèneront à un peu plus qu’un obscurcissement des mécanismes du marché disent qu’il est temps de vendre. "Laissez donc faire la machine", disent-ils. "Laissez le marché se débrouiller. Nous ne reviendrons pas en piste tant que nous n’aurons pas laissé les prix revenir à leur moyenne".
– La récente activité boursière bipolaire illustre parfaitement la confusion collective ressentie par l’homo investissorius. L’indice Dow Jones, par exemple, a gagné 260 points avant la pause midi de mardi… puis il est retombé à son point de départ en deux heures… avant de remonter de 270 points à la clôture. La trajectoire des indices du monde entier est irrégulière depuis que le bruit des hélicoptères s’est fait entendre.
– Que peut faire un investisseur ?
** Autre source d’inquiétude, l’incessant bruit de fond émis par les politicards de tout poil.
– "Le plan de renflouement de Paulson de 700 milliards rejeté par le Parlement des Etats-Unis", annonçaient les gros titres du 29 septembre 2008. Les investisseurs ont paniqué, ils ne savaient pas quoi faire. L’encre était à peine sèche que les gros titres annonçaient déjà l’inverse.
– "Le renflouement fait loi : le président Bush signe un plan historique de 700 milliards de dollars pour repousser la crise du crédit", pouvait-on lire le 3 octobre.
– Ainsi en va-t-il pour l’industrie automobile. Les huiles de Détroit ont d’abord été abandonnées — "les Trois Grands frappés, toute aide leur est refusée", disait un journal. Le public avait à peine eu le temps de critiquer les excès financiers des dirigeants de ces entreprises que l’on en était déjà au "deuxième round" des "négociations".
– La question est : est-ce que quelque chose a changé depuis la première tentative de mendicité refoulée ? L’Associated Press explique :
– "Les trois grands constructeurs automobiles de Détroit ont remplacé leurs jets privés par des voitures hybrides et leurs supplications vagues pour obtenir une aide fédérale par des demandes précises de pas moins de 34 milliards de dollars, afin de persuader le Congrès, lors de leur seconde tentative, de fournir de quoi subsister à leurs entreprises en difficulté."
– Attendez, ce ne devait pas être 25 milliards de dollars à l’origine ? Apparemment, les kleptocrates n’ont pas la même façon d’apprécier neuf milliards de dollars durement gagnés que leurs contribuables. Mais après tout, quel est le problème ? Ce n’est pas leur argent !
– Les investisseurs subissent eux aussi, et pas de signe d’espoir à l’horizon. Ils ne savent plus si leur environnement s’approche plus de l’Amérique capitaliste ou de la Chine maoïste. Faut-il fuir ?… se battre ?… ou craindre ? Une fois encore, les prévisions sont aussi claires que la conscience d’un politicien.